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11/04/2008 | FRANCE | N°07-41099

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 avril 2008, 07-41099


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 janvier 2007), que Mme X..., embauchée le 1er octobre 1989 comme photo-compositeur de presse par la société d'Imprimerie de la rue du Louvre (SIRLO) a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la réparation des conséquences de faits qualifiés de discrimination et de harcèlement moral ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de ces demandes alors, selon le moyen :

1°/ qu'il

y a lieu, lorsqu'un salarié fait état d'un harcèlement dont il est victime et qui trouve...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 9 janvier 2007), que Mme X..., embauchée le 1er octobre 1989 comme photo-compositeur de presse par la société d'Imprimerie de la rue du Louvre (SIRLO) a saisi la juridiction prud'homale de demandes tendant à la réparation des conséquences de faits qualifiés de discrimination et de harcèlement moral ;

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme X... de ces demandes alors, selon le moyen :

1°/ qu'il y a lieu, lorsqu'un salarié fait état d'un harcèlement dont il est victime et qui trouve sa cause dans un traitement discriminatoire dû par exemple à ses origines ou à son sexe, d'appliquer les règles probatoires de la discrimination déterminées par l'article L. 122-45 du code du travail ; qu'il ne s'agit en effet pas seulement d'établir l'existence d'un harcèlement dont le salarié peut être victime mais que ce comportement trouve en réalité sa cause dans l'une des caractéristiques individuelles de l'intéressé ; qu'en imposant dès lors, en l'espèce, à Mme X... le régime probatoire du harcèlement quand la salariée se plaignait du traitement discriminatoire dont elle avait été victime, la cour d'appel a violé ensemble les articles L. 122-45 et L. 122-52 du code du travail ;

2°/ qu'aux termes de l'article 4 du code de procédure civile «l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense (…)» ; que le juge méconnaît en conséquence les termes du litige lorsqu'il déclare contesté un fait dont l'exactitude n'est pas discutée ou qu'il introduit dans le litige des moyens de fait que les parties n'avaient pas invoqués ; que dès lors, en retenant, en l'espèce, pour débouter Mme X... de ses demandes, que la provenance des nombreux plannings, tableaux, schémas comparatifs qu'elle versait aux débats pour attester du traitement discriminatoire dont elle avait été victime n'était pas établie, de sorte que leurs données ne pouvaient être tenues pour objectives et qu'il n'était pas permis de connaître l'auteur de la photocopie d'une feuille, portant, selon Mme X..., des inscriptions manuscrites de M. Y..., alors que ni ce dernier, ni la société SIRLO ne contestait la provenance de ces documents, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ; -que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leur prétention ; qu'en s'abstenant, pour apprécier la réalité de la discrimination raciale et sexuelle dont se plaignait Mme X..., de s'expliquer sur l'avis du médecin du travail en date du 13 juin 2003 constatant la véracité des faits invoqués par la salariée et formulant son soutien aux « différentes femmes travaillant à Paris-Turf», sur le compte-rendu de la réunion du comité d'entreprise du 28 février 2003 au terme duquel M. Z..., rappelant «l'affaire de harcèlement moral (…) déjà évoquée lors de la dernière réunion du 31 janvier 2003 », indiquait qu'en aucun cas ne devaient « fus er des propos racistes ou d'exclusion», sur la lettre en date du 13 mai 2004 au terme de laquelle la salariée informait son employeur de ce que M. A..., l'un de ses collègues, lui avait déclaré «retourne dans ton pays si tu n'es pas contente, retourne t'occuper de la démocratie là bas» et sur la photo d'un émir avec sa coiffe qui avait été scotchée sur son ordinateur, pièces dont la portée était corroborée par les attestations de trois collègues féminines indiquant que Mme X... avait été traitée d'«arabe fainéante» et que nombre de femmes de l'entreprise se heurtaient à un clan constitué d'hommes, souvent syndicalistes, qui rendait difficile l'exécution de leur travail, la cour d'appel a également privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
-qu'en concluant de l'affirmation par l'une des collègues de Mme X... de ce que «le cas X... ne serait pas isolé», qu'elle contredisait la thèse d'un traitement discriminatoire à l'encontre de la salariée alors que lorsque la discrimination vise une catégorie particulière de salariés : femmes, représentants du personnel, salariés d'origine étrangère, salariés sous contrat de travail temporaire, etc, plusieurs salariés d'une même entreprise peuvent subir en même temps un traitement discriminatoire sans que leur nombre permette de facto d'écarter cette qualification, la cour d'appel a violé l'article L. 122-45 du code du travail ; - que si les juges du fond apprécient souverainement le sens, la valeur et la portée des attestations qui leur sont soumises, ils n'en demeurent pas moins tenus de s'expliquer sur les moyens qui leur sont soumis qui tendent à établir l'inopérance de ces témoignages en raison même des personnes qui en sont les auteurs ; que dès lors, en se contentant en l'espèce de conclure qu'étaient suffisamment probantes les attestations des hommes d'origine européenne qui avaient témoigné en faveur de la société et de M. Y..., sans s'expliquer sur le moyen déterminant des conclusions de l'exposante soulignant qu'ils n'étaient pas à même d'apprécier la réalité d'une discrimination subie par une femme d'origine maghrébine, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; - que l'employeur étant tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise et l'absence de faute de sa part ne pouvant l'exonérer de sa responsabilité, il doit impérativement, dès lors qu'il est informé de la plainte d'un salarié relative au harcèlement qu'il dit subir, réagir dès le stade du soupçon ; qu'en ne recherchant pas, en l'espèce, alors même qu'il ressortait du compte rendu de la réunion du comité d'entreprise du 28 février 2003 et de la lettre du médecin du travail du 13 juin 2003 que la société SIRLO avait bien été informé, fin 2002, de la situation de Mme X..., si l'employeur avait été diligent face à ses plaintes, s'il avait cherché à entendre l'intéressée ainsi que M. Y... pour éclaircir la situation et faire cesser ce trouble, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 122-49, L. 122-51 et de l'article L. 230-2 du code du travail, tel qu'interprété à la lumière de la directive CE n° 89/391 du 12 juin 1989 ;

Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a, sans méconnaître les termes du litige ni les règles de preuve édictées par les articles L .122-45 et L. 122-52 du code du travail, estimé, par une appréciation souveraine des éléments qui lui étaient soumis, que la salariée n'apportait aucun élément laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte ou permettant de présumer l'existence d'un harcèlement ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07-41099
Date de la décision : 11/04/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 09 janvier 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 avr. 2008, pourvoi n°07-41099


Composition du Tribunal
Président : M. Chauviré (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Gatineau, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.41099
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