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20/12/2006 | FRANCE | N°06-60119

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 20 décembre 2006, 06-60119


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Montélimar, 20 avril 2006), un accord intervenu entre la société Cogema et les organisations syndicales du 26 octobre 2000, objet d'un avenant du 20 novembre 2001 prévoit que le comité central d'entreprise est composé d'un nombre égal de délégués titulaires et suppléants dont le nombre est fixé en fonction de l'effectif de chaque établissement à la date du premier tour des élections ; que lors des élections des

membres du comité d'établissement de Pierrelatte, un protocole préélectoral s...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Montélimar, 20 avril 2006), un accord intervenu entre la société Cogema et les organisations syndicales du 26 octobre 2000, objet d'un avenant du 20 novembre 2001 prévoit que le comité central d'entreprise est composé d'un nombre égal de délégués titulaires et suppléants dont le nombre est fixé en fonction de l'effectif de chaque établissement à la date du premier tour des élections ; que lors des élections des membres du comité d'établissement de Pierrelatte, un protocole préélectoral signé le 14 septembre 2005 prévoit que les salariés des entreprises sous-traitantes et mis à disposition par des entreprises extérieures entrent dans le calcul de l'effectif ; que le comité d'établissement de Pierrelatte a désigné deux représentants titulaires et deux représentants suppléants au comité central d'entreprise le 5 décembre 2005, puis a procédé le 22 décembre 2005 à l'élection d'un troisième représentant titulaire et à celle d'un troisième représentant suppléant au comité central d'entreprise ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Cogema reproche au tribunal d'instance de l'avoir déboutée de sa demande d'annulation de la désignation du troisième délégué titulaire et du troisième délégué suppléant au comité central d'entreprise alors, selon le moyen :

1 / que les dispositions de l'article D. 435-2 du code du travail qui offre un choix entre deux plafonds pour la représentation de "chaque établissement" au comité central d'entreprise sont impératives et qu'en refusant de constater que la désignation par le comité d'établissement de Pierrelatte de trois titulaires et trois suppléants excédait ce seuil réglementaire, le tribunal d'instance a violé le texte susvisé et, par fausse application, l'article L. 132-4 du code du travail ;

2 / que subsidiairement, l'avenant du 20 novembre 2001 stipulait qu'en cas de désaccord, il conviendrait d'en revenir, pour la composition du comité central d'entreprise aux dispositions réglementaires et notamment à l'article D. 435-2 qui plafonne le nombre de représentant de chaque établissement, de sorte que viole les articles L. 132-2 et L. 132-18 du code du travail le juge qui, saisi d'une contestation sur le contenu même de l'avenant du 20 novembre 2001, décide de poursuivre l'exécution de cette convention dans le sens revendiqué par l'une des parties, au lieu de laisser jouer le plafond fixé par le texte susvisé ;

3 / que viole l'article D. 435-1 du code du travail qui ne prévoit une possibilité d'accord dérogatoire que pour le nombre total des membres du comité central, le jugement qui estime qu'en vertu de ce texte les parties pouvaient aussi déroger, par convention, au plafonnement distinct que l'article D. 435-2, également violé, impose de façon autonome pour chaque établissement quel que soit le nombre total, conventionnel ou non, des membres du comité central d'entreprise ;

4 / qu'encore plus subsidiairement, le chapitre 5 du livre IV du code du travail, qui détermine les règles applicables au comité central d'entreprise, ne prévoit aucune faculté de dérogation et que, dès lors, sont d'ordre public les dispositions de l'article L. 435-4 qui imposent que le nombre total des membres titulaires "ne puisse excéder un maximum également fixé par voie réglementaire", de sorte que le juge d'instance, qui admet la possibilité pour les parties de "déroger par voie d'accord aux maxima légaux", en vertu de l'article D. 435-l qui leur ménagerait une telle possibilité, sans examiner, comme il y était invité, la légalité de ce texte réglementaire au regard de l'habilitation limitée qui figure dans l'article L. 435-4, viole ce dernier texte ainsi que la loi des 17-24 août 1790 ;

5 / qu'en tout état de cause, le moyen de nullité des accords litigieux justifiant la formulation des exceptions d'illégalité n'a ni le même objet ni le même effet que la procédure de dénonciation des accords collectifs, de sorte qu'en déclarant la société Cogema mal fondée à incriminer le dépassement des plafonds réglementaires parce qu'elle n'avait pas dénoncé les accords, le tribunal d'instance a violé les articles 30 et 31 du nouveau code de procédure civile et par fausse application l'article L. 132-8 du code du travail ;

Mais attendu, d'abord, que le caractère d'ordre public des dispositions législatives ou réglementaires relatives à la mise en place du comité central d'entreprise, ne fait pas obstacle à ce que les avantages minimaux qu'elles instaurent soient accrus ou que des avantages non prévus soient institués par voie conventionnelle ; qu'il en résulte que le nombre des représentants des comités d'établissement au comité central d'entreprise fixé, sauf accord, par les articles D. 435-1 et D. 435-2 du code du travail, peut être augmenté et déterminé proportionnellement à l'importance numérique de l'effectif de chacun des établissements, conformément à la référence choisie par les parties ;

Attendu, ensuite, que l'article 2-21 de l'accord dans sa rédaction du 20 novembre 2001, ne prévoit un retour aux dispositions réglementaires qu'en cas de désaccord sur le nombre des établissements ;

Que le moyen pris en ses quatre premières branches n'est pas fondé ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la cinquième branche du moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ce moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que la société Cogema reproche encore au tribunal d'instance de l'avoir déboutée de sa demande d'annulation de la désignation du troisième délégué titulaire et du troisième délégué suppléant au comité central d'entreprise alors, selon le moyen :

1 / que les dispositions de l'article L. 620-10 du code du travail qui prévoient que les effectifs sont calculés en intégrant les salariés mis à disposition de l'entreprise, y compris les salariés titulaires de contrats de travail temporaires, ne concernent que la mise en oeuvre des dispositions du code du travail faisant usage de la notion d'effectifs et sont inapplicables aux dispositions conventionnelles librement négociées ; de sorte qu'en statuant comme il l'a fait, le tribunal d'instance a violé par fausse application le texte susvisé ;

2 / qu'en indiquant que le nombre des délégués au comité central d'entreprise "est fixé en fonction de l'effectif de chaque établissement distinct à la date du premier tour des élections", l'accord collectif du 20 novembre 2001 établissait un simple rapport de proportionnalité entre l'effectif représenté et le nombre de représentants et n'instituait aucunement une variation permanente du mode de calcul de ces effectifs, de sorte qu'en se fondant sur une prétendue variabilité conventionnelle de la notion des effectifs, le tribunal a violé l'article 2-21 de l'accord collectif du 26 octobre 2000 modifié par l'avenant du 20 novembre 2001 ;

3 / qu'en vertu des articles 1134 et 1156 du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et que le juge doit rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes au moment de la formation de l'acte ; de sorte que viole les textes susvisés mais également les articles L. 131-l du code du travail et 2-21 de l'accord collectif du 26 octobre 2000 modifié par l'avenant du 20 novembre 2001, le juge d'instance qui refuse de tenir compte de la notion des effectifs retenue par les parties lors de la signature de l'avenant et de son application confirmée au cours des années suivantes ;

Mais attendu qu'il résulte, tant des dispositions de l'article L. 431-2 du code du travail dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 86-948 du 11 août 1986 applicable lors de la signature de l'accord et de son avenant, que de celles de l'article L. 620-10 du code du travail désormais applicable, que les salariés mis à disposition par des entreprises extérieures entrent dans le calcul de l'effectif de l'entreprise d'accueil au prorata de leur temps de présence dans celle-ci au cours des douze mois précédents ;

Que le tribunal d'instance qui a retenu que l'accord du 21 novembre 2001 qui prévoit que les établissements distincts de l'entreprise sont représentés par un nombre de délégués proportionnel à l'importance de leurs effectifs arrêtés au premier tour de l'élection, ne contient aucune dérogation à cette règle et ne précise pas des conditions spéciales de détermination des effectifs des établissements pour la désignation de leurs délégués au comité central d'entreprise, a, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que la société Cogema fait grief au jugement de l'avoir déboutée de sa demande d'annulation de la désignation des troisièmes délégués titulaire et suppléants alors, selon le moyen, qu'à défaut d'accord unanime, l'élection des membres du comité central d'entreprise a lieu au scrutin majoritaire à un tour, que sont élus les candidats qui obtiennent le plus de suffrages exprimés lors de ce tour par ordre décroissant et que fausse nécessairement le résultat de l'élection le fait d'organiser un deuxième scrutin dont les résultats sont indépendants des résultats du premier ; de sorte qu'en statuant comme il l'a fait le tribunal d'instance a violé l'article L. 435-4 du code du travail ;

Mais attendu que, dès lors que la société Compagnie générale des matières nucléaires s'est bornée à saisir le tribunal d'une demande tendant à l'annulation de la seule désignation intervenue le 22 décembre 2005, et non d'une demande d'annulation de l'entière délégation du comité d'établissement de Pierrelatte au comité central d'entreprise, le moyen ne peut être accueilli ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société Compagnie générale des matières nucléaires à payer au Comité d'établissement Cogema Pierrelatte la somme de 2 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt décembre deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 06-60119
Date de la décision : 20/12/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité central d'entreprise - Délégué au comité central - Désignation - Nombre - Détermination - Accord d'entreprise - Portée.

ELECTIONS PROFESSIONNELLES - Comité d'entreprise et délégué du personnel - Comité d'établissement - Délégué au comité central - Nombre - Détermination - Accord d'entreprise - Possibilité

REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Comité central - Délégué du comité d'établissement - Désignation - Nombre - Détermination - Détermination conventionnelle - Condition

STATUT COLLECTIF DU TRAVAIL - Accords collectifs - Accords d'entreprise - Représentation des salariés - Fonctionnement des institutions représentatives - Amélioration - Amélioration par rapport à des dispositions d'ordre public - Condition

Le caractère d'ordre public des dispositions législatives ou réglementaires relatives à la mise en place du comité central d'entreprise ne fait pas obstacle à ce que les avantages minimaux qu'elles instaurent soient accrus ou que des avantages non prévus soient institués par voie conventionnelle. Il en résulte que le nombre des représentants des comités d'établissement au comité central d'entreprise fixé, sauf accord, par les articles D. 435-1 et D. 435-2 du code du travail, peut être augmenté et déterminé proportionnellement à l'importance numérique de l'effectif de chacun des établissements conformément à la référence choisie par les parties.


Références :

Code du travail D435-1, D435-2

Décision attaquée : Tribunal d'instance de Montélimar, 20 avril 2006


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 20 déc. 2006, pourvoi n°06-60119, Bull. civ. 2006 V N° 398 p. 384
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 V N° 398 p. 384

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Sargos.
Avocat général : Avocat général : M. Legoux.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Perony.
Avocat(s) : Avocats : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Masse-Dessen et Thouvenin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:06.60119
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