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05/12/2006 | FRANCE | N°05-21641

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 05 décembre 2006, 05-21641


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés Axa France Vie et Axa France IARD font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 5 octobre 2005) rendu en matière de référé, de leur avoir fait interdiction sous astreinte de mettre en oeuvre toute mesure en rapport avec le déménagement de la rue de Vienne et l'implantation sur un site à la Défense tant que l'avis du comité central d'entreprise n'aura pas été régulièrement recueilli et de les avoir condamnées à payer à la FÃ

©dération des employés et cadres Force ouvrière une somme à titre de provision à valoir ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés Axa France Vie et Axa France IARD font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 5 octobre 2005) rendu en matière de référé, de leur avoir fait interdiction sous astreinte de mettre en oeuvre toute mesure en rapport avec le déménagement de la rue de Vienne et l'implantation sur un site à la Défense tant que l'avis du comité central d'entreprise n'aura pas été régulièrement recueilli et de les avoir condamnées à payer à la Fédération des employés et cadres Force ouvrière une somme à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession, alors, selon le moyen :

1 / que l'article L. 431-5 du code du travail dispose que la décision du chef d'entreprise doit être précédée de la consultation du comité d'entreprise et que pour lui permettre de formuler un avis motivé, le comité d'entreprise doit disposer d'informations précises et écrites ; qu'il résulte de ces dispositions parfaitement claires que le législateur a expressément prévu que le droit d'expression du comité d'entreprise s'effectuerait sous la forme d'un avis motivé et non d'un vote ; qu'en décidant que l'avis donné après consultation du comité d'entreprise ne pourrait s'exprimer que par un vote traduisant l'avis de la majorité, la cour d'appel a violé l'article L. 431-5 du code du travail ;

2 / que d'autres dispositions du code du travail concernant des attributions spécifiques du comité d'entreprise prévoient expressément que ce dernier se prononce sous la forme d'un vote ; qu'en privilégiant la pratique de "l'avis motivé" lorsque le comité d'entreprise est consulté avant que le chef d'entreprise ne prenne sa décision, le législateur a lui-même décidé quelles étaient les modalités les plus adaptées de la liberté d'expression du comité d'entreprise, et ce choix souverain s'impose nécessairement au juge ; qu'en considérant que le vote, expression démocratique, aurait été plus adapté que la formulation d'un avis motivé pour se prononcer sur la décision des sociétés Axa France Vie et Axa France Iard de transférer l'établissement de la rue de Vienne au site de la Défense, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article L. 431-5 du code du travail ;

3 / que la cour d'appel ajoute à la loi lorsqu'elle énonce que l'article L. 431-5 du code du travail prévoirait un avis motivé de la majorité des membres du comité d'entreprise ; que, de la sorte, les juges du fond ont violé par fausse application le texte susvisé ;

4 / qu'est nécessairement inopérante la référence aux dispositions de l'article L. 434-3 du code du travail, selon lequel les "résolutions sont prises à la majorité des membres présents", dans la mesure où ce texte ne vise que les hypothèses où le recours à un vote est effectivement prévu, et ne saurait avoir pour objet ou pour effet d'instituer un vote là où le législateur a expressément prévu la formulation d'un avis motivé ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles L. 431-5 et L. 434-3 du code du travail ;

5 / que l'article L. 431-5 du code du travail prévoit expressément que la procédure d'information et de consultation du comité d'entreprise donne lieu à la formulation un avis motivé ; qu'en l'espèce, il était acquis aux débats qu'à l'issue de plusieurs réunions d'information et d'un débat contradictoire, les représentants de chacune des organisations syndicales membres du comité central d'entreprise avaient formulé un avis motivé, lequel avait été consigné dans un procès-verbal qui était lui-même régulièrement produit aux débats ; que dans ces conditions, le seul fait qu'un vote n'ait pas eu lieu ne saurait caractériser l'existence d'un trouble manifestement illicite au sens de l'article R. 516-31 du code du travail, de sorte qu'en faisant interdiction aux sociétés Axa France Vie et Axa France IARD de mettre en oeuvre toute mesure en rapport avec le déménagement litigieux tant qu'il n'aurait pas été procédé à un vote du comité central d'entreprise, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et a violé l'article R. 516-31 du code du travail, ensemble l'article L. 431-5 du même code ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article L. 431-4 du code du travail, le comité d'entreprise assure l'expression collective des salariés lorsqu'il est consulté sur les décisions du chef d'entreprise qui doit recueillir l'avis dudit comité ; qu'il en résulte que cet avis ne peut être exprimé que par les membres du comité d'entreprise et non par les organisations syndicales auxquelles ils appartiennent ;

D'où il suit que la cour d'appel, qui a constaté qu'il était d'usage au sein du comité central d'entreprise que l'avis du comité soit recueilli sous forme d'une prise de position de chaque organisation syndicale, a, par ce seul motif, et abstraction faite des motifs critiqués par les première et troisième branches du moyen qui sont surabondants, légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné in solidum les sociétés Axa France et Axa France IARD à payer à la Fédération des employés et cadres Force Ouvriére une somme à titre de provision à valoir sur la réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession qu'elle représente, alors, selon le moyen, que l'existence d'une contestation sérieuse fait obstacle au pouvoir du juge des référés d'accorder une provision à une partie ; qu'en l'espèce, était sérieusement contestable le point de savoir si l'atteinte au fonctionnement régulier du comité central d'entreprise était ou non caractérisée, dans la mesure où chaque organisation syndicale avait formulé un avis motivé et qu'aucune norme légale ou jurisprudentielle n'imposait la tenue d'un vote ; qu'en condamnant ainsi les sociétés à verser une provision, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé l'article R. 516-31 du code du travail ;

Mais attendu que ne constitue pas une contestation sérieuse celle qui consiste à soutenir que l'avis motivé d'un comité d'entreprise peut être remplacé par l'avis des organisations syndicales auxquelles ses membres sont susceptibles d'appartenir ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Axa France Vie et Axa France IARD aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, condamne la société Axa France Vie à payer à la Fédération des employés et cadres Force Ouvrière la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 05-21641
Date de la décision : 05/12/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Fonctionnement - Réunion - Avis - Recueil - Modalités - Détermination.

REPRESENTATION DES SALARIES - Comité d'entreprise - Comité central - Fonctionnement - Réunion - Avis - Recueil - Modalités - Détermination

En vertu de l'article L. 431-4 du code du travail, le comité d'entreprise assure l'expression collective des salariés lorsqu'il est consulté sur la décision du chef d'entreprise qui doit recueillir l'avis dudit comité ; il en résulte que cet avis ne peut être exprimé que par les membres du comité d'entreprise et non par les organisations syndicales auxquelles ils appartiennent. La cour d'appel qui, statuant en référé, a constaté qu'il était d'usage au sein d'un comité central d'entreprise que l'avis du comité soit exprimé sous forme d'une prise de position de chaque organisation syndicale, a légalement justifié sa décision faisant interdiction à un employeur de mettre en oeuvre une mesure décidée par lui tant que l'avis du comité central d'entreprise n'aurait pas été régulièrement recueilli.


Références :

Code du travail L431-4

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 05 octobre 2005


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 05 déc. 2006, pourvoi n°05-21641, Bull. civ. 2006 V N° 371 p. 356
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 V N° 371 p. 356

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Chagny, conseiller doyen faisant fonction.
Avocat général : Avocat général : M. Duplat.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Perony.
Avocat(s) : Avocats : SCP Célice, Blancpain et Soltner, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.21641
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