LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Limoges, 9 janvier 2006), que M. X..., engagé en qualité de voyageur-représentant-placier multicartes par la société Com Space depuis le 1er octobre 2001, a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de voir constater, aux torts de son employeur, la résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'une conciliation, consignée par procès-verbal, est intervenue entre les deux parties aux termes de laquelle l'employeur acceptait de diligenter une procédure de licenciement à l'encontre du salarié qui quant à lui s'engageait à restituer à la société du matériel lui appartenant ; que par lettre du 4 janvier 2003, le salarié a été licencié pour faute grave ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié qui est préalable :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à la résiliation judiciaire du contrat de travail et au paiement des sommes afférentes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un accord entre le salarié et l'employeur prévoyant l'engagement d'une procédure de licenciement afin de régler un différend relatif aux conditions de rupture du contrat de travail ne peut être valablement conclu que lorsque salarié a eu une connaissance effective des motifs du licenciement ; qu'en l'espèce, en relevant par motifs adoptés que le salarié n'avait émis de réserve ni sur la nature de son licenciement ni sur ses conséquences financières dans l'accord signé devant le bureau de conciliation, sans pour autant écarter comme nul cet accord dont les termes révélaient l'ignorance des motifs de son licenciement dans laquelle le salarié se trouvait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et violé les articles L. 122-14-1, L. 122-14-2 et L. 511, alinéa 1er, ainsi que R. 516-13, R. 516-14, R. 516-41 du code du travail ;
2°/ que dans ses conclusions, M. X... reprochait au conseil de prud'hommes d'avoir refusé d'examiner sa demande en résiliation judiciaire de son contrat de travail au motif qu'il avait accepté le principe d'un licenciement par procès-verbal de conciliation ; que le salarié démontrait au soutien de sa critique que le procès verbal de conciliation avait été remis en cause par la décision de la société Com Space de le licencier pour faute grave au mépris de l'accord intervenu ; qu'en conséquence, il soutenait que les juges du fond n'étaient plus tenus par la conciliation partielle et devaient avant toute autre recherche statuer sur la demande en résiliation judiciaire ; que la cour d'appel en n'examinant ni ce moyen de nature à exercer une influence sur la solution du litige ni les griefs invoqués à l'encontre de l'employeur, a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu, d'abord, qu'il ne résulte pas des prétentions en appel du salarié qu'il a soutenu que l'accord ayant fait l'objet du procès-verbal de conciliation était nul en raison de son ignorance de l'étendue de ses droits ;
Attendu, ensuite, que le salarié n'ayant pas demandé à la cour d'appel de prononcer la résolution judiciaire du contrat de travail, elle n'avait pas à répondre à des conclusions qui étaient inopérantes ;
D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche comme étant nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est, pour le surplus, pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que la société Com Space fait grief à l'arrêt d'avoir dit que le licenciement du salarié reposait sur une cause réelle et sérieuse et non sur une faute grave, alors, selon le moyen :
1°/ que la renonciation à un droit ne se présume pas ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué qu'au cours de l'audience de conciliation devant le conseil de prud'hommes, les parties avaient conclu un accord de conciliation partiel aux termes duquel la société Com Space prendrait l'initiative de la rupture et engagerait une procédure de licenciement à l'encontre de M. X... ; qu'en considérant que ce procès-verbal de conciliation, dont la validité n'était pas contestée, excluait nécessairement que le licenciement soit prononcé pour faute grave, la cour d'appel a violé le principe selon lequel la renonciation à un droit ne se présume pas, ensemble les articles 1134, 2052 du code Civil, L. 122-6, L. 122-9, L. 522-3 et L. 523-5 du code du travail ;
2°/ qu'il en va d'autant plus ainsi en l'espèce que l'arrêt attaqué a expressément admis que M. X... avait eu un comportement commercial «inadmissible», consistant à avoir prévu le paiement d'un «dessous de table» non visé sur le bon de commande au profit d'un installateur, ce qui caractérisait le délit de vente sans facture, ce qui constitue un comportement déloyal du salarié et qui est susceptible d'exposer son employeur à des poursuites pénales ; qu'en écartant dès lors la qualification de faute grave, la cour d'appel a violé les articles L. 120-4, L. 121-1, L. 122-6 et L. 122-9 du code du travail ;
3°/ que la société Com Space s'étant seulement engagée dans le procès verbal de conciliation à licencier M. X... sans autre précision, viole l'article 1134 du code civil, ensemble les articles L. 522-3 et L. 523-5 du code du travail, l'arrêt attaqué qui, par adoption de motifs, retient qu'en licenciant le salarié pour faute grave ladite société aurait remis en question l'accord signé en conciliation ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a constaté que le salarié avait opéré une reprise de matériel sans l'accord de l'employeur et accepté d'établir, pour des travaux effectués par un installateur pour le compte de la société, un bon de commande mentionnant un prix minoré, a pu décider que ces agissements ne constituaient pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen du pourvoi principal de l'employeur :
Attendu que la société Com Space fait encore grief à l'arrêt d'avoir alloué au salarié des sommes au titre de ses commissions impayées calculées sur le chiffre d'affaires de la société, alors, selon le moyen :
1°/ que le contrat de travail de M. X... stipulait, en son article 5, «une rémunération mensuelle calculée par rapport à la marge brute dégagée ; que la marge bénéficiaire représente la différence entre le prix de vente (chiffre d'affaires) et le prix de revient ; qu'il s'ensuit que dénature ces termes clairs et précis du contrat de travail et viole l'article 1134 du code civil l'arrêt attaqué qui retient que les commissions du salarié devaient être calculées, non sur la différence entre le chiffre d'affaires et le montant du prix de revient, mais sur le chiffre d'affaires lui-même ;
2°/ qu'il en est d'autant plus ainsi que le contrat de travail précisait expressément dans son annexe 1 les différentes charges qui devaient être déduites du prix de vente pour déterminer la marge brute ("frais
professionnels", "frais publicitaires", " frais de téléphone", "amortissement et entretien du véhicule", "salaire brut + charges patronales (35 %)" et "congés payés") pour le calcul du montant des commissions dues au salarié ;
Mais attendu qu'en se bornant à réintégrer dans l'assiette de calcul des commissions du salarié, des sommes qui en avaient été indûment soustraites par l'employeur, la cour d'appel n'a pas dénaturé les termes du contrat ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Com Space aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Com Space à payer à M. X... la somme de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf mars deux mille huit.