AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que l'association de consommateurs "UFC 38 - Que choisir" a, sur le fondement de l'article L. 421-6 du code de la consommation, introduit contre la société Peugeot une action en suppression de clauses contenues dans les bons de commande de véhicules neufs, habituellement proposés par ce constructeur automobile et par les concessionnaires de son réseau de distribution, et en réparation de son préjudice personnel, dit associatif, et du préjudice porté à l'intérêt collectif des consommateurs ;
Sur les quatrième, sixième, neuvième, dixième et onzième moyens, réunis, du pourvoi principal de l'UFC 38 - Que choisir :
Attendu que l'association UFC 38 - Que choisir reproche à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande de suppression des clauses stipulées aux articles 3, paragraphes 2 et 7 des conditions générales et aux paragraphes 17, 18, 22 et 30 (version 1999) et 6 (version 2001) de la garantie contractuelle, alors que :
1 / selon le quatrième moyen, le vendeur peut faire inscrire son gage sans avoir à accomplir lui-même la démarche administrative de demande de certificat d'immatriculation, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation, ensemble l'article 2074 du code civil et les articles 1er, alinéa 1er, 2 et 5 du décret n° 53-968 du 30 septembre 1953 modifié, relatif à la vente de véhicules automobiles ;
2 / selon le sixième moyen, est nécessairement abusive la clause qui ne prévoit pas l'hypothèse où l'acheteur aurait un motif légitime de ne pas pouvoir prendre livraison du véhicule dans le délai convenu et qui, passé ce délai, permet au surplus au vendeur de disposer librement du véhicule et d'imposer à l'acquéreur un nouveau délai de livraison totalement indéterminé, de sorte qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
3 / selon le neuvième moyen, est abusive la clause qui limite ou exclut la ou les garanties conventionnelles qu'un constructeur automobile accorde à son client lorsque celui-ci confie l'entretien courant ou les réparations de son véhicule à un professionnel indépendant de son réseau de concessionnaires exclusifs ou d'agents officiels, ou se fournit en pièces détachées en dehors du réseau commercial du constructeur, de sorte qu'en déniant tout caractère abusif à la clause litigieuse, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
4 / selon le dixième moyen, constitue des clauses abusives celle qui permet au professionnel d'exclure de façon non appropriée les droits légaux du consommateur en cas d'inexécution partielle ou totale ou d'exécution défectueuse par le professionnel d'une quelconque de ses obligations contractuelles et celle qui l'autorise à supprimer ou entraver l'exercice d'actions en justice ou de voies de recours par le consommateur, notamment en limitant indûment les moyens de preuve à la disposition de celui-ci ; en considérant que l'UFC 38 - Que choisir n'établissait ni que la remise de la pièce défectueuse présentât un intérêt pour le consommateur, ni que l'absence de remise de cette pièce priverait celui-ci d'un moyen de preuve en cas de litige, quand il ressortait au contraire clairement de la clause litigieuse que celle-ci ne prévoyait pas la remise à l'acheteur d'un quelconque document attestant de la défectuosité de la pièce, tout en se référant, de manière radicalement inopérante, tant à la circonstance que le transfert de propriété de la pièce défectueuse était la contrepartie de la garantie fournie par le constructeur qu'à la responsabilité encourue par le constructeur sur le fondement des dispositions de l'article 1386-1 du code civil, la cour d'appel aurait violé les paragraphes b et q de l'annexe à l'article L. 132-1 du code de la consommation et l'article R. 132-1 du même code ;
5 / selon le onzième moyen, constitue des clauses abusives celle qui exclut la garantie contractuelle du constructeur automobile en cas d'utilisation normale du véhicule par le conducteur et celle qui, trop imprécise ou trop ambiguë, a pour objet ou pour effet de priver le consommateur de ses droits ; en déniant tout caractère abusif à une clause qui privait l'acquéreur du bénéfice de la garantie contractuelle offerte par le constructeur pour des cas d'agressions extérieures ordinaires, que l'emploi des termes " notamment " et " par exemple " rendait imprécise et qui, enfin, laissait entendre que le constructeur fabriquait et vendait des véhicules impropres à un usage normal, la cour d'appel aurait violé les articles L. 132-1 et R. 132-1 du code de la consommation ;
Mais attendu que, s'agissant de la clause selon laquelle "le client doit confier au vendeur le soin de transmettre à la préfecture sa demande de carte grise en cas de vente à crédit", l'UFC 38 - Que choisir qui, devant la cour d'appel, avait seulement conclu qu'il suffisait de donner acte de la suppression définitive de cette stipulation dans la nouvelle version des conditions générales, n'est pas recevable à présenter un moyen contraire à ses propres écritures ; que l'arrêt retient, à bon droit, que la clause prévoyant que "tout client prévenu de la mise à disposition du véhicule commandé doit en prendre livraison dans les quinze jours ; passé ce délai, il lui sera compté des frais de garage, à moins qu'il ne soit disposé du véhicule en faveur d'un autre client, auquel cas la livraison serait reportée à une date ultérieure", critiquée en ce qu'elle donnait la faculté au vendeur de disposer du véhicule et de reporter la livraison à une date ultérieure, ne présentait aucun déséquilibre significatif au profit du professionnel et au détriment du consommateur, cette clause évitant au client, qui n'a pas retiré son véhicule, d'avoir à payer des frais de garage, sans perdre le bénéfice de sa commande ; que la cour d'appel, qui a retenu qu'il n'était pas illégitime que le professionnel ne soit pas tenu contractuellement de garantir le véhicule contre la corrosion s'il n'a pas été en mesure d'exercer son contrôle sur les pièces remplacées et sur le traitement des matériaux à la suite de dommages dus à des causes extérieures, a ainsi, à bon droit, considéré que la clause selon laquelle "la garantie anti-corrosion ne couvre pas ... les dommages consécutifs à la remise en état de la carrosserie (suite à accident ou non) en dehors des points service du réseau commercial Peugeot", ne présentait aucun caractère abusif, cette clause, qui n'excluait la garantie contractuelle du constructeur que pour les dégâts résultant de travaux dont celui-ci n'avait pas à répondre, sans supprimer le libre choix d'un réparateur indépendant du réseau de distribution, ne créant aucun déséquilibre significatif au détriment du consommateur ; qu'ayant relevé que l'association n'avait pas rapporté la preuve de l'intérêt du consommateur à conserver la pièce défectueuse, que le transfert de propriété de la pièce était une contrepartie raisonnable de la garantie fournie et qu'il n'était pas démontré que l'absence de remise de la pièce défectueuse au consommateur priverait celui-ci d'un moyen de preuve en cas de litige, l'arrêt retient exactement que la clause selon laquelle "les pièces ou organes changés au titre de la garantie contractuelle deviennent la propriété d'Automobiles Peugeot", qui n'apporte par elle-même aucune entrave à l'exercice d'une action judiciaire, n'était pas abusive ;
que l'arrêt qui énonce que la clause, selon laquelle "la garantie contractuelle ne couvre pas... les dommages imputables à une cause extérieure ayant endommagé le véhicule, notamment les impacts de gravillons et les retombées atmosphériques, chimiques, animales ou végétales sur la peinture.... les dégâts consécutifs à des phénomènes naturels, chutes de grêle, inondations par exemple (version 1999)... et ne couvre pas les dégâts consécutifs à des phénomènes naturels, chutes de grêle, inondations par exemple et les dégâts consécutifs à des accidents" (version 2001), exclut légitimement la garantie du constructeur lorsque les dommages ont pour origine une cause extérieure à la chose garantie et ne remet pas en question le principe de la garantie d'un vice inhérent à la chose, est légalement justifié, une telle clause visant des causes de dommages étrangères, sauf preuve contraire, à l'obligation du constructeur de délivrer un véhicule exempt de vice et conforme à l'usage auquel il est destiné ; qu'aucun des griefs ne peut être accueilli ;
Et sur les premier, deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens, réunis, du pourvoi incident de la société Automobiles Peugeot :
Attendu que la société Automobiles Peugeot fait grief à l'arrêt d'avoir ordonné la suppression certaines clauses de ses bons de commande et de l'avoir condamnée à indemniser le préjudice collectif et le préjudice associatif de l'association UFC 38 - Que choisir, alors que :
1 / selon le premier moyen, premièrement, ayant relevé que la typographie des conditions générales du bon de commande était claire et lisible et que la taille de ses caractères était conforme, la cour d'appel ne pouvait considérer que la clause par laquelle " le client déclare avoir pris connaissance des conditions particulières applicables aux commandes soumises au code de la consommation articles L. 121-23 à L. 121-26 (démarchage et vente à domicile) figurant au dos du présent document et les avoir reçues ainsi que le bordereau d'annulation de commande figurant sur l'exemplaire client ", rédigée dans la même police et la même taille de caractères que les conditions générales de vente, et précédant immédiatement l'emplacement réservé à la signature du client, n'attirait pas quant à elle suffisamment l'attention du consommateur, de sorte qu'en statuant pourtant ainsi, elle n'aurait pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L. 133-2 du code de la consommation ; et deuxièmement, la clause par laquelle le consommateur déclare avoir pris connaissance des conditions contractuelles figurant au dos du document et les avoir acceptées ne crée aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dès lors qu'il est établi que le consommateur a bien été mis en possession desdites conditions et que celles-ci sont lisibles ; en l'espèce, en page 2 du bon de commande, précédant immédiatement l'emplacement réservé à la signature du client, figurait la clause en vertu de laquelle " le client déclare avoir pris connaissance des conditions particulières applicables aux commandes soumises au code de la consommation articles L. 121-23 à L. 121-26 (démarchage et vente à domicile) figurant au dos du présent document et les avoir reçues ainsi que le bordereau d'annulation de commande figurant sur l'exemplaire client " ; en décidant que cette clause suivie immédiatement de la signature du client et renvoyant aux conditions figurant au verso du document, était abusive au motif inopérant qu'elle pouvait laisser croire au client que son acceptation des conditions contractuelles était totale sans réserve, y compris de clauses pouvant être abusives, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ; et troisièmement la clause par laquelle le consommateur déclare avoir pris connaissance des conditions contractuelles figurant au dos du document et les avoir acceptées ne crée aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dès lors qu'il est établi que le consommateur a bien été mis en possession desdites conditions et que celles-ci sont lisibles ; en l'espèce, en page 2 du bon de commande, précédant immédiatement l'emplacement réservé à la signature du client, figurait la clause en vertu de laquelle " le client déclare avoir pris connaissance des conditions particulières applicables aux commandes soumises au code de la consommation articles L. 121-23 à L. 121-26 (démarchage et vente à domicile) figurant au dos du présent document et les avoir reçues ainsi que le bordereau d'annulation de commande figurant sur l'exemplaire client " ;
en décidant que cette clause suivie immédiatement de la signature du client et renvoyant aux conditions figurant au verso du document, était abusive au motif inopérant qu'elle pouvait laisser croire au client que son acceptation des conditions contractuelles était totale sans réserve, y compris de clauses pouvant être abusives, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
2 / selon le deuxième moyen, le professionnel peut se réserver contractuellement le droit d'apporter des modifications aux caractéristiques du bien à livrer lorsque ces modifications sont liées à l'évolution technique, à condition qu'il n'en résulte ni augmentation des prix ni altération de qualité ; en l'espèce, la clause litigieuse réservait au constructeur la faculté d'apporter des modifications mineures en fonction de l'évolution technique sans prévoir que ces modifications s'accompagneraient d'une modification du prix ; en décidant que cette clause était abusive pour ne pas prévoir expressément que les modifications du véhicule interviendraient sans modification du prix, lorsqu'en l'absence de modification de prix expressément stipulée, aucune modification ne pouvait intervenir, de sorte que cette clause ne créait aucun déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, la cour d'appel aurait violé l'article R. 132-2 du code de la consommation ;
3 / selon le troisième moyen, il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que l'article 8 des conditions générales renvoyait à la " garantie contractuelle Peugeot " et que cette garantie contractuelle prévoyait expressément en son premier paragraphe qu'elle s'ajoutait aux garanties légales dues par le constructeur ; en estimant néanmoins que l'article 3 des conditions générales de vente en vertu duquel il était seulement mentionné que " les concessionnaires ne sont pas les mandataires du constructeur et sont seuls responsables vis-à-vis de leurs clients de tous engagements pris par eux ", et non pas que les concessionnaires sont seuls responsables légalement envers leurs clients, à l'exclusion du constructeur, laissait croire au consommateur qu'il était dépourvu de recours envers le constructeur, la cour d'appel n'aurait pas tiré les conséquences qui s'évinçaient de ses propres constatations en violation de l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
4 / selon le quatrième moyen, le professionnel, qui n'est nullement tenu de faire bénéficier le client d'une garantie contractuelle s'ajoutant aux garanties légales, couvrant l'ensemble des défectuosités affectant le véhicule livré pendant un an, est légitimement en droit de limiter cette garantie aux seuls défauts dont il a la maîtrise, en subordonnant le bénéfice de la garantie à la condition que le véhicule subisse toute réparation et révision chez un concessionnaire du réseau pendant la durée de la garantie ; qu'en estimant qu'en conditionnant ainsi le bénéfice de la garantie, le professionnel se procurait un avantage significatif, lorsqu'il s'agit seulement pour lui de limiter le champ de sa garantie facultative aux seuls défauts dont il a la maîtrise, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
5 / selon le cinquième moyen, le professionnel, qui n'est nullement tenu de faire bénéficier le client d'une garantie contractuelle s'ajoutant aux garanties légales, couvrant l'ensemble des défectuosités affectant le véhicule livré pendant un an, est légitimement en droit de limiter cette garantie aux seuls défauts dont il a la maîtrise, en subordonnant le bénéfice de la garantie à la condition que toutes pièces et tous accessoires montés sur le véhicule soient agréés par le constructeur pendant la durée de la garantie ; en estimant qu'en conditionnant ainsi le bénéfice de la garantie, le professionnel se procurait un avantage significatif, lorsqu'il s'agit seulement de limiter le champ de sa garantie du véhicule aux seuls défauts dont il a la maîtrise, la cour d'appel aurait violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
Mais attendu que, ayant souverainement estimé que, par comparaison avec les rubriques précédentes et non par rapport aux conditions générales et particulières figurant au verso, la clause litigieuse était rédigée en petits caractères dont la taille était inférieure à celle des autres clauses voisines et, dès lors, n'avait pu attirer l'attention du client, la cour d'appel, qui a ainsi mis en évidence que cette clause ne répondait pas aux exigences de l'article L. 133-2, alinéa 1, du code de la consommation, en a, à bon droit, ordonné la suppression, comme étant abusive, de sorte que, mal fondé en sa première branche, le premier moyen est inopérant en ses deux suivantes ; qu'ayant constaté que la clause, selon laquelle le constructeur "se réservait d'apporter toutes modifications mineures qu'il jugerait opportunes en fonction notamment de l'évolution technique, sans obligation d'appliquer ces modifications aux véhicules livrés ou en commande", ne précisait pas que ces modifications liées à l'évolution technique ne pouvaient entraîner aucune augmentation de prix ni altération de qualité, ainsi que le prescrit l'article R. 132-2 du code de la consommation, ce dont il résultait que, comme l'avait aussi relevé la commission des clauses abusives dans sa recommandation n° 85-02, la seule mention du droit exceptionnel accordé au professionnel sans l'indication de toutes les limites et conditions posées par le texte réglementaire laissait croire au consommateur qu'il devait subir les éventuelles incidences préjudiciables de ces modifications, créant ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, que ne jugule pas la stipulation de la faculté pour le consommateur, profane inapte à anticiper de telles modifications techniques, d'annuler sa commande si le vendeur ne pouvait livrer un véhicule présentant les caractéristiques particulières spécifiées à la commande, la cour d'appel en a exactement ordonné la suppression ; que l'arrêt qui, par motifs propres et adoptés, retient que la clause, selon laquelle "les concessionnaires ou leurs agents ne sont pas les mandataires des constructeurs ; ils sont seuls responsables vis-à-vis de leurs clients de tous engagements pris par eux", laissait croire au consommateur qu'il était dépourvu de tout recours envers le fabricant, même si l'article 8 du contrat renvoyait aux stipulations de la garantie contractuelle, et qui en ordonne la suppression, est légalement justifié, la formulation générale de cette stipulation, qui laisse entendre que le constructeur ne pourrait encourir aucune responsabilité, lui conférant un caractère abusif ;
qu'ayant retenu que les clauses, qui prévoyaient que "la garantie s'applique à la condition expresse que : - le véhicule soit et ait toujours été réparé dans les points service du réseau commercial Peugeot ; - les révisions périodiques mentionnées dans le carnet "conditions de garanties et révisions périodiques" aient été réalisées en temps voulu par les points service dudit réseau" et que "la garantie cesse lorsque des pièces ou des accessoires non agréés par le constructeur ont été montés sur le véhicule", excluaient la garantie du constructeur lorsque le client, même pour une simple révision périodique, avait sollicité les services d'un professionnel non membre du réseau et imposaient au consommateur de s'adresser exclusivement à un représentant de la marque pour des prestations banales, ne requérant pas une technicité particulière et ne mettant pas en cause la sécurité, la cour d'appel les a, à bon droit, regardées comme abusives, de telles clauses ayant pour objet et pour effet, en raison de la généralité de leur formulation, d'exonérer le constructeur de sa garantie contractuelle alors même que la défaillance ou le défaut du véhicule pour lequel le consommateur revendiquerait cette garantie serait sans lien avec les travaux effectués ou les pièces et accessoires installés par un réparateur indépendant du réseau de distribution, et créant ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur ; qu'aucun des moyens ne peut être accueilli ;
Et sur les premier, deuxième, en la première branche, et huitième moyens du pourvoi principal de l'UFC 38 - Que choisir, tels que reproduits en annexe :
Attendu que ces moyens ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais, sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche, du pourvoi principal de l'association UFC 38 - Que choisir :
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation et le point l de l'annexe audit code ;
Attendu que, pour dénier le caractère abusif de la clause selon laquelle "les prix pratiqués sont ceux du tarif en vigueur au jour de la commande si la livraison est effectuée ou stipulée dans les trois mois à compter de la commande, sauf variation de prix résultant d'une modification de régime fiscal ou d'une modification technique imposée par les pouvoirs publics. Il est toutefois précisé que cette garantie de prix ne s'applique qu'au modèle et à l'année-modèle mentionnés sur le bon de commande" (version 1999) ou "le prix du véhicule faisant l'objet de la commande est celui du tarif en vigueur au jour de celle-ci. Ce prix est garanti jusqu'à l'expiration du délai contractuel de livraison, et, en cas de dépassement non imputable à l'acheteur, jusqu'à sa mise à disposition sauf : si l'acheteur a expressément stipulé refuser la livraison avant trois mois ; si la variation de prix résulte de modifications techniques ou fiscales imposées par les pouvoirs publics ; si le retard de livraison résulte d'un cas de force majeure... Cette garantie de prix ne s'applique qu'au modèle mentionné sur le bon de commande" (version 2001), l'arrêt retient, d'une part, que, comme le prévoit l'article 3 de l'arrêté du 30 juin 1978, la clause précise que le vendeur ne peut s'exonérer de cette garantie de prix que si une modification du prix est rendue nécessaire par des modifications techniques résultant de l'application des réglementations imposées par les pouvoirs publics et, d'autre part, que l'article 9 permet au client de résilier sa commande si le vendeur ne peut pas mettre à sa disposition, dans le délai convenu, le véhicule du modèle spécifié lors de la commande et si le véhicule ne correspond pas aux caractéristiques que le client a jugées essentielles et auxquelles il a subordonné son engagement ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi quand, d'une part, l'article 9 des conditions générales excluait la possibilité pour le client de résilier le contrat lorsque le tarif en vigueur au jour de la mise à disposition, même si elle intervenait au-delà du délai de trois mois, était supérieur au tarif en vigueur à la commande dans l'hypothèse où la variation de prix résultait d'une modification de régime fiscal ou d'une modification technique imposée par les pouvoirs publics, et quand, d'autre part, sans qu'il y ait lieu de distinguer entre les causes d'augmentation du prix, la clause litigieuse avait pour objet et pour effet d'accorder au constructeur le droit de s'exonérer de la garantie de prix sans que le consommateur ait le droit correspondant de rompre le contrat, sauf à perdre le montant de l'acompte versé, au cas où le prix final serait trop élevé par rapport au prix convenu lors de la commande, créant ainsi un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment du consommateur, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
Et sur le troisième moyen du même pourvoi :
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
Attendu que, pour rejeter la demande de suppression de la clause selon laquelle "le bénéfice de la commande est personnel au client :
il ne peut être cédé", l'arrêt retient que celle-ci n'est que l'application des principes fondamentaux du droit civil, le concessionnaire étant en droit d'exiger l'exécution du contrat par celui qui l'a souscrit, et que les conditions d'acquisition d'un véhicule et, en particulier, le prix, sont déterminées en fonction, notamment, de la situation personnelle de l'acquéreur ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que cette clause, qui a pour objet et pour effet d'empêcher toute substitution de contractant ou cession du contrat et donc de maintenir le client dans les liens contractuels, quand bien même sa situation personnelle a pu brutalement changer et rendre inopportune l'acquisition du véhicule et lors même que la substitution ou la cession pourrait intervenir aux conditions initialement convenues, sous réserve du refus légitime du constructeur d'y consentir, notamment en raison d'une considération propre à ce client, étant relevé que, par ailleurs, le vendeur se réserve lui-même la possibilité de substituer un autre client lorsque l'acquéreur initial n'a pas pris livraison du véhicule dans les quinze jours de la notification de la mise à disposition, entraîne un déséquilibre significatif entre les parties au détriment du consommateur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur les cinquième et septième moyens, réunis, ce dernier n'étant pas nouveau :
Vu l'article L. 132-1 du code de la consommation et le point d) de l'annexe audit code ;
Attendu que, pour dénier le caractère abusif de la clause selon laquelle "l'acompte versé à la commande restera acquis au vendeur à titre d'indemnité, en cas d'annulation de l'ordre (vente au comptant) ou lorsque le client se dédit après expiration du délai de rétractation (vente à crédit), à moins qu'il ne se trouve dans un des trois cas prévus à l'article 9" et celle selon laquelle "le vendeur, de son côté, pourra annuler la commande et conserver l'acompte à titre d'indemnité, à partir du jour du versement de l'acompte, si dans le délai de quinze jours prévu à l'article 7, le client n'a pas pris livraison du véhicule ou, à défaut, payé son prix", l'arrêt retient, d'une part, que la pénalité de dédit pour le client est limitée à la perte de l'acompte alors que dans l'hypothèse d'une résiliation pour défaut de livraison, le consommateur peut exiger le remboursement des versements déjà effectués, majorés des intérêts au taux légal à partir du premier jour suivant l'expiration du délai de livraison, et, d'autre part, que, dès lors que le client a signé un bon de commande et qu'il bénéficie d'une garantie de prix dans le délai de trois mois, il a souscrit une obligation de payer le prix mais également celle de prendre livraison, et, sauf à établir qu'il serait empêché de remplir ses obligations en raison d'un cas de force majeure, il n'apparaît pas que la faculté de résiliation par le vendeur, après mise en demeure, puisse constituer pour ce professionnel un avantage injustifié ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que l'article 9 du contrat ne prévoit, dans les cas spécifiés d'un manquement du professionnel à ses engagements contractuels, que le remboursement au profit du consommateur, des versements effectués, majorés des intérêts au taux légal, de sorte que la clause litigieuse, qui a pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de retenir des sommes versées par le consommateur lorsque celui-ci renonce à exécuter le contrat, sans prévoir le droit, pour ce consommateur, de percevoir une indemnité d'un montant équivalent de la part du professionnel lorsque c'est celui-ci qui y renonce, créant ainsi un déséquilibre entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, comme l'a énoncé la commission des clauses abusives dans ses recommandations n° 91-02 et 04-02, en ce qu'elle sanctionne plus lourdement l'inexécution du consommateur que celle du professionnel, doit être regardée comme abusive, la cour d'appel a violé les dispositions susvisées ;
Et sur le douzième moyen :
Vu l'article 1154 du code civil ;
Attendu que, pour débouter l'association UFC 38 - Que choisir de sa demande de capitalisation des intérêts produits par les dommages-intérêts qui lui avaient été alloués en première instance, avec exécution provisoire, l'arrêt énonce que, s'agissant de l'indemnisation de préjudices, appréciés au moment où la cour d'appel statue, il n'y a pas lieu à capitalisation des intérêts ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que le texte susvisé n'exige pas que, pour produire des intérêts, les intérêts échus des capitaux soient dus au moins pour une année entière au moment où le juge statue, mais exige seulement que la capitalisation soit ordonnée sous les conditions posées par l'article susvisé, la cour d'appel a violé celui-ci ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige, par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a partiellement infirmé le jugement ayant ordonné la suppression de l'article 2, de l'article 3, paragraphe 2, et des articles 6 et 9 in fine des conditions générales de vente insérées dans les bons de commande de véhicules neufs proposés par la société Automobiles Peugeot aux consommateurs, et a débouté l'association UFC 38 - Que choisir de sa demande de capitalisation, ainsi qu'en ce qu'il a confirmé le jugement ayant ordonné la suppression de l'article 1er-Modèles, alinéa 2, phrase 2, des mêmes conditions générales, l'arrêt rendu le 1er juin 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DECLARE abusives la clause stipulée à l'article 2, sauf à ce que soit précisé que le consommateur a le droit correspondant de rompre le contrat au cas où le prix final serait trop élevé par rapport au prix convenu lors de la commande, la clause stipulée à l'article 3, paragraphe 2, et celles stipulées aux articles 6 et 9 in fine des conditions générales ; dit, en conséquence, qu'elles sont réputées non écrites ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts afférents aux indemnités allouées à l'association UFC 38 - Que choisir et échus depuis au moins une année entière, dans les conditions prévues à l'article 1154 du code civil ;
Condamne la société Automobiles Peugeot aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, déboute la société Automobiles Peugeot de sa demande ; la condamne à payer la somme de 2 000 euros à l'association UFC 38 - Que choisir ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille six.