AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 19 du règlement (CE) du Conseil n° 44/2001 du 22 décembre 2000 ;
Attendu qu'aux termes du paragraphe 1 de ce texte, l'employeur ayant son domicile sur le territoire d'un Etat membre peut être attrait devant les tribunaux de l'Etat membre où il a son domicile ; qu'il résulte du paragraphe 2 sous a), que l'employeur peut aussi être attrait dans un autre Etat membre, devant le tribunal du lieu ou le travailleur accomplit habituellement son travail ou devant le tribunal du dernier lieu où il a accompli habituellement son travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué que M. X..., ressortissant italien domicilié à Strasbourg, engagé par contrat à durée déterminée le 21 mai 2001 par la société de droit allemand Sanierungstechnik, ayant son siége en Allemagne, a travaillé sur des chantiers situés en France ;
qu'ayant été licencié le 13 mai 2002, il a saisi le conseil de prud'hommes de Strasbourg qui s'est déclaré déclaré incompétent au profit du conseil de prud'hommes de Limoges ;
Attendu que pour infirmer ce jugement et décider que le conseil de prud'hommes de Strasbourg est territorialement compétent pour connaître du litige, l'arrêt énonce, d'abord, que la compétence territoriale doit être déterminée en fonction des dispositions de l'article 19 du règlement CE n° 44-2001 du 22 décembre 2000, que toutefois celles-ci n'ont pas vocation à désigner la juridiction territorialement compétente mais uniquement l'Etat dont les tribunaux sont compétents en fonction des règles de conflit définies, et retient ensuite, que M. X... ayant travaillé sur différents chantiers tous situés en France est fondé à se prévaloir de la compétence des juridictions françaises pour trancher le litige qui l'oppose à son employeur, et que celui-ci ayant exercé son activité sur différents chantiers en dehors de tout établissement, le tribunal compétent est celui de son domicile, par application des dispositions de l'article R. 517-1 du code du travail ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors d'une part, que l'article 19 paragraphe 2 sous a) du règlement n 44/2001 instaure des règles de compétence spéciales qui interdisent à l'Etat membre saisi par un salarié d'une demande dirigée contre un employeur domicilié dans un autre Etat membre, de se référer à ses propres règles de compétence pour déterminer quelle est la juridiction compétente, et, d'autre part, qu'il résulte des constatations des juges du fond que M. X... a exécuté son travail sur différents chantiers tous situés en France, dont le dernier était situé à Limoges, en sorte qu'elle ne pouvait se fonder sur les dispositions de l'article R. 517-1 du code du travail pour dire que la juridiction compétente était celle de son domicile, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure en cassant sans renvoi de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Strasbourg en ce qu'il s'est déclaré incompétent et a renvoyé la cause et les parties devant le conseil de prud'hommes de Limoges ;
Réserve les dépens devant l'instance au fond ;
Laisse les dépens de cassation à la charge du Trésor public ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt septembre deux mille six.