AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu qu'à la suite d'un accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail passé le 3 décembre 1999, la société Thirode grandes cuisines a sollicité de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) du Jura le 8 mars 2000, un allégement des cotisations sociales sur le fondement de l'article 19 de la loi du 19 janvier 2000, au motif que la durée collective du travail était désormais de 35 heures par semaine ;
que l'URSSAF, à la suite d'un contrôle, constatant que tous les salariés étaient tenus d'effectuer des heures supplémentaires, a supprimé cet allégement et a réclamé le montant des sommes que l'employeur avait été dispensé de payer ; que la société Thirode a contesté cette décision devant la juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que la société Thiride fait grief à l'arrêt attaqué (Besançon, 17 décembre 2004) d'avoir déclaré fondée la suppression de l'allégement et la demande de paiement en conséquence, alors, selon le moyen :
1 / que l'allégement des cotisations sociales prévu par la loi Aubry II suppose seulement que l'horaire collectif de travail soit de 35 heures de travail effectif ; que la loi Aubry II n'interdit pas que chaque salarié puisse demander à faire des heures supplémentaires de sorte que la durée effective de travail de chaque salarié puisse dépasser 35 heures si les heures supplémentaires restent à la seule discrétion des salariés ;
qu'en supprimant l'allégement du seul fait du dépassement de la durée des 35 heures quand elle a expressément constaté que le dépassement n'avait pas été imposé par l'employeur mais demandé par les salariés, la cour d'appel a violé l'article 19-XV de la loi du 19 janvier 2000 ;
2 / que la condition n'est réputée accomplie que lorsque c'est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l'accomplissement ; qu'à supposer que l'allégement des cotisations sociales ait été conditionné par le non dépassement d'une durée de travail effectif de 35 heures, l'employeur ne saurait se voir reprocher un dépassement exclusivement imputable à des tiers, en l'occurrence les salariés tous demandeurs d'heures supplémentaires ; qu'en affirmant que l'accomplissement d'heures supplémentaires par l'ensemble des salariés pouvait être imputé à l'employeur et justifier la défaillance de la condition posée à l'octroi des allégements à l'employeur, la cour d'appel, qui a pourtant constaté que les heures supplémentaires avaient été accomplies à la seule demande des salariés sur la base du volontariat, sans que l'employeur impose ces heures supplémentaires, a derechef violé l'article 19-XV de la loi du 19 janvier 2000 et l'article 1178 du code civil ;
3 / que la fraude de l'employeur n'aurait pu être caractérisée que par la constatation d'une collusion frauduleuse avec les salariés qui auraient été incités ou contraints de demander à faire des heures supplémentaires les conduisant à porter l'horaire collectif réel de travail à plus de 35 heures ; qu'en se bornant à relever que l'employeur "ne pouvait ignorer" que les salariés allaient tous faire des heures supplémentaires conduisant au dépassement de l'horaire collectif de 35 heures, sans constater que l'employeur avait incité ou contraint les salariés à demander des heures supplémentaires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 19-XV de la loi du 19 janvier 2000 et du principe selon lequel la fraude corrompt tout ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la demande s'appuyait sur un accord ne prévoyant le maintien du salaire antérieur que si les salariés acceptaient de faire deux heures supplémentaires, et qu'il était établi que les heures supplémentaires de transition étaient systématiquement effectuées par tous les salariés, la cour d'appel en a déduit à bon droit que le travail avait été organisé pour l'année 2000 sur la base d'une durée collective volontairement supérieure aux limites fixées par le XV de l'article 19 de la loi du 19 janvier 2000, justifiant ainsi la suppression de l'allégement pour fausse déclaration tendant à en obtenir le bénéfice, et le reversement de son montant ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Thirode grandes cuisines aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condmne à payer à l'URSSAF du Jura la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize décembre deux mille six.