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01/04/2008 | FRANCE | N°07-84144

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 avril 2008, 07-84144


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-

Z... Nathalie, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 4 mai 2007, qui, dans la procédure suivie contre Claude Y... du chef de violences aggravées, a réformé le jugement d'incompétence, condamné le prévenu à huit mois d'emprisonnement avec sursis pour blessures involontaires et renvoyé l'affaire au tribunal correctionnel sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et

en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

-

Z... Nathalie, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 4 mai 2007, qui, dans la procédure suivie contre Claude Y... du chef de violences aggravées, a réformé le jugement d'incompétence, condamné le prévenu à huit mois d'emprisonnement avec sursis pour blessures involontaires et renvoyé l'affaire au tribunal correctionnel sur les intérêts civils ;

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 10 août 2004, Nathalie Z...a porté plainte contre son concubin, Claude Y..., l'accusant de l'avoir, le 2 août précédent, frappée à coups de poing et blessée à l'oeil gauche, avant de la conduire à l'hôpital où elle avait été opérée et était restée hospitalisée jusqu'au 9 août ; que Claude Y... a été cité devant le tribunal correctionnel pour avoir volontairement commis sur sa concubine des violences ayant entraîné plus de huit jours d'incapacité totale de travail ; que, s'étant constituée partie civile, Nathalie Z...a soulevé une exception d'incompétence de cette juridiction, en soutenant que les violences commises par son concubin, qui lui avaient causé la perte totale et définitive de l'oeil gauche relevaient de la qualification criminelle prévue par les articles 222-9 et 222-10, 6°, du code pénal ; que, se référant aux résultats de l'expertise de la blessure de la victime qu'il avait ordonnée à la demande du prévenu, le tribunal correctionnel, faisant droit à cette exception, s'est déclaré incompétent et a renvoyé le ministère public à se pourvoir ainsi qu'il aviserait ; que le prévenu et le parquet ont relevé appel de cette décision ;

En cet état ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 222-9 du code pénal, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a réformé le jugement d'incompétence entrepris ;

" aux motifs que pour que soit retenu leur caractère criminel, les violences doivent, aux termes des dispositions de l'article 222-9 du code pénal, avoir entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ; que suivant une jurisprudence constante, cette mutilation ou infirmité même partielle doit correspondre à une altération irréversible de l'organe fonctionnel ; que le 2 mars 2006, le docteur A..., après avoir indiqué que l'état actuel de Nathalie Z..., tant au plan oculaire qu'au plan neurologique, était imputable directement et exclusivement au très violent traumatisme de l'oeil gauche dont elle a été victime, constatait qu'elle n'était pas « consolidée » et qu'il convenait au moins « d'attendre deux ans pour conclure définitivement sur les soins nécessaires à cet oeil et être certain de l'absence de récupération possible d'une quelconque fonction de cet organe » ; que cet expert ajoutait en effet que si « au jour de l'examen clinique, il retrouvait l'ensemble des résultats des examens antérieurs effectués par les spécialistes », le fait que la victime affirme désormais « distinguer le noir et la lumière et voir dans son champ visuel bouger des ombres » constituait un fait « nouveau » puisque le docteur B...n'avait constaté, le 15 septembre 2005, aucune perception lumineuse au niveau de cet oeil gauche et, par là même, une évolution susceptible de se poursuivre ; que cette supputation d'une évolution des séquelles dont toute définition de l'ampleur est prématurée suffit à retirer toute certitude à l'absence de récupération ; que les énonciations d'un tel rapport, où l'expert ne s'est prononcé sur la perte effective totale de la fonction d'un des organes des sens par perte totale de l'acuité visuelle de l'oeil gauche chez cette victime que « dans l'attente » d'une éventuelle récupération, n'établissent donc aucunement à ce jour le caractère irréversible de l'atteinte subie par Nathalie Z...; que, dès lors, l'infirmité ne peut, à ce jour, être qualifiée de permanente au sens des dispositions de l'article 222-9 du code pénal ; qu'en conséquence, les faits ne pouvant en l'état actuel recevoir de qualification criminelle, le jugement par lequel le tribunal s'est déclaré incompétent est en voie de réformation ;

" alors qu'en se fondant, pour dire que les faits poursuivis ne pouvaient recevoir la qualification criminelle de violences volontaires ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente sur la circonstance qu'au jour où elle statuait, il n'était pas certain que la perte de l'acuité visuelle de l'oeil gauche de Nathalie Z...fut irréversible, la cour d'appel, qui, ce faisant, n'a pas pour autant exclu le caractère irréversible de cette infirmité, n'a pas donné une base légale à sa décision " ;

Attendu que, faisant droit aux conclusions du prévenu, selon lesquelles il avait blessé sa compagne à l'oeil involontairement, en lui tendant les clés de leur véhicule à l'issue d'une dispute après boire, la cour d'appel retient que les faits visés à la prévention sous la qualification de violences aggravées constituent en réalité le délit de blessures involontaires ;

Attendu qu'ainsi, le moyen, qui se borne à critiquer des énonciations surabondantes relatives à l'existence d'une infirmité permanente, est inopérant ;

Mais, sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 520 et 591 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a renvoyé l'action civile aux premiers juges ;

" aux motifs qu'il y a lieu de renvoyer au premier juge pour qu'il soit statué sur le fond de la constitution de partie civile de Nathalie Z...afin de respecter le double degré de juridiction ;

" alors que lorsqu'elle réforme un jugement d'incompétence et évoque, la cour d'appel doit directement remplir la mission des premiers juges et, par suite, même en l'absence d'appel de la partie civile, statuer tant sur l'action publique que sur l'action civile ; que, dès lors, en renvoyant l'action civile aux premiers juges après avoir réformé le jugement d'incompétence frappé d'appel par le prévenu et le ministère public et statué sur l'action publique, la cour d'appel a méconnu les textes et le principe ci-dessus mentionnés " ;

Vu l'article 520 du code de procédure pénale ;

Attendu que, lorsque la cour d'appel réforme, sur le seul appel du ministère public ou du prévenu, une décision d'incompétence et évoque, elle doit remplir directement la mission des premiers juges et, par suite, même en l'absence d'appel de la partie civile, statuer tant sur l'action pénale que sur l'action civile ;

Attendu qu'après avoir réformé le jugement d'incompétence, évoqué, statué sur l'action publique et déclaré recevable la constitution de partie civile de Nathalie Z..., la cour d'appel déclare renvoyer l'affaire au premier juge aux fins de statuer sur l'action civile ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu la portée du texte susvisé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions ordonnant le renvoi de l'affaire au premier juge pour statuer sur l'action civile, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes, en date du 4 mai 2007, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, sur les seuls intérêts civils ;

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à application au profit de la société civile professionnelle Bachellier et Potier de la Varde, de l'article 618-1 du code de procédure pénale, sur le fondement de l'article 2 de l'ordonnance du 8 décembre 2005 ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nîmes et sa mention en marge de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Farge conseiller le plus ancien faisant fonction de président en remplacement du président empêché, M. Blondet conseiller rapporteur, M. Palisse conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-84144
Date de la décision : 01/04/2008
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 04 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 avr. 2008, pourvoi n°07-84144


Composition du Tribunal
Président : M. Farge (conseiller le plus ancien faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Bachellier et Potier de La Varde, SCP Monod et Colin

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:07.84144
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