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26/03/2008 | FRANCE | N°06-21944

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 26 mars 2008, 06-21944


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 octobre 2006), que, par actes notariés du 29 septembre 1993, M. X... et ses deux enfants ont constitué dix sociétés civiles (les SCI) avec apport en numéraire par chacun des associés d'une somme de 1 000 francs et apport en nature par M. X... de la nue-propriété d'immeubles lui appartenant, évaluée lors du démembrement à leur valeur économique à partir des tables de mortalité ; que les actes de constitution prévoyaient

que les SCI seraient propriétaires des parts et portions désignées dès leur i...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 octobre 2006), que, par actes notariés du 29 septembre 1993, M. X... et ses deux enfants ont constitué dix sociétés civiles (les SCI) avec apport en numéraire par chacun des associés d'une somme de 1 000 francs et apport en nature par M. X... de la nue-propriété d'immeubles lui appartenant, évaluée lors du démembrement à leur valeur économique à partir des tables de mortalité ; que les actes de constitution prévoyaient que les SCI seraient propriétaires des parts et portions désignées dès leur immatriculation, mais qu'elles n'en auraient la jouissance qu'à compter du décès de M. X... qui se réservait l'usufruit des biens apportés sa vie durant ; que par acte notarié du 23 décembre 1993, M. X... a fait une donation à titre de partage anticipé à ses enfants de la totalité des parts, sauf une ; que l'administration fiscale a estimé que l'apport concomitant de la nue-propriété d'un bien immobilier à une société constituée sous la forme d'une SCI et la donation de la quasi totalité des parts représentatives de l'apport, alors même que la SCI n'avait pas de fonctionnement réel, dissimulait la donation des immeubles en fraude de l'article 762 du code général des impôts quant à l'évaluation de la part de l'usufruitier ; qu'elle a procédé à une nouvelle liquidation des droits de mutation à titre gratuit ; que le litige a été soumis à l'appréciation du comité consultatif pour la répression des abus de droit qui a émis, le 22 septembre 2000, un avis favorable ; qu'après rejet de leur réclamation, les héritiers ont assigné le directeur des services fiscaux en dégrèvement de l'imposition ; que leur demande, rejetée en première instance, a été accueillie par la cour d'appel ;

Attendu que le directeur général des impôts fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :

1°/ qu'il résulte des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales que l'administration fiscale peut écarter les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement moins élevés ; que la mise en oeuvre de la procédure de répression des abus de droit suppose que l'administration établisse que lesdits contrats présentent un caractère fictif ou peuvent être considérés comme ayant été conclus dans un but exclusivement fiscal ; que pour juger cette preuve non rapportée en l'espèce, l'arrêt attaqué se fonde sur l'intérêt économique de l'opération de démembrement au profit du nu-propriétaire et sur la volonté des coassociés des SCI de préserver les intérêts familiaux des aléas d'une indivision ; que cependant, en ne répondant pas aux conclusions de l'administration fiscale faisant valoir l'absence d'activité des sociétés civiles constituées entre M. X... et ses enfants qui justifiait cependant à elle seule la mise en oeuvre de la procédure de répression des abus de droit, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ qu'il résulte des dispositions de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales que l'administration fiscale peut écarter les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement moins élevés ; que la mise en oeuvre de la procédure de répression des abus de droit suppose que l'administration établisse que lesdits contrats présentent un caractère fictif ou peuvent être considérés comme ayant été conclus dans un but exclusivement fiscal ; que pour écarter toute notion d'abus de droit et justifier l'utilité économique de l'opération en cause, la cour d'appel d'Aix-en-Provence a établi que M. Giancarlo X... disposait de tous les pouvoirs pour la durée de sa vie dans l'organisation des SCI ce qui lui conférait le contrôle de ces sociétés et en conséquence celui de chacun des immeubles apportés notamment celui de les vendre ; qu'en statuant ainsi, par des motifs établissant au contraire l'absence d'intérêt économique et de viabilité des sociétés et donc leur caractère fictif, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des dispositions du texte précité ;

Mais attendu que l'arrêt retient que la constitution des SCI par M. X... lui avait permis d'organiser les statuts de la manière qu'il estimait la plus appropriée, conservant le contrôle des SCI et celui des immeubles ainsi que la possibilité de les céder ; qu'il retient encore que l'opération avait permis à M. X... d'assurer après son décès la cohésion du patrimoine familial en mutualisant entre ses enfants les aléas locatifs et les écarts de rentabilité susceptibles d'apparaître entre les différents immeubles et en permettant de mettre en place une procédure d'agrément de nouveaux associés tout en évitant que le créancier d'un indivisaire puisse déclencher le partage judiciaire des biens familiaux et cela dans un cadre juridique présentant une stabilité beaucoup plus grande qu'une indivision ; qu'en l'état de ces constatations, desquelles il résulte que l'opération litigieuse ne présentait pas une finalité exclusivement fiscale, la cour d'appel qui a ainsi répondu aux conclusions prétendument délaissées, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le directeur général des impôts aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne le directeur général des impôts à payer à M. et Mme X... la somme globale de 2 500 euros et rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six mars deux mille huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 06-21944
Date de la décision : 26/03/2008
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 03 octobre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 26 mar. 2008, pourvoi n°06-21944


Composition du Tribunal
Président : Mme Favre (président)
Avocat(s) : Me Odent, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2008:06.21944
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