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05/10/2006 | FRANCE | N°05-11343

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 octobre 2006, 05-11343


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 28 juillet 2004), que faisant l'objet de poursuites initiées par l'Union de crédit pour le bâtiment (UCB) en vue de la saisie de ses rémunérations, M. X..., qui en sa qualité d'époux de Mme Y..., rapatriée, avait déposé une demande d'aide au désendettement devant la commission administrative compétente, a, pour s'opposer aux poursuites, invoqué le bénéfice du dispositif législatif concernant

les rapatriés réinstallés dans une profession non salariée prévoyant la suspension ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 28 juillet 2004), que faisant l'objet de poursuites initiées par l'Union de crédit pour le bâtiment (UCB) en vue de la saisie de ses rémunérations, M. X..., qui en sa qualité d'époux de Mme Y..., rapatriée, avait déposé une demande d'aide au désendettement devant la commission administrative compétente, a, pour s'opposer aux poursuites, invoqué le bénéfice du dispositif législatif concernant les rapatriés réinstallés dans une profession non salariée prévoyant la suspension des poursuites ; qu'un jugement du tribunal d'instance de Perpignan en date du 11 septembre 2003 a rejeté sa contestation et autorisé la saisie de ses rémunérations ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa contestation et dit qu'il serait procédé à la saisie de ses rémunérations au profit de l'UCB pour la somme de 12 233,32 euros en principal et intérêts et de l'avoir condamné à payer à la société UCB, la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, alors, selon le moyen :

1 / que les dispositions légales prévoyant le mécanisme de suspension des poursuites au profit des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ont fixé à cette suspension une limite dans le temps, constituée par le prononcé de la décision de la commission d'aide aux rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ou de la juridiction statuant, le cas échéant, sur cette décision administrative ;

qu'en affirmant au contraire, pour conclure à la violation du principe de prééminence du droit, que ces dispositions " ne fixent pas de délai maximum pour l'exécution de la décision de justice prononçant la condamnation " et qu'" une mainlevée de la saisie aurait ainsi pour effet de différer cette exécution sans limite ", la cour d'appel a violé ensemble les articles 100 de la loi de finances n° 97-1269 du 30 décembre 1997 et 25 la loi de finances rectificative n° 98-1267 du 30 décembre 1998, d'une part, l'article 6 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, d'autre part ;

2 / que le bénéfice de la suspension de plein droit des poursuites prévue en faveur des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée est attaché à la seule justification du dépôt d'un dossier de demande d'aide au désendettement devant la commission d'aide aux rapatriés réinstallés dans une profession non salariée ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs du jugement confirmé que la CONAIR avait été saisie d'une demande tendant à la suspension des poursuites le 29 juillet 1999 ;

qu'en outre, M. X... versait aux débats une lettre par laquelle le tribunal administratif de Montpellier constatait avoir été saisi, par demande enregistrée le 11 juin 2003, d'un recours à l'encontre de la décision de rejet rendue par ladite commission ; que le tribunal, qui a pourtant rejeté la contestation soulevée par M. X... en retenant qu'il n'avait pas rapporté la preuve de l'absence de décision définitive rendue sur ce recours, a inversé la charge de la preuve et partant violé ensemble les articles 100 de la loi de finances n° 97-1269 du 30 décembre 1997 et 25 la loi de finances rectificative n° 98-1267 du 30 décembre 1998 et l'article 1315 du code civil ;

Mais attendu que si l'article 6 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales permet à l'Etat de limiter le droit d'accès à un tribunal dans un but légitime, c'est à la condition que la substance même de ce droit n'en soit pas atteinte et que, si tel est le cas, les moyens employés soient proportionnés à ce but ;

Qu'ayant exactement retenu que les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, résultant des articles 100 de la loi du 30 décembre 1997, 76 de la loi du 2 juillet 1998, 25 de la loi du 30 décembre 1998, 2 du décret du 4 juin 1999 et 77 de la loi du 17 janvier 2002, organisent, sans l'intervention d'un juge, une suspension automatique des poursuites, d'une durée indéterminée, portant atteinte, dans leur substance même, aux droits des créanciers privés de tout recours, alors que le débiteur dispose de recours suspensifs devant les juridictions administratives, puis relevé que la décision de justice prononçant condamnation était définitive et que les dispositions légales invoquées par M. X... ne fixaient pas de délai maximum pour cette exécution en sorte qu'une mainlevée de la saisie aurait pour effet de différer sans limite l'exécution de l'ordonnance d'injonction de payer du 30 novembre 1998, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que la mesure de saisie des rémunérations devait être confirmée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes respectives de M. X... et de l'Union de crédit pour le bâtiment ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq octobre deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 05-11343
Date de la décision : 05/10/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONVENTION EUROPEENNE DES DROITS DE L'HOMME - Article 6 § 1 - Tribunal - Accès - Droit d'agir - Restriction - Limites - Dépassement - Applications diverses - Suspension automatique des poursuites organisée par les dispositions relatives au désendettement des rapatriés.

RAPATRIE - Mesures de protection juridique - Suspension de plein droit des poursuites - Effets - Etendue - Limites - Demande de saisie des rémunérations

Si l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales permet à l'Etat de limiter le droit d'accès à un tribunal dans un but légitime, c'est à la condition que la substance même de ce droit n'en soit pas atteinte et que, si tel est le cas, les moyens employés soient proportionnés à ce but. Il s'ensuit que les dispositions relatives au désendettement des rapatriés réinstallés dans une profession non salariée, résultant des articles 100 de la loi du 30 décembre 1997, 76 de la loi du 2 juillet 1998, 25 de la loi du 30 décembre 1998, 2 du décret du 4 juin 1999 et 77 de la loi du 17 janvier 2002, qui organisent, sans l'intervention d'un juge, une suspension automatique des poursuites, d'une durée indéterminée, portent atteinte, dans leur substance même, aux droits des créanciers, privés de tout recours, alors que le débiteur dispose de recours suspensifs devant les juridictions administratives.


Références :

Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales art. 6 § 1
Décret 99-469 du 04 juin 1999 art. 2
Loi 2002-73 du 17 janvier 2002 art. 77
Loi 97-1269 du 30 décembre 1997 art. 100
Loi 98-1267 du 30 décembre 1998 art. 25
Loi 98-546 du 02 juillet 1998 art. 76

Décision attaquée : Cour d'appel de Montpellier, 28 juillet 2004

Sur l'étendue des effets de la suspension des poursuites, à rapprocher : Assemblée plénière, 2006-04-07, Bulletin 2006, Ass. plén, n° 3, p. 5 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 oct. 2006, pourvoi n°05-11343, Bull. civ. 2006 II N° 253 p. 236
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 II N° 253 p. 236

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre.
Avocat général : M. Benmakhlouf.
Rapporteur ?: M. Gomez.
Avocat(s) : SCP Gatineau, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.11343
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