La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/04/2007 | FRANCE | N°07-80412

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 03 avril 2007, 07-80412


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois avril deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BEYER et les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Jean-Louis,

- LA SOCIETE D'INVESTISSEMENTS FRANCE IMMEUBLES,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'app

el d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 6 décembre 2006, qui, dans l'information suivie contre eux des c...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le trois avril deux mille sept, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller BEYER et les observations de la société civile professionnelle PIWNICA et MOLINIE, avocat en la Cour ;

Vu la communication faite au Procureur général ;

Statuant sur les pourvois formés par :

- X... Jean-Louis,

- LA SOCIETE D'INVESTISSEMENTS FRANCE IMMEUBLES,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 6 décembre 2006, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs de blanchiment aggravé, de faux et usage, a confirmé l'ordonnance rendue par le juge d'instruction sur une demande de non-lieu partiel ;

Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 12 février 2007, joignant les pourvois et prescrivant leur examen immédiat ;

Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;

Sur le premier moyen, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 199 et 593 du code de procédure pénale, défaut et contradiction de motifs, manque de base légale ;

"en ce que la chambre de l'instruction a, dans ses motifs, rejeté la demande de non-lieu et dans son dispositif confirmé l'ordonnance de non-lieu ;

"alors qu'en l'état d'une telle contradiction entre les motifs et le dispositif, l'arrêt attaqué ne satisfait pas aux exigences des textes susvisés" ;

Attendu que les demandeurs, mis en examen, ont, dans le délai prévu par l'article 175-1 du code de procédure pénale, demandé au juge d'instruction de déclarer qu'il n'y avait pas lieu à suivre contre eux du chef de blanchiment aggravé ; que, par ordonnance dont ils ont relevé appel, ce magistrat a rejeté cette requête et dit qu'il y avait lieu à continuer d'informer ;

Attendu que l'arrêt, après avoir énoncé dans les motifs que l'ordonnance entreprise devait être confirmée, prononce, dans son dispositif la confirmation de l'ordonnance de "non-lieu" ;

Attendu qu'en cet état, le moyen, qui se fonde sur une erreur matérielle contenue dans le dispositif de l'arrêt attaqué, susceptible d'être rectifiée suivant la procédure prévue aux articles 710 et 711 du code de procédure pénale, ne peut qu'être déclaré irrecevable ;

Sur le second moyen, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 121-3, alinéa 1, 324-1 et 324-2 du code pénal, préliminaire, 80, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance déférée de refus de non-lieu partiel du chef de blanchiment ;

"aux motifs qu'il convient de rappeler que par arrêt du 30 novembre 2005, la chambre de l'instruction de céans a rejeté une requête en nullité déposée le 21 juillet 2005 au greffe de la chambre de l'instruction par l'avocat de la société Sifi ; que, parmi les moyens alors soulevés, il était fait état de l'absence d'indices graves et concordants, qui n'aurait pas permis au juge d'instruction de procéder à la mise en examen de la demanderesse ; qu'il sera aussi observé qu'à l'appui de la requête en nullité avaient été produites les mêmes décisions suisses susvisées des 21 septembre 2005, 28 avril 2004, 30 août 2004 ; que, par arrêt susvisé du 30 novembre 2005, il avait été relevé, à l'égard de ces décisions, les éléments suivants :

"qu'il ne peut être tiré aucun argument, au regard de la réalité des faits dont est saisi le juge d'instruction, de l'arrêt du 21 septembre 2005 de la 1ère cour de droit public du tribunal fédéral suisse refusant une transmission au juge d'instruction français de pièces obtenues dans le cadre de l'entraide judiciaire ; qu'en effet, cette décision précise bien que son refus de transmission ne signifie pas que la demande d'entraide doit être rejetée, mais que le juge requérant doit plus précisément argumenter sa demande ; qu'il sera au surplus observé que cette décision suisse est relative à un recours intenté par la société Ovaco SA, qui n'est pas partie dans l'actuelle procédure pénale et dont l'actuel requérant n'est pas le représentant ; que, de la même manière, il ne peut être tiré argument en faveur du requérant actuel de l'arrêt du 28 avril 2004 de la cour des plaintes du tribunal fédéral suisse ordonnant la restitution de son passeport à M. Y... ; que cette décision, rendue par une juridiction étrangère dans le cadre d'une procédure qui ne vise pas l'actuel requérant est sans incidence sur la situation de celui-ci ;

qu'au surplus, il sera observé que cette juridiction relève principalement l'insuffisance de motivation de la décision du juge d'instruction, ce qui est différent d'une absence de charges ; que, toujours de la même manière, l'arrêt du 30 août 2004 du tribunal pénal fédéral suisse est sans intérêt pour l'instance actuelle, car ne se livrant qu'à une appréciation de la possibilité ou la probabilité d'une fuite à l'étranger de M. Y..., et de son droit au silence" ; que ces décisions suisses, rendues dans des cadres juridiques différents, ne répondaient qu'aux exigences de la justice de ce pays et au regard des éléments dont elle disposait alors ; que ces observations faites le 30 novembre 2005 étaient évidemment valables le 18 novembre 2005, date du dépôt de la demande de non-lieu ; qu'elles le sont encore plus après l'interrogatoire de Jean-Louis X... par le juge d'instruction le 8 décembre 2005, une semaine avant que ce magistrat rende l'ordonnance aujourd'hui querellée ; qu'en effet, cet acte d'instruction a révélé le rôle actif de Jean-Louis X... dans la mise en place des opérations d'acquisition et de "location" du Château de la Garoupe et du Clocher de la Garoupe et d'ayant droit économique de la société Marcampeon, qui a reçu d'importantes commissions occultes en lien avec les opérations d'acquisition et de gestion effectuées par la société Sifi ; que les explications sur ce dernier point de Jean-Louis X... ne sont guère satisfaisantes, celui-ci ne pouvant dissimuler son intérêt pécuniaire derrière une méconnaissance alléguée du droit, de la part d'un professionnel expérimenté, ni derrière l'urgence à disposer d'une société lui permettant d'opérer ses actes de gestion, parfois en argent liquide, pour ses riches clients pressés ;

qu'il apparaît ainsi que Jean-Louis X... a mis à la disposition des actionnaires de Sifi et indirectement d'Ovaco, la société Marcampeon pour le transit de sommes en provenance de Runicom Ltd et d'autres sociétés, alors qu'il ne pouvait ignorer, en qualité de gérant de Sifi, que ces sociétés étaient des entités économiques étrangères à Sifi, dont il n'aurait pu sans manoeuvres, telles que les fausses locations admises par lui, justifier les apports ; que, par ailleurs, le fait que M. Z... soit l'actionnaire unique des sociétés en cause, ou leur propriétaire unique au travers de diverses sociétés, ne saurait signifier qu'il peut s'opérer une curieuse confusion entre l'objet social de ces sociétés et l'intérêt privé de l'actionnaire et faire ignorer l'existence d'infractions telles que l'abus de confiance, le vol, l'abus de biens sociaux, ou le recel de ces délits, répréhensibles sur le territoire de la République, dès lors qu'un de leurs faits constitutifs a eu lieu sur celui-ci ; qu'à cet égard, il sera observé que les actes finaux de blanchiment ont été constitués par les contrats de cession passés devant des notaires français, l'origine et l'utilisation de certains fonds obtenus par crédits faisant toujours l'objet de vérifications ; que ce n'est qu'au terme de ces nécessaires investigations qu'une décision pourra être utilement rendue à propos de la demande de non-lieu ici présentée, et qui ne peut dès lors qu'être rejetée ;

"1 ) alors que, dans leurs mémoires régulièrement déposés devant la chambre de l'instruction, les demandeurs faisaient valoir que dans son rapport du 7 mars 2000 servant de base au réquisitoire introductif du 1er mars 2002 visant des faits qualifiés de blanchiment commis à titre habituel, le service Tracfin portait des soupçons sur la Sifi et son gérant Jean-Louis X... d'avoir utilisé des fonds pour acquérir notamment des propriétés dans le sud de la France, qui pourraient provenir d'un détournement frauduleux opéré au préjudice de la société russe Aeroflot, au travers de sociétés appartenant à M. A... ; que, cependant, le juge d'instruction avait dans son ordonnance déférée, justifié le rejet de la requête aux fins de non-lieu partiel par l'existence de prétendues indices graves ou concordants totalement différents de ceux qui avaient présidé à leur mise en examen ; qu'en effet le juge d'instruction reproche à présent à Jean-Louis X... et à la société Sifi d'avoir mis à la disposition des actionnaires de Sifi, une société dénommée Marcampeon afin de faire transiter une partie des fonds et de justifier les apports à Sifi ; que cette argumentation était péremptoire dans la mesure où, dans sa substance, elle reprochait au juge d'instruction d'avoir fondé sa décision de rejet de non-lieu partiel du chef de blanchiment sur des motifs impliquant une violation de sa saisine et par conséquent de l'article 80 du code de procédure pénale et qu'en omettant de s'expliquer sur ce chef péremptoire du mémoire des demandeurs et en fondant de surcroît sa décision sur la motivation susvisée reprise pour partie de l'ordonnance déférée, la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions susvisées ;

"2 ) alors que, le délit de blanchiment suppose l'existence, d'une infraction préalable ayant procuré à son auteur un profit direct ou indirect ; que, dans leurs mémoires régulièrement déposés devant la chambre de l'instruction, la Sifi et Jean-Louis X... faisaient valoir que les fonds litigieux provenaient de la société Runicom Ltd, que les fonds en cause appartenaient exclusivement à M. A... qui avait financé seul, tant l'acquisition de la propriété que son entretien ; qu'il ne peut y avoir abus de biens sociaux commis au préjudice de sociétés étrangères, ni davantage d'abus de confiance commis par M. A... à son préjudice et que le tribunal pénal fédéral suisse avait lui même énoncé que rien ne permet d'entrevoir, ne serait-ce que de manière minimale, en quoi les fonds suspects proviendraient, directement ou indirectement, d'Aeroflot, d'une part, ni en quoi ils seraient le produit d'un crime d'autre part ; qu'en se bornant à énoncer que l'origine et l'utilisation de certains fonds obtenus font toujours l'objet de vérifications et que les actes finaux de blanchiment ont été consentis par des contrats de cession passés devant des notaires français, la chambre de l'instruction, qui n'a pas répondu à cette argumentation péremptoire de nature à démontrer l'absence de tout délit de blanchiment, a méconnu les textes susvisés ;

"3 ) alors que, les demandeurs contestaient avoir pu, à la date des faits, nourrir quelque soupçon de l'origine - supposée frauduleuse - des sommes en cause, élément essentiel du délit de blanchiment et qu'en omettant de s'expliquer sur ce point déterminant, la chambre de l'instruction a derechef méconnu les textes susvisés ;

"4 ) alors qu'en énonçant que "les actes finaux de blanchiment" ont été constitués par des contrats de cession passés devant des notaires français, tandis que l'objet même de l'information est de s'interroger sur l'éventuelle existence d'un blanchiment, la chambre de l'instruction a méconnu la présomption d'innocence en violation des textes susvisés ;

"5 ) alors que la chambre de l'instruction ne pouvait, sans se contredire, affirmer que des actes de blanchiment étaient constitués par des contrats de cession passés devant des notaires français tandis qu'elle constatait, d'un autre côté, que l'origine de certains fonds étaient sujet à investigation, ce dont il résultait que le blanchiment n'était pas établi ;

"6 ) alors qu'en énonçant que les observations résultant de son arrêt du 30 novembre 2005, pour valider les mises en examen, étaient valables le 18 novembre 2005, date des demandes de non-lieu, tandis que la juridiction d'instruction du second degré doit apprécier la pertinence d'une demande de non-lieu à la date à laquelle elle statue et non à la date de demande, peu important à cet égard qu'aient été valides les mises en examen, la chambre de l'instruction, qui n'a pas répondu à l'argumentation péremptoire dont elle était saisie démontrant que les faits ayant justifié les mises en examen ne pouvaient plus être considérés comme revêtant une qualification de blanchiment, a derechef violé les textes susvisés" ;

Attendu que l'opportunité de décider qu'il y a lieu de continuer d'informer est une question de pur fait qui échappe au contrôle de la Cour de cassation ;

D'où il suit que le moyen est irrecevable ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Joly conseiller doyen, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, M. Beyer conseiller rapporteur, Mme Anzani conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 07-80412
Date de la décision : 03/04/2007
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 06 décembre 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 03 avr. 2007, pourvoi n°07-80412


Composition du Tribunal
Président : Président : M. JOLY conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2007:07.80412
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award