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19/09/2006 | FRANCE | N°06-80674

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 septembre 2006, 06-80674


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf septembre deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle LE GRIEL, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHARPENEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Mickaël, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1ère section, en date du 21 novembre 20

05, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée du chef de violences pa...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le dix-neuf septembre deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle LE GRIEL, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHARPENEL ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Mickaël, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 1ère section, en date du 21 novembre 2005, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée du chef de violences par personnes dépositaires de l'autorité publique, a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;

Vu l'article 575 alinéa 2, 2 et 6 du code de procédure pénale ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 197 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué mentionne que, d'une part, l'audience a eu lieu le 12 septembre 2005 et que, d'autre part, la notification de la date d'audience a été faite et le dossier mis à la disposition des avocats le 15 septembre 2005 ;

"alors que, selon l'article 197 du code de procédure pénale, le procureur général doit, à peine de nullité, notifier aux parties et à leurs avocats la date de l'audience au moins cinq jours avant et mettre le dossier à la disposition des avocats pendant ce délai et qu'en l'espèce, cette formalité ayant été effectuée trois jours après l'audience, l'arrêt est entaché de nullité" ;

Attendu que l'examen des pièces de la procédure met la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les parties ont été avisées, le 15 septembre 2005, de la date de l'audience des débats fixée au 17 octobre 2005, soit dans le délai de l'article 197 du code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen, qui se fonde sur une erreur matérielle de date contenue dans l'arrêt attaqué, ne peut qu'être écarté ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 87, 89 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable l'appel interjeté par Mickaël X... à l'encontre de l'ordonnance de non-lieu à suivre du juge d'instruction ;

"au motif qu'"à la suite d'une première convocation de Mickaël X... restée infructueuse, le juge d'instruction, qui avait manifestement, au vu de la réponse, interrogé l'avocat signataire de la plainte sur l'adresse du précité, a reçu un courrier en date du 11 décembre 2003 communiquant le renseignement demandé et indiquant : "Vous pouvez donc à présent le convoquer à cette adresse. Ceci étant, je vous indique que mon client entend se constituer partie civile et que je l'assisterai pour les suites de ce dossier" ; que "malgré la nouvelle convocation adressée par le juge d'instruction au plaignant, celui-ci ne s'est pas présenté sans fournir d'explication à sa carence ni solliciter une autre date d'audition " ;

que "c'est dans ces conditions que l'article 175 du code de procédure pénale a été notifié puis que l'ordonnance déférée est intervenue", qu'"il se déduit de ce qui précède que le plaignant n'a, en définitive, pas donné suite au projet annoncé par l'avocat rédacteur du courrier adressé au juge d'instruction, cet écrit qui ne contenait, au surplus, aucune élection de domicile, ne pouvant être considéré comme valant acte de constitution de partie civile" et que "dès lors, l'appel de Mickaël X... qui n'a pas la qualité de partie à l'instance, est irrecevable" ;

"1 ) alors que la constitution de partie civile au cours de l'instruction peut être réalisée par l'envoi au juge d'instruction d'une simple lettre qui exprime sans équivoque la volonté de se constituer partie civile, que cette lettre peut émaner de l'avocat de l'intéressé sans qu'il ait à justifier d'un pouvoir spécial, qu'en l'espèce, il résultait clairement de la lettre du 11 décembre 2003 adressée par l'avocat de Mickaël X... au juge d'instruction que ce dernier se constituait partie civile (" je vous indique que mon client entend se constituer partie civile ") et que, dès lors, Mickaël X... avait la qualité de partie civile et était donc recevable à interjeter appel de l'ordonnance de non-lieu à suivre ;

"2 ) alors qu' il résulte de l'article 89, alinéa 4, du code de procédure pénale que le fait que la lettre du 11 décembre 2003 ne contienne pas élection de domicile a pour seule conséquence l'inopposabilité par Mickaël X... du défaut de notification des actes qui auraient dus lui être notifiés aux termes de la loi et restent sans incidence sur la qualité de partie civile de l'intéressé" ;

Vu les articles 87 et 593 du code de procédure pénale ;

Attendu que la constitution de partie civile peut avoir lieu à tout moment au cours de l'instruction ;

Attendu que tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, saisi d'une plainte adressée par l'avocat de Mickaël X..., le procureur de la République a requis l'ouverture d'une information du chef de violences commises par dépositaire de l'autorité publique ; qu'au cours de l'information, le même avocat a adressé, le 11 décembre 2003 au magistrat instructeur une lettre indiquant que Mickaël X..., dont il précisait l'adresse, entendait se constituer partie civile et que lui-même l'assisterait pour les suites du dossier ; qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a rendu, le 21 juin 2004, une ordonnance de non-lieu, qui n'a été notifiée ni à Mickaël X... ni à son avocat ; que Mickaël X... a formé appel de cette décision le 14 avril 2005 ;

Attendu que, pour déclarer cet appel irrecevable, l'arrêt énonce que le plaignant n'a, en définitive, pas donné suite au projet annoncé par l'avocat rédacteur du courrier adressé au juge d'instruction, cet écrit, qui ne contenait, au surplus, aucune élection de domicile, ne pouvant être considéré comme valant acte de constitution de partie civile ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la lettre adressée au magistrat instructeur, le 11 décembre 2003, atteste la volonté formelle et non équivoque de se constituer partie civile, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris en date du 21 novembre 2005, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 06-80674
Date de la décision : 19/09/2006
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

INSTRUCTION - Partie civile - Constitution - Constitution par voie d'intervention - Validité - Conditions - Manifestation expresse de volonté.

ACTION CIVILE - Partie civile - Constitution - Constitution à l'instruction - Constitution par voie d'intervention - Validité - Conditions - Manifestation expresse de volonté

Dès lors que les termes d'une lettre adressée au juge d'instruction manifestent et concrétisent sans équivoque l'intention de se constituer partie civile, la chambre de l'instruction ne peut déclarer irrecevable, faute de qualité, l'appel de la partie civile contre une ordonnance de non-lieu. Encourt la censure l'arrêt qui déclare irrecevable l'appel d'une ordonnance de non-lieu, au motif que l'appelant ne s'était pas expressément constitué partie civile, alors qu'il résulte de ses énonciations qu'au cours de l'information ouverte par le procureur de la République, l'avocat du plaignant avait adressé une lettre au juge d'instruction dans laquelle il indiquait que son client entendait se constituer partie civile et que lui-même l'assisterait pour les suites du dossier.


Références :

Code de procédure pénale 87, 593

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre de l'instruction), 21 novembre 2005

A rapprocher : Chambre criminelle, 1979-10-02, Bulletin criminel 1979, n° 265, p. 719 (cassation) ; Chambre criminelle, 2002-05-15, Bulletin criminel 2002, n° 116, p. 409 (cassation), et les arrêts cités ; Chambre criminelle, 2006-09-19, Bulletin criminel 2006, n° 223, p. 788 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 sep. 2006, pourvoi n°06-80674, Bull. crim. criminel 2006 N° 227 p. 800
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2006 N° 227 p. 800

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Charpenel.
Rapporteur ?: Mme Anzani.
Avocat(s) : SCP Le Griel.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:06.80674
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