AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quatorze novembre deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller PALISSE, les observations de la société civile professionnelle TIFFREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHARPENEL ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- LA SOCIETE FRANCE TELECOM,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de METZ, en date du 14 février 2006, qui a prononcé sur une demande de taxe ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 100-3, R. 91 à R. 93, R. 222 à R. 235, 485 du code de procédure pénale, des principes dont s'inspirent les articles 1134 du code civil, 1er du 1er Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme et L. 33-1, L. 35-6 et D. 98-7-IV du code des postes et télécommunications, dénaturation et défaut de motifs ;
"en ce que la chambre de l'instruction taxe à la somme de 260,14 euros toutes taxes comprises la rémunération de la prestation effectuée par la SA France Télécom en exécution d'une réquisition de police judiciaire ;
"sans motifs adoptés et aux motifs propres qu' "il convient de constater que la grille de prix établie en 1999 est plus avantageuse que la convention de 1995 ; qu'il y a lieu, dès lors, de la prendre pour base des tarifs applicables pour le prix des écoutes téléphoniques sur réseau fixe, en y appliquant cependant : - une réduction de 10 % dans la mesure où France Télécom n'a pas révisé ses tarifs depuis cette date alors pourtant que le nombre des réquisitions adressées par les autorités judiciaires à France Télécom a, ces dernières années, bien augmenté, - une limitation prorata temporis sur la durée de l'abonnement, le juge ne pouvant taxer que les prestations effectivement fournies soit en l'espèce soixante-quatorze jours et non trois mois comme demandé ; qu'il y a lieu d'infirmer l'ordonnance ( ) et, statuant à nouveau, de taxer le mémoire présenté ( ) à la somme de (172,34 euros - 10 % = 155,11 euros) + (75,90 euros : 90 x 74 = 62,40 euros) 217,51 euros hors taxes, soit la somme totale de 260,14 euros toutes taxes comprises" (arrêt attaqué, pages 3 et 4) ;
"1 ) alors que, en affectant des réduction et limitation à la rémunération facturée par la société requise sur la base de la grille tarifaire de 1999, dont elle relevait cependant qu'elle était applicable, la cour d'appel s'est contredite et a violé les textes précités ;
"2 ) alors que, au surplus, en omettant de rechercher si, comme le soutenait la société requise, dans son mémoire (page 7, in fine), la tarification par mois indivisible n'était pas opposable à l'Etat pour avoir été stipulée par la convention conclue le 16 novembre 1995 avec le ministère de la justice (page 3, article 2.1.1), la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
"3 ) alors que, au reste, la cour d'appel a violé les textes susvisés en omettant de répondre au mémoire de la société requise faisant valoir (page 13) que, "ne pas retenir ces tarifs qui sont calculés pour couvrir sans marge commerciale les coûts exposés par France Télécom équivaudrait à créer au détriment de cette dernière une charge qui n'est prévue par aucun texte et serait en conséquence contraire aux principes fixés par le Conseil constitutionnel dans sa décision numéro 2000-41 du jeudi 28 décembre 2000 sur l'article 48 de la loi de finances rectificative pour 2000 aux termes de laquelle "s'il est loisible au législateur, dans le respect des libertés constitutionnelles garanties, d'imposer aux opérateurs de réseaux de télécommunications de mettre en place et de faire fonctionner les dispositifs techniques permettant les interceptions justifiées par les nécessités de la sécurité publique, le concours ainsi apporté à la sauvegarde de l'ordre public, dans l'intérêt général de la population, est étranger à l'exploitation des réseaux de télécommunications ; les dépenses en résultant ne sauraient, dès lors, en raison de leur nature, incomber directement aux opérateurs"" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure, qu'au cours d'une information, le juge d'instruction a requis la société France Télécom d'effectuer une mise sur écoute téléphonique ;
que l'opération, commencée le 18 juillet 2005, a pris fin le 29 septembre 2005 et qu'un mémoire de frais d'un montant de 296,54 euros toutes taxes comprises, comportant des frais d'accès au réseau et un abonnement pour trois mois, a été présenté par la société France Télécom ; que le juge d'instruction a taxé ce mémoire à la somme de 75,90 euros ; que la société France Télécom a interjeté appel en soutenant que s'appliquait à l'espèce la convention signée entre elle et le ministère de la justice, le 16 novembre 1995, ainsi que le principe de juste rémunération ;
Attendu que, pour infirmer l'ordonnance entreprise et fixer le montant de la rémunération due à la société France Télécom à la somme de 260,14 euros, l'arrêt retient que le tarif dont la société demande l'application date de 1999 et doit être réduit de 10 %, et que l'abonnement sollicité ne peut être taxé qu'à sa durée réelle, soit soixante-quatorze jours et non trois mois ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, la chambre de l'instruction a, sans contradiction, justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen, qui invoque une convention inopposable au juge statuant en matière de frais de justice criminelle, correctionnelle et de police, et qui, pour le surplus, revient à remettre en cause l'appréciation souveraine par le juge du fond de la juste rémunération due à la partie prenante, ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Palisse conseiller rapporteur, M. Joly, Mme Anzani, M. Beyer, Mme Guirimand, M. Beauvais conseillers de la chambre, M. Valat, Mme Ménotti conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Charpenel ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;