AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'entre le 23 septembre 1996 et le 6 février 1998, l'association Stade de Reims Champagne (l'association), titulaire d'un compte courant dans les livres de la Caisse de crédit mutuel de Reims d'Erlon (la caisse), a été victime de divers détournements commis par sa secrétaire-comptable et pour lesquels cette dernière a été pénalement condamnée ; que l'association a recherché la responsabilité de la caisse ;
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à verser à l'association la somme de 48 549, 37 euros et d'avoir rejeté toutes ses demandes, alors, selon le moyen, qu'en rejetant la demande de la banque tendant à être admise à recourir pour le tout contre l'association, aux motifs qu'elle ne produisait pas les ordres de virement qui auraient permis d'établir l'absence de négligence de sa part dans l'exécution de ses obligations de vérification de la régularité desdits virements, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu qu'il appartient au banquier, dépositaire des fonds que lui a confiés son client et qui, à ce titre, a l'obligation de ne les restituer qu'à celui qui les lui a confiés ou conformément aux indications de paiement de ce dernier, d'établir, en cas de contestation, qu'il a reçu du déposant l'ordre d'effectuer le paiement contesté ; qu' ayant retenu que l'association ne peut être tenue de verser aux débats des documents relatifs aux ordres de virement opérés à son profit par la secrétaire-comptable et qui ne pouvaient se trouver qu'entre les mains de la caisse, la cour d'appel n'a pas encouru le grief du moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles 1147 et 1937 du code civil :
Attendu qu'en l'absence de faute du déposant, ou d'un préposé de celui-ci, et même s'il n'a lui-même commis aucune faute, le banquier n'est pas libéré envers le client qui lui a confié des fonds quand il se défait de ces derniers sur présentation d'un faux ordre de paiement revêtu dès l'origine d'une fausse signature et n'ayant eu à aucun moment la qualité légale de chèque ; qu'en revanche, si l'établissement de ce faux ordre de paiement a été rendu possible à la suite d'une faute du titulaire du compte, ou de l'un de ses préposés, le banquier n'est tenu envers lui que s'il a lui-même commis une négligence, et ce seulement pour la part de responsabilité en découlant ;
Attendu que pour condamner la caisse à verser à l'association la somme de 48 549,37 euros, l'arrêt retient que s'il est établi que la secrétaire-comptable a commis une faute en détournant les fonds de l'association à son profit, la caisse, qui est tenue en sa qualité de dépositaire à une obligation de vérification de la régularité formelle des ordres de débit présentés, est mal fondée à invoquer cette faute pour tenter de s'exonérer de sa responsabilité en qualité de dépositaire, dès lors que n'est pas rapportée la preuve que l'inexécution de ses obligations provient d'une cause étrangère, c'est-à-dire d'une faute sur laquelle la caisse n'aurait eu aucun pouvoir de contrôle ou de vérification de nature à en empêcher l'accomplissement ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les détournements avaient été opérés par l'un des employés de l'association, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen :
Vu les articles 1382 et 1937 du code civil :
Attendu que pour condamner la caisse à verser à l'association la somme de 48 549,37 euros, l'arrêt retient qu'elle est mal fondée à soutenir que l'association aurait commis diverses fautes de négligence dans la surveillance de sa secrétaire-comptable, dès lors que par ses fonctions, cette dernière avait accès à l'endroit où ces chéquiers étaient rangés et qu'elle prenait ses précautions pour dissimuler ses agissements en faisant disparaître les talons de chèques et trafiquait les rapprochements comptables, commettant des actes délictueux pendant près d'un an et demi ;
Attendu qu'en se déterminant par de tels motifs impropres à justifier la carence dont avait fait preuve l'association dans l'exercice du pouvoir, inhérent à sa qualité d'employeur, de direction et de contrôle d'une salariée, à laquelle elle avait confié la fonction de secrétaire-comptable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Caisse de crédit mutuel de Reims à verser à l'association Stade de Reims Champagne la somme de 48 549,37 euros en deniers ou quittances, l'arrêt rendu le 10 octobre 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne l'association Stade de Reims Champagne aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille sept.