AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'agissant sur le fondement d'une ordonnance ayant rendu exécutoire une sentence arbitrale, la société Same Deutz-Farh group (la société Same) a fait pratiquer deux saisies conservatoires de créances au préjudice de la société Zetor entre les mains de la société Motokov France (la société Motokov) ; que cette dernière a saisi un juge de l'exécution d'une demande en nullité et mainlevée de ces mesures ; que la société Zetor est intervenue volontairement à l'instance et a formulé les mêmes demandes ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Same fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la demande de la société Motokov, alors, selon le moyen, que seul le débiteur a le droit d'agir en nullité des saisies pratiquées ; que le tiers saisi ne peut faire obstacle aux procédures engagées en vue de l'exécution ou de la conservation des créances ; qu'il est simplement recevable à invoquer, en défense à une demande de paiement fondée sur l'article 238 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992, la caducité ou la nullité de la saisie dont il a été l'objet ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré le tiers saisi, qui avait introduit la demande initiale en nullité des saisies pratiquées, recevable à agir ; qu'en confondant, dès lors, la recevabilité de l'action initiale et les moyens de défense invocables contre la demande reconventionnelle, la cour d'appel a violé les articles 24 et 72 de la loi du 9 juillet 1991, ensemble les articles 131 à 133 et 225 du décret du 31 juillet 1992 ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'une demande en paiement avait été formée à l'encontre de la société Motokov par le créancier saisissant, la cour d'appel a pu retenir que cette société était recevable à demander la nullité des saisies ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article 68 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Attendu qu'une autorisation préalable du juge n'est pas nécessaire pour pratiquer une mesure conservatoire, lorsque le créancier se prévaut d'une décision de justice qui n'a pas encore force exécutoire ;
Attendu que, pour annuler les saisies litigieuses, l'arrêt retient qu'une sentence arbitrale n'est pas une décision de justice ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré recevables les demandes des sociétés Motokov et Zetor, l'arrêt rendu le 3 mai 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;
Condamne la société Motokov et la société Zetor aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes de la société Same Deutz-Farh group d'une part, de la société Motokov France de deuxième part, de la société Zetor de troisième part ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze octobre deux mille six.