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25/07/2007 | FRANCE | N°07-83502

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 25 juillet 2007, 07-83502


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq juillet deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur les pourvois formés par :

1 )- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PAU,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour en date du 11 mai

2007 qui, dans la procédure de mise à exécution d'un mandat d'arrêt européen émis pa...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-cinq juillet deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur les pourvois formés par :

1 )- LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PAU,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour en date du 11 mai 2007 qui, dans la procédure de mise à exécution d'un mandat d'arrêt européen émis par les autorités judiciaires espagnoles à l'encontre d'Ignacio X...
Y..., a ordonné un supplément d'information ;

2 - LE PROCUREUR GENERAL PRES LA COUR D'APPEL DE PAU,

- X...
Y... Ignacio,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 26 juin 2007, qui a autorisé sa remise aux autorités judiciaires espagnoles en exécution d'un mandat d'arrêt européen ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

I - Sur le pourvoi contre l'arrêt du 11 mai 2007 ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 695-13 du code de procédure pénale ;

Attendu qu'il résulte des arrêts attaqués et des pièces de la procédure que, le 13 mars 2007, Ignacio X...
Y... s'est vu notifier un mandat d'arrêt européen émis le 17 janvier 2006 par le tribunal central d'instruction n° 5 de l'Audiencia Nacional, en vue de l'exercice de poursuites pénales des chefs d'appartenance à une organisation criminelle, de trafic illégal d'armes, de munitions et d'explosifs et d'actes de terrorisme ; qu'Ignacio X...
Y... n'a pas consenti à être remis aux autorités judiciaires de l'Etat d'émission ; que, par arrêt du 11 mai 2007, la chambre de l'instruction a ordonné un supplément d'information aux fins de recueillir des éléments complétant ceux visés au mandat ;

Attendu qu'en procédant de la sorte, les juges n'ont fait qu'user de la faculté qu'ils tiennent de l'article 695-33 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen est irrecevable ;

II - Sur les pourvois contre l'arrêt du 26 juin 2007 :

Sur le pourvoi du procureur général :

Attendu que le procureur général s'est pourvu contre ledit arrêt de la chambre de l'instruction, qui a accordé la remise d'Ignacio X...
Y... aux autorités judiciaires espagnoles ; que le dossier de la procédure est parvenu à la Cour de cassation le 2 juillet 2007 ;

Attendu que le demandeur n'a pas déposé dans le délai légal un mémoire exposant ses moyens de cassation ; qu'il y a lieu, en conséquence, de le déclarer déchu de son pourvoi, par application de l'article 574-2 du code de procédure pénale ;

Sur le pourvoi d'Ignacio X...
Y... :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002, des articles 15 de la Convention de New York contre la torture du 10 décembre 1984, de la loi n° 85-1173 du 12 novembre 1985, des articles 695-27, 695-32, 695-33, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, défaut de motif, manque de base légale ;

"alors que l'annulation de l'arrêt avant dire droit du 11 mai 2007 entraînera, par voie de conséquence, l'annulation de l'arrêt attaqué" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la décision-cadre du Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2002, des articles 15 de la Convention de New York contre la torture du 10 décembre 1984, de la loi n° 85-1173 du 12 novembre 1985, des articles 695-27, 695-32, 695-33, 591 et 593 du code de procédure pénale, ensemble violation des droits de la défense, défaut de motif, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la remise du demandeur à l'Etat espagnol :

"aux motifs que le supplément d'information ordonné par l'arrêt avant dire droit de la chambre de l'instruction de céans avait pour objet de déterminer si les charges pesant sur La personne dont la remise est demandée résultaient on non des seules déclarations d'Iratxe Z...
A..., lesquelles, selon la défense, avaient été extorquées par la torture ; que la réponse faite par l'Etat d'émission ne permet pas de connaître les éléments de preuve permettant d'imputer à la personne dont la remise est demandée les faits, objet dudit mandat d'arrêt européen ; qu'en effet les autorités judiciaires espagnoles se bornent à indiquer les patronymes des fonctionnaires de la garde civile qui, sur les lieux des attentats, ont constaté les dégâts, prélevé des restes des explosifs ou ont par la suite procédé à des expertises ; que, par contre, les pièces produites par le ministère public répondent aux interrogations de la chambre de l'instruction, puisqu'elles révèlent, d'une part, que les déclarations d'Iratxe Z...
A... constituent les seuls éléments permettant de mettre à la charge de la personne dont la remise est demandée les faits incriminés, et d'autre part, que la procédure judiciaire ouverte sur les faits de torture et violences portées par Iratxe Z...
A... contre plusieurs gardes civils a fait l'objet d'un arrêt disant n'y avoir lieu à poursuite pénale ; que ces pièces ont été régulièrement communiquées à la défense qui a pu les examiner et y répondre en temps utile dans son mémoire déposé dans les délais prescrits par le code de procédure pénale ; que les documents ainsi produits s'inscrivent régulièrement dans le débat juridique ouvert en ce qui concerne les charges pesant sur la personne dont la remise est demandée et les conditions dans lesquelles elles ont été recueillies ; que, par ailleurs, la défense affirme, sans en apporter la preuve que ces pièces ont fait l'objet d'un tri arbitraire visant à ne retenir que les éléments défavorables à la personne dont la remise est demandée ; que, dès lors, il convient de déclarer recevables les pièces ainsi produites à l'exception de celles qui n'ont pas fait l'objet d'une traduction en langue française ; que la pièce essentielle de cette production est l'arrêt du 30 septembre 2002 de l'audience provinciale de Madrid aux termes duquel les magistrats d'appel ont rejeté les accusations de torture d'Iratxe Z...
A... et confirmé, de manière définitive, la décision de non lieu précédente ; que la chambre de l'instruction ne dispose pas du pouvoir, ni de la compétence nécessaire pour examiner les motifs de cet arrêt et en apprécier la pertinence et qu'elle n'a aucune légitimité pour s'ériger, en définitive, en instance de recours contre les décisions judiciaires émanant d'un Etat membre de l'union européenne qui offre à ses citoyens toutes les garanties d'une procédure pénale respectant les principes généraux du droit ; que les principes de reconnaissance juridique mutuelle et le degré de confiance entre les états membres de l'union européenne qui constituent les fondements légaux du mandat d'arrêt européen ne permettent pas à l'Etat requis - hors violation manifeste de traités

internationaux d'une valeur juridique supérieure; telle la convention de New York contre la torture - de procéder à un examen critique des décisions juridictionnelles de l'Etat requérant ; qu'il convient donc de considérer que les déclarations d'Iratxe Z...
A..., mettant en cause la personne dont la remise est demandée comme membre de l'E.T.A. participant au commando Ibarla ayant commis les trois attentats visés dans l'acte de poursuite doivent être considérées comme ayant été recueillies dans des conditions qui ne violent pas les dispositions de l'article 15 de la convention de New York sur la torture ;

"1- alors qu'il n'appartient qu'à l'Etat d'émission, et non pas au ministère public de l'Etat d'exécution, de produire des pièces à l'appui du mandat d'arrêt européen ;

"2- alors que, subsidiairement, dans les quarante huit heures de son arrestation, la personne dont la remise est demandée doit être informée du contenu du mandat d'arrêt européen dont elle fait l'objet ; que ces dispositions ont pour objet de permettre à cette personne d'assurer sa défense en ayant une connaissance complète des éléments retenus contre elle ; que, dès lors, s'il entend étayer la demande de l'Etat d'émission par la production d'éléments qu'il détient, le procureur doit également, dans ce délai, communiquer ces éléments à la personne dont la remise et demandée ; que la chambre de l'instruction ayant constaté que le ministère public détenait déjà les pièces litigieuses lors de l'arrestation du demandeur, le 13 mars 2007, ne pouvait donc juger la procédure régulière ;

"3- alors, a fortiori, qu'une telle production ne peut intervenir après un arrêt ayant demandé un complément d'information, que par le seul Etat d'émission, et dans un délai de dix jours pour sa réception ; que la chambre de l'instruction qui avait demandé à l'Etat espagnol un complément d'information par arrêt du 11 mai 2007, ne pouvait donc juger recevables les pièces communiquées par le ministère public français le 23 mai suivant :

"4- alors, en tout état de cause, que nul ne peut être soumis à la torture ; qu'aucune déclaration obtenue par la torture ne peut être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure ; que ces principes qui s'imposent en toute matière, obligent le juge à vérifier, lorsque leur violation est alléguée, que les éléments qui fondent un mandat d'arrêt européen n'ont pas été obtenus par la torture ; que, s'il n'appartient pas au juge de l'Etat d'exécution de vérifier la valeur d'une décision juridictionnelle rendue dans l'Etat d'émission, il doit néanmoins s'assurer qu'elle permet effectivement d'infirmer les allégations de torture ; que les constatations de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau permettent seulement d'établir que les poursuites judiciaires intentées contre certaines personnes ont abouti à un non-lieu, mais non pas que les déclarations litigieuses, seules bases du mandat d'arrêt décerné par l'Espagne, n'auraient pas été obtenus par la torture ; que, dès lors, la procédure ne pouvait être jugée régulière ;

que la chambre de l'instruction qui n'a pas recherché, comme elle en avait le devoir si le mandat ne se fondait pas sur des déclarations extorquées par la torture, se bornant à constater l'existence d'une décision de non-lieu, n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la chambre de l'instruction a ordonné la remise d'Ignacio X...
Y... aux autorités judiciaires espagnoles, après avoir relevé que si le supplément d'information par elle ordonné n'avait pas permis de recueillir les précisions souhaitées, en revanche, les pièces fournies par le ministère public, régulièrement communiquées à la défense et contradictoirement débattues, établissaient, d'une part, que les violences illégitimes prétendument subies par Iratxe Z...
A..., sur les seules déclarations de laquelle reposait la mise en cause d'Ignacio X...
Y..., avaient donné lieu à des décisions judiciaires rejetant les accusations portées ;

Attendu qu'en décidant ainsi, et dès lors que les prescriptions des articles 695-27 et suivants du code de procédure pénale ont été respectées à l'égard d'Ignacio X...
Y..., qui a eu, par ailleurs, connaissance en temps utile des pièces communiquées par le ministère public et a été mis en mesure d'y répondre, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens, dont le premier est devenu sans objet par suite du rejet du pourvoi du procureur général contre l'arrêt avant dire droit, ne peuvent être admis ;

Et attendu que les arrêts sont réguliers en la forme ;

I - Sur le pourvoi du procureur général contre l'arrêt du 26 juin 2007 :

DECLARE le demandeur DECHU de son pourvoi ;

II - Sur les autres pourvois :

Les REJETTE ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Pelletier conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-83502
Date de la décision : 25/07/2007
Sens de l'arrêt : Rejet déchéance
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Pau, 11 mai 2007


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 25 jui. 2007, pourvoi n°07-83502


Composition du Tribunal
Président : Président : M. JOLY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:07.83502
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