AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-neuf novembre deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire CARON, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour ;
Vu la communication faite au procureur général ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Claude,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 19e chambre, en date du 14 décembre 2005, qui, pour agressions sexuelles aggravées, l'a condamné à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et mise à l'épreuve et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 513, alinéa 2, du code de procédure pénale, 591 et 593 du même code, 6 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Claude X... coupable d'agressions sexuelles sur mineur de 15 ans, après avoir rejeté la demande présentée par Jean-Claude X... tendant à l'audition de ses neveux, Astrid et Jean-Christophe Y..., présents au moment des faits qui lui sont reprochés ;
"aux motifs que " les deux jeunes gens ont été entendus, le 30 juillet 2002, sur commission rogatoire donnée, le 24 juin 2002, par le juge d'instruction au commissaire de police de Nancy ; Astrid a déclaré n'avoir pas vu de gestes déplacés et Jean-Christophe qu'il ne s'était rien passé et qu'il l'aurait vu ;
qu'Astrid a déclaré qu'elle savait que son oncle n'était pas capable de tels gestes et Jean-Christophe que les accusations étaient fausses ; qu'après en avoir délibéré, la cour considère qu'une nouvelle audition de ces deux membres de la famille du prévenu, qui ont déjà été entendus et ont fait savoir sans aucune ambiguïté qu'ils n'avaient rien vu, n'est pas de nature à éclairer la cour dans la recherche de la vérité " ;
"alors que tout prévenu a le droit de faire auditionner les témoins à charge et à décharge, le ministère public ne peut s'y opposer que si ces témoins ont déjà été entendus par le tribunal ;
que la confrontation est un droit dont l'exercice ne peut être refusé au prévenu que s'il est constaté qu'elle est impossible ; que, pour rejeter la demande présentée par Jean-Claude X... tendant à l'audition de deux témoins régulièrement cités par lui, l'arrêt énonce qu'ils ont déjà été entendus sur commission rogatoire du juge d'instruction et que leur audition n'est pas de nature à éclairer la cour ; qu'en se prononçant ainsi, alors que les témoins à décharge n'avaient pas été entendus devant le tribunal et qu'aucune impossibilité de les entendre n'est caractérisée, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée de l'article 513, alinéa 2, du code de procédure pénale, et violé en outre l'article 6 3 de la Convention européenne des droits de l'homme" ;
Vu l'article 513, alinéa 2, du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, devant la cour d'appel, les témoins cités par le prévenu sont entendus dans les règles prévues aux articles 435 à 457 dudit code, le ministère public pouvant s'y opposer si ces témoins ont déjà été entendus par le tribunal ; Attendu qu'il résulte des pièces de procédure que, pour dire n'y avoir lieu à l'audition de deux témoins cités par la défense, l'arrêt attaqué relève que ces derniers ont déjà été entendus sur commission rogatoire et qu'une nouvelle audition n'était pas de nature à éclairer la cour dans la recherche de la vérité ; Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors que le ministère public ne s'était pas opposé à l'audition demandée et qu'aucun témoin n'avait été entendu en première instance, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen de cassation proposé : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 14 décembre 2005, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Cotte président, Mme Caron conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;