Attendu que, par un jugement du 12 octobre 1998, le tribunal de Dammam (Arabie Saoudite) a condamné la société Delsey à payer à M. X... une somme de 807 121 euros, à la suite de la cessation de leurs relations commerciales et en compensation des frais de promotion de la marque Delsey que celui-ci avait engagés ; que M. X... ayant demandé l'exequatur de ce jugement en France, l'arrêt attaqué a fait droit à sa demande et a ordonné, en application de l'article 1153-1 du code civil, le paiement des intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement saoudien ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Attendu que la société Delsey fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la condamnation prononcée par le tribunal de Dammam auquelle elle conférait l'exequatur porterait intérêts au taux légal à compter du prononcé de ce jugement étranger, alors, selon le moyen :
1°/ que dans le cadre de l'instance en exequatur, il n'appartient pas au juge français de modifier les termes d'une condamnation à une somme fixe prononcée par un juge étranger sans autre indication de sa part ; en affirmant que cette condamnation saoudienne devait produire intérêts au taux légal à compter de son prononcé, la cour d'appel, qui a ainsi ajouté au jugement étranger une condamnation qu'il ne prévoyait pas, sans même constater l'impossibilité pour son bénéficiaire de saisir à nouveau le juge saoudien d'une telle demande, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 3 du code civil ;
2°/ que la loi française, compétente selon la cour d'appel à titre de loi de la procédure d'exécution, ne pouvait régir que la procédure soumise au juge français et n'avait aucun titre à régir celle antérieure qui s'était déroulée sous l'égide du juge saoudien et sous l'empire de la loi saoudiene, en appliquant néanmoins l'article 1153-1 du code civil français pour justifier le paiement des intérêts moratoires dès le prononcé du jugement étranger, sans justifier autrement cette compétence exorbitante reconnue au droit français, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des principes de droit international privé et de l'article 3 du code civil ;
Mais attendu que s'agissant de l'exécution en France d'une condamnation prononcée par une juridiction étrangère reconnue exécutoire, les intérêts moratoires sont dus en application de la loi du for, soit l'article 1153-1 du code civil ; qu'en l'espèce, c'est à bon droit et sans ajouter à la condamnation prononcée par cette juridiction que la cour d'appel, après l'avoir revêtue de l'exequatur, a fait application de l'article précité pour condamner la société Delsey à des intérêts moratoires ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur la troisième branche :
Vu l'article 509 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que les intérêts moratoires dus en exécution d'une condamnation prononcée par une juridiction étrangère ne courent qu'à compter de la décision d'exequatur ;
Attendu que l'arrêt retient qu'il convient d'ordonner, par application de l'article 1153-1 du code civil, le paiement d'intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement saoudien du 12 octobre 1998 ;
Qu'en statuant ainsi la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que qu'il a dit que les intérêts au taux légal courraient à compter du 12 octobre 1998, l'arrêt rendu le 13 mai 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six mars deux mille sept.