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28/07/2004 | FRANCE | N°JURITEXT000006945116

France | France, Cour d'appel de Montpellier, 28 juillet 2004, JURITEXT000006945116


Arrêt Marie Ange X... épouse Y.../ Université de Perpignan et autres page
FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
L'Université de Perpignan et l'Université de Polynésie française sont unies par une convention assurant, au bénéfice des étudiants de la seconde, l'organisation de l'examen d'entrée au Centre Régional de Formation Professionnelle d'Avocat, examen dénommé par les parties pré-CAPA, conformément aux dispositions de la loi modifiée 71-1130 du 31 décembre 1971, du décret modifié 91-1197 du 27 novembre 1991, et de l'arrêté du 29 janvier 1998 fixant le pro

gramme et les modalités de l'examen d'accès au Centre. Selon cette conventi...

Arrêt Marie Ange X... épouse Y.../ Université de Perpignan et autres page
FAITS PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
L'Université de Perpignan et l'Université de Polynésie française sont unies par une convention assurant, au bénéfice des étudiants de la seconde, l'organisation de l'examen d'entrée au Centre Régional de Formation Professionnelle d'Avocat, examen dénommé par les parties pré-CAPA, conformément aux dispositions de la loi modifiée 71-1130 du 31 décembre 1971, du décret modifié 91-1197 du 27 novembre 1991, et de l'arrêté du 29 janvier 1998 fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au Centre. Selon cette convention les épreuves écrites, auxquels les candidats polynésiens sont soumis, sont organisés dans les locaux de l'Université de Polynésie et en cas d'admissibilité, ces candidats doivent se rendre dans les locaux de l'Université de Perpignan pour les épreuves orales. L'Université de Perpignan prenant en charge les modalités de fonctionnement de l'ensemble des épreuves, tant théoriques, par le choix des sujets, que pratiques, les copies lui étant envoyées pour la correction. Conformément à cette convention Marie Ange X... s'inscrivait auprès de l'Université de Perpignan aux fins de présenter cet examen. Les épreuves écrites, droit civil, droit social et note de synthèse, se déroulaient les 25 et 26 septembre 2003 de 7 h30 à l2 h 30 dans les locaux de l'Université de Polynésie française à Tahiti, et ayant été déclarée admissible Marie Ange X... se rendait à Perpignan pour subir l'épreuve orale d'anglais et celle dite du grand oral. Elle était ajournée par décision du jury en date du 5 novembre 2003 et contestait cette décision par recours formé le 23 novembre 2. 003, date d'expédition de sa lettre aux services des postes à Tahiti, auprès du secrétariat greffe de la Cour d'appel. Elle a soutenu dans son mémoire initial que :- la juridiction de l'ordre judiciaire et au sein de celle-ci la Cour d'appel est compétente, notamment à la suite de la décision du Conseil d'Etat du 22 mars 2000 arrêt K... (requête numéro 205091),- la composition du jury n'est pas conforme aux textes, car s'agissant d'une épreuve conjointe entre deux Universités, elle devait faire l'objet d'une décision des deux Universités, et également des ordres d'avocats concernés,- le principe d'égalité entre les candidats n'a pas été respecté, car il y a eu :
* violation du principe de l'anonymat, elle était la seule candidate polynésienne à avoir passé les épreuves écrites les 25 et 26 septembre 2003, or, les épreuves écrites ont été rédigées sur des feuilles imprimées à l'en-tête de l'Université de Polynésie française,
* violation du principe d'égalité : lors de l'épreuve dite note de synthèse qui s'est déroulée en Polynésie le 26 septembre 2003, les documents à synthétiser lui ayant été remis dans le désordre, en sorte que l'épreuve ayant été interrompue à plusieurs reprises, elle n'a pu bénéficier du même temps imparti qu'aux autres candidats.
Ensuite elle a ajouté à son argumentation, en réponse à celle développée par l'Université, que :
- seule la juridiction présentement saisie est compétente par détermination de la loi pour statuer,
- seule la Cour d'appel de Montpellier est territorialement compétente, car l'organisation de l'examen est soumise aux dispositions du décret du 27 novembre 1991 et de ses textes d'application, et ceux-ci désignent la seule Université de Perpignan comme étant celle qui est responsable de la prise en charge de cet examen, en sorte que sa contestation est bien recevable.
Enfin par conclusions du 30 janvier 2004 portant demande additionnelle elle a sollicité que la publicité des débats soit ordonnée, et a soulevé un nouveau moyen selon lequel le principe de l'anonymat n'avait pas été respecté une seconde fois, en ce que le principe de la double correction prévue par l'article 7 de l'arrêté du 29 janvier 1998 n'avait pas été mis en oeuvre.
Elle demande donc :
- l'annulation de l'examen de la session d'octobre et novembre 2003,- l'annulation de son ajournement ainsi que l'admission des autres candidats,
- de dire et juger qu'il sera organisé un nouvel examen d'entrée au CRFPA.
L'université de Perpignan soutient que :
- la Cour d'appel compétente est celle de Papeete et non celle de Montpellier, car elle ne fournit qu'une prestation de service à l'Université de Polynésie dans le cadre d'une aide logistique,
- la requérante, s'agissant d'un examen, ne peut rechercher que l'annulation de la seule décision du jury prononcée à son égard, à la différence d'un concours, aussi les demandes qui ont des conséquences sur les autres candidats sont irrecevables,
- subsidiairement elle demande le rejet du recours. L'université française du Pacifique-Centre universitaire de Polynésie française et le Centre régional de formation professionnelle d'avocats de Montpellier n'ont pas comparu bien que régulièrement convoqués.
Reginald Z... et Yann A..., candidats à l'examen, mis en cause par la requérante ont comparu en personne et indiqué qu'ils ne s'associaient pas à sa démarche car les conditions des épreuves de l'examen d'entrée n'ont eu aucune incidence sur le résultat.
Monsieur le Procureur Général s'en rapporte à justice.
MOTIFS
Sur la recevabilité du recours et sur le déroulement de l'audience
Attendu qu'en application des articles 14 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 et les précisions figurant aux deux premiers alinéas de l'article 16 du décret 91-1197 du 27 novembre 1991 le délai du recours doit être exercé dans le délai de droit commun d'un mois et les règles applicables sont celles de la procédure sans représentation obligatoire ; que le présent recours est donc recevable en la forme ;
Attendu que par conclusions du 30 janvier 2004, portant demande additionnelle, la requérante a sollicité que la publicité des débats soit ordonnée ; qu'en application de l'article 277 précité et des articles 433 et 451 du nouveau Code de procédure civile cette demande est superfétatoire, les débats devant être publics à défaut de motifs ouvrant la possibilité de recourir à la chambre du conseil, et le jugement devant être prononcé publiquement ; qu'il sera ajouté que le recours ne mettant pas en cause une décision du conseil de l'ordre, seule la formation ordinaire est appelée à en connaître ;
Sur la compétence matérielle Attendu que selon l'article 12 de la loi, modifiée, 71-1130 du 31 décembre 1971 la formation professionnelle exigée pour l'accès à la profession d'avocat comprend un examen d'accès à un centre régional de formation professionnelle, et selon l'article 14 de la même moi les recours à l'encontre des décisions concernant la formation professionnelle sont soumis à la cour d'appel compétente ;
Attendu que le recours de Marie Ange X... tend à l'annulation de la décision par laquelle le jury de l'examen d'accès au centre régional de professionnelle des avocats de l'université de Perpignan a rejeté sa candidature ; que dès lors la compétence d'attribution de la Cour doit être retenue ;
Sur la compétence territoriale
Attendu que l'université de Perpignan soutient que le recours devait être formé au siège de la cour d'appel de Papeete au motif que la requérante n'a pas échoué à l'examen organisé par l'université de Perpignan mais à celui de l'université de Polynésie française, dite UPF dans les documents produits ;
Attendu que selon l'article 51 du décret 91-1197 du 27 novembre 1991, dans sa rédaction issue du décret du 24 décembre 1997, le recteur d'académie désigne l'université chargée de l'organisation des épreuves ; que toutefois il ne résulte d'aucune pièce que le vice-recteur de l'académie de Polynésie, appellation maintenue par le décret 99-941 du 12 décembre 1999 pris en application de la loi organique, et exerçant les attributions de recteur, a désigné l'UPF pour organiser cet examen pour la session considérée ;
Attendu qu'ainsi à défaut de modification rectorale peuvent seules organiser les universités désignées par l'arrêté ministériel du 6 janvier 1993 (publié au JO du 14 janvier 1993), complété par l'arrêté du 29 juin 1995 (publié au JO du 8 juillet 1995) et celui du 25 avril 1997 (publié au JO du 6 mai 1997) ;
Attendu que selon ces textes seule l'Université de Perpignan a été désignée pour organiser les épreuves ; qu'en outre la convention précise bien que les étudiants de Polynésie qui présentent cet examen doivent être inscrits auprès de l'Université de Perpignan ;
Attendu qu'il résulte enfin des stipulations de la convention que celle-ci permet à l'UPF d'assurer aux étudiants qui le souhaitent une préparation par le corps professoral de Perpignan, malgré l'éloignement, et de pouvoir se présenter aux épreuves d'admissibilité sans les difficultés liées à un déplacement ; que cette convention n'a pas d'autre effet et ne peut être considérée comme conférant une compétence de délivrance conjointe d'un examen d'entrée au CRFP ;
Attendu qu'ainsi seule l'Université de Perpignan doit être considérée comme étant celle qui pouvait légalement organiser l'examen ; que cette Université ayant son siège dans le ressort de la Cour, l'exception d'incompétence invoquée par l'Université de Perpignan n'est pas fondée ;
Sur la régularité de la composition du jury
Attendu que selon l'article 53 du décret de 1991 le jury de l'examen est composé de trois avocats désignés en commun par les bâtonniers des ordres d'avocats concernés ;
Attendu d'abord ne sont concernés, au sens de ce texte, que les seuls bâtonniers des ordres d'avocats situés dans le ressort du centre régional de formation professionnelle d'avocats de la cour d'appel dans le ressort de laquelle est située l'université qui organise l'examen ; que le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Papeete n'était pas concerné, l'université de Polynésie n'étant pas organisatrice ;
Attendu, ensuite, que si la désignation en commun ne requiert pas de formalités particulières, toutefois en l'espèce seuls les bâtonniers des barreaux près les Tribunaux de Grande Instance de Perpignan, de Carcassonne, et de Narbonne ont été effectivement consultés et ont proposé des candidats titulaires et suppléants ;
Attendu que les bâtonniers des barreaux de Béziers, Millau et Rodez n'ont pas participé à la désignation des trois avocats, et cette omission met en cause la validité de la composition du jury ;
Sur le déroulement des épreuves écrites
Attendu qu'il ne résulte pas des pièces produites une violation du principe d'égalité lors de l'épreuve, dite note de synthèse, qui s'est déroulée en Polynésie le 26 septembre 2003 ; qu'en effet si les documents à synthétiser ont été remis à la requérante dans le désordre, cette circonstance a été infligée à tous les candidats et a pu être facilement surmontée par eux ; qu'enfin il est démontré que les épreuves écrites ont fait l'objet d'une double correction, deux paraphes figurant sur les copies ;
Attendu qu'il est établi que la requérante était la seule candidate polynésienne à participer aux épreuves écrites organisées les 25 et 26 septembre 2003 ; qu'elle a composé sur des feuilles imprimées à l'en-tête de l'Université de Polynésie française alors que cette université ne pouvait légalement organiser un tel examen ;
Attendu qu'en outre était manifestement rompu l'anonymat des épreuves, requis par l'article 7 de l'arrêté du 29 janvier 1998, fixant le programme et les modalités de l'examen d'accès au centre régional de formation professionnelle d'avocat, publié au JO du 31 janvier 1998 ;
Attendu que de ces deux derniers chefs l'argumentation de la requérante est fondée ;
Attendu qu'il convient en conséquence de prononcer l'annulation de la décision du jury ayant proclamé ajournée la requérante ; que cette annulation, qui n'a aucune incidence sur les résultats des autres candidats qui sont définitifs, a pour seul effet de lui permettre de passer à nouveau l'examen sans que l'interdiction prévue au deuxième alinéa de l'article 52 du décret de 1991 lui soit opposable ;
Attendu qu'en raison de la nature de la présente instance, il n'y a pas lieu de donner acte à la requérante de ses réserves sur le quantum de son préjudice, et sur les conditions dans lesquelles Pascal B... aurait concédé un témoignage au profite de l'université de Perpignan ;
Attendu que les dépens, s'il en existe, doivent être mis à la charge de l'université de Perpignan en application de l'article 696 du nouveau Code de procédure civile, étant précisé que s'agissant d'une procédure sans représentation obligatoire l'article 699 de ce Code n'est pas applicable ;
PAR CES MOTIFS LA COUR
Rejette l'exception d'incompétence,
Déclare le recours recevable en la forme,
Annule la décision du jury de l'Université de Perpignan ayant proclamé Marie Ange X... épouse Y... ajournée à l'examen d'accès au centre de formation professionnelle des avocats ouvert à la session du mois d'octobre 2. 003,
Rejette les autres demandes,
Condamne l'Université de Perpignan aux dépens de la présente instance.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Montpellier
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006945116
Date de la décision : 28/07/2004

Analyses

AVOCAT

L'anonymat des épreuves du pré-CAPA organisées à Perpignan a été rompu à l'égard de la requérante, seule candidate polynésienne, qui a composé sur des feuilles imprimées à l'en-tête de l'université de Polynésie, alors que cette université ne pouvait légalement organiser un tel examen.


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.montpellier;arret;2004-07-28;juritext000006945116 ?
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