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14/11/2007 | FRANCE | N°07-83208

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 novembre 2007, 07-83208


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL DE LYON,- L'ÉTAT FRANÇAIS, partie civile,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 7e chambre, en date du 23 mars 2007, qui a relaxé Roland X... du chef d'escroquerie et a débouté la partie civile de ses demandes :
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits;
Sur le moyen unique de cassation, proposé par le procureur général, pris de la violation de l'article 593 du code de procéd

ure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour l'État français, pris d...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur les pourvois formés par :
- LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL DE LYON,- L'ÉTAT FRANÇAIS, partie civile,

contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 7e chambre, en date du 23 mars 2007, qui a relaxé Roland X... du chef d'escroquerie et a débouté la partie civile de ses demandes :
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu les mémoires produits;
Sur le moyen unique de cassation, proposé par le procureur général, pris de la violation de l'article 593 du code de procédure pénale ;
Sur le moyen unique de cassation proposé pour l'État français, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, 1382 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs;
"en ce que l'arrêt attaqué a relaxé le prévenu du chef d'escroquerie à la TVA et a rejeté la demande de dommages-intérêts formé par la partie civile ;
"aux motifs propres qu' aux termes de l'article 313-1 du code pénal, l'escroquerie est le fait, ..., soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ; qu'en l'espèce, les manoeuvres frauduleuses reprochées au prévenu consistent, aux termes de la prévention à avoir souscrit des déclarations faisant état de crédits de TVA partiellement fictifs au titre de la période du 1er juin au 31 octobre 2001 ; que comme l'a relevé avec justesse le tribunal, pour obtenir les crédits indus de TVA, le prévenu s'est contenté d'adresser à l'administration fiscale : d'une part des déclarations mensongères faisant apparaître au profit de la société dont il était le gérant un crédit de TVA ; d'autre part, des demandes de remboursement de ces crédits injustifiés ; qu'il s'ensuit que les seules manoeuvres frauduleuses qui lui sont imputées s'analysent en réalité en des mensonges écrits, commis par lui et insusceptibles de revêtir une telle qualification ; que l'infraction d'escroquerie qui lui est reprochée n'est donc pas constituée en l'absence d'élément matériel ;
"et aux motifs éventuellement adoptés que le prévenu est poursuivi du chef d'escroqueries ; que s'il reconnaît avoir établi des factures mentionnant un taux de TVA qui n'était pas conforme à la réalité, il convient de rappeler d'une part qu'il n'est pas poursuivi pour le délit de faux en écritures, d'autre part qu'il n'est pas établi que les factures en question aient été adressées à l'administration fiscale à l'appui des demandes de remboursement de TVA, en 2001 et 2002 ; qu'il apparaît au contraire que ces factures n'ont été fabriquées qu'à l'occasion d'un contrôle fiscal postérieur en 2004 ; que l'administration fiscale avait donc versé au prévenu les sommes indues au seul vu des demandes de remboursement de crédit de TVA envoyées par la société Lyon Glaces ; que faute d'être accompagnées et renforcées par d'autres éléments extérieurs destinés à leur donner force et crédit, ces demandes de reversement de sommes indues ne constituent que des mensonges écrits insuffisants à caractériser les manoeuvres frauduleuses constitutives du délit d'escroquerie ; que le prévenu sera donc renvoyé des fins de la poursuite ;
"alors que, premièrement, à supposer même que les fausses factures portant un taux de TVA à 19,60 % aient été fabriquées postérieurement au dépôt des demandes de restitution, de toute façon, les juges du fond devaient rechercher si le fait pour le contribuable de porter en comptabilité des factures assorties d'un taux de TVA à 19,60 % pour donner crédit à ces demandes n'était pas révélateur d'une manoeuvre et que faute de s'être expliqués sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 313-1 du code pénal ;
"alors que, deuxièmement et de la même manière, les juges du fond auraient dû s'expliquer sur le point de savoir si le fait pour le contribuable de ne pas porter en comptabilité des factures d'achat mentionnant un taux de TVA à 5,50% n'était pas révélateur de manoeuvres, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard de l'article 313-1 du code pénal ;
"alors que, troisièmement, l'escroquerie à la TVA est caractérisée lorsque la déclaration mentionnant le crédit de TVA ou la demande de restitution de la TVA est accompagnée de manoeuvres telles celles résultant de manipulations comptables destinées à donner crédit à la déclaration ou à la demande, peu important que les éléments révélateurs des manoeuvres ont été matériellement portés à la connaissance de l'administration en même temps que la déclaration ou la demande de restitution dès lors que ces éléments peuvent être portés à la connaissance de l'administration eu égard aux pouvoirs de contrôle qui lui sont dévolus ; que de ce point de vue, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 313-1 du code pénal" ;
Les moyens étant réunis ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble l'article 313-1 du code pénal ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt confirmatif attaqué et des pièces de procédure que le contrôle fiscal de la société Lyon Glaces, dont Roland X... est le gérant, a établi que cette société, soumise au régime réel normal d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée, ne comptabilisait pas les factures d'un fournisseur, mentionnant une taxe au taux réduit de 5,5 %, puis leur substituait des fausses factures avec une TVA au taux normal de 19,60 % ; qu'après avoir déposé des déclarations mensuelles de chiffre d'affaires mentionnant un montant de taxe déductible inexactement calculé sur le taux normal, elle a sollicité le remboursement des crédits de taxe ainsi constitués; que Roland X... est poursuivi pour avoir, à l'aide de manoeuvres frauduleuses, obtenu de l'État des remboursements indus de TVA ;
Attendu que, pour relaxer le prévenu du chef d'escroquerie, l'arrêt énonce, notamment , que les seules manoeuvres frauduleuses imputées au prévenu, consistant dans des déclarations mensongères faisant apparaître un crédit de TVA et des demandes de remboursement de ces crédits injustifiés, s'analysent en des mensonges écrits non susceptibles de caractériser l'élément matériel du délit ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que constituent une mise en scène caractérisant les manoeuvres frauduleuses visées par l'article 313-1 du code pénal des demandes de paiement de crédits indus de TVA justifiées par des déclarations mensuelles de chiffre d'affaires indiquant un montant fictif de taxe déductible sous le couvert d'une comptabilité inexacte, dissimulant le montant de la taxe effectivement décaissée, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 23 mars 2007, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Dulin conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-83208
Date de la décision : 14/11/2007
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

ESCROQUERIE - Manoeuvres frauduleuses - Définition - Contributions indirectes - Taxe à la valeur ajoutée - Création d'un crédit d'impôt - Demande de remboursement justifiée par des documents dissimulant le montant de la taxe effectivement décaissée

ESCROQUERIE - Manoeuvres frauduleuses - Nature des manoeuvres - Mise en scène ou machination - Demande de remboursement de crédits fictifs de taxe à la valeur ajoutée justifiée par des documents dissimulant le montant de la taxe effectivement décaissée

Constituent une mise en scène caractérisant les manoeuvres frauduleuses visées par l'article 313-1 du code pénal des demandes de paiement de crédits indus de TVA justifiées par des déclarations mensuelles de chiffre d'affaires indiquant un montant fictif de taxe déductible sous le couvert d'une comptabilité inexacte, dissimulant le montant de la taxe effectivement décaissée. Encourt dès lors la censure l'arrêt d'une cour d'appel qui, pour relaxer le prévenu poursuivi du chef d'escroquerie pour avoir sollicité le remboursement de crédits fictifs de TVA, retient que les seules manoeuvres frauduleuses qui lui sont imputées s'analysent en des mensonges écrits non susceptibles de caractériser l'élément matériel du délit


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 23 mars 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 nov. 2007, pourvoi n°07-83208, Bull. crim. criminel 2007, N° 280
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2007, N° 280

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Fréchède
Rapporteur ?: M. Rognon
Avocat(s) : Me Foussard

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:07.83208
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