LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 mars 2006), que Mme X..., engagée le 17 février 1972 par la société Azur autos en qualité de facturière, a été licenciée le 4 octobre 2002 pour faute grave tirée d'une dénonciation erronée à la direction de faits de harcèlement commis par un supérieur hiérarchique et de critiques émises par la salariée sur la manière dont la direction avait conduit une enquête sur les faits dénoncés ;
Attendu que la société Azur autos fait grief à l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 mars 2006) d'avoir jugé le licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen :
1°/ que commet une faute grave le salarié qui abuse de son droit d'expression en proférant des accusations diffamatoires contre un autre salarié ; qu'ainsi en l'espèce où il a été établi et constaté par l'arrêt attaqué que les accusations de harcèlement sexuel et de harcèlement moral formulées par Mme X... à l'encontre de M. Y... étaient dépourvues de tout fondement, la cour d'appel, en n'évoquant que le harcèlement moral considéré comme relevant de la simple erreur de qualification et en omettant l'accusation de harcèlement sexuel pour écarter la faute grave, a violé les articles L. 122-6 et L. 461-1 du code du travail ;
2°/ qu' en considérant qu'en indiquant au président-directeur général de la société par lettre du 10 septembre 2002 qu'elle était consternée par le comportement en réaction aux faits dénoncés dans la lettre du 19 août 2002 et en l'accusant de tentatives d'intimidation et de division et de menaces de licenciement, Mme X... n'avait émis que des critiques qui restaient dans les limites du droit d'expression, la cour d'appel a violé les articles L. 122-6 et L. 461-1 du code du travail ;
3°/ que la faute grave du salarié qui abuse de son droit d'expression est constituée même en l'absence de trouble apportée par son comportement au fonctionnement de l'entreprise ; qu'ainsi, la cour d'appel en considérant que les accusations et dénonciations proférées par Mme X... ne constituent pas un abus de droit d'expression faute pour l'employeur d'établir le trouble caractérisé causé dans l'entreprise par celle-ci a violé les articles L. 122-6 et L. 461-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'indépendamment du motif surabondant critiqué par la dernière branche du moyen, la cour d'appel, qui a fait ressortir, d'une part, que la dénonciation à la direction du comportement d'un supérieur hiérarchique, sous la qualification erronée de harcèlement, émanait d'une salariée atteinte d'un syndrome dépressif qui n'avait pas agi de mauvaise foi, d'autre part, que les critiques formulées dans un courrier adressé à la direction sur la manière dont celle-ci avait diligenté l'enquête sur les faits dénoncés ne comportaient pas de termes excessifs ou diffamatoires, a pu décider que la salariée n'avait commis aucun abus dans l'exercice de sa liberté d'expression et que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le moyen unique du pourvoi incident éventuel de la salariée :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Condamne la société Azur autos aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Azur autos à payer à Mme X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux avril deux mille huit.