AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que de novembre 1989 à juin 1990, la société Parisienne de couverture et de plomberie (SPCP), associée dans la société civile immobilière "Le Clos de Chambrun" (la SCI), a acquitté les dettes souscrites par celle-ci auprès du Crédit commercial de France (CCF) et de la Banque populaire de Toulouse ; que, se prétendant subrogée dans les droits de ces deux établissements, elle a été remboursée de l'une et l'autre créances sur le produit de la vente ultérieure d'un terrain de la SCI ; que l'arrêt attaqué, reconnaissant la seconde subrogation mais déniant l'existence de la première, a ordonné la restitution à la SCI de la somme correspondante ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux branches :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 11 mai 2004), d'avoir écarté toute subrogation de la SPCP dans les droits du CCF, alors, d'une part, qu'il aurait ainsi dénaturé la quittance subrogative délivrée par cette banque le 20 mai 1994 rappelant que par lettre du 9 octobre 1990 elle lui avait donné quittance comme conséquence du remboursement effectué, de sorte que la subrogation conventionnelle était survenue dès cette date, et d'autre part, violé l'article 1251 3 du code civil, la subrogation légale prévue par ce texte pouvant être invoquée par l'obligé solvens même si sa dette demeure virtuelle au moment du paiement, telle étant la situation de l'associé d'une société civile au regard des dettes de celle-ci ;
Mais attendu, sur la première branche, que la concomitance nécessaire du paiement et de la subrogation conventionnelle, dont la preuve incombe au subrogé, est souverainement appréciée par les juges du fond; que la cour d'appel, qui a relevé que la lettre du 9 octobre 1990 se limitait à donner quittance, la volonté subrogative n'apparaissant que dans l'acte du 20 mai 1994, n'a pu que conclure à l'inexistence de la subrogation alléguée ; et attendu, sur la seconde branche, que l'arrêt retient exactement que la subrogation légale de l'article 1251 3 du code civil ne peut être invoquée par l'associée appelé à éventuellement acquitter les dettes de la société civile dont il est membre, dès lors que, comme en l'espèce, ne sont établies ni l'insuffisance de l'actif social ni par voie de conséquence la somme contributive mise à sa charge, de sorte que son obligation n'est ni certaine ni liquide ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit la SPCP en conséquence de sa subrogation conventionnelle régulière dans les droits de la BPT, fondée à conserver la somme perçue de la SCI à ce titre, alors qu'en lui permettant d'éviter de concourir avec les autres associés à l'occasion du règlement du passif social, et de jouir ainsi d'un droit préférentiel, il violerait l'article 1832, alinéa 3, du code civil et la règle "fraus omnia corrumpit" ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a relevé que le remboursement de la dette sociale effectuée auprès de la BTP par la SPCP avait eu pour fin de sauvegarder, outre ses propres intérêts, ceux de la SCI en lui permettant d'éviter la saisie d'un immeuble puis de le céder ultérieurement de gré à gré pour un prix non critiqué, en a souverainement déduit l'absence de toute fraude ; que le moyen n'est pas davantage fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chaque partie la charge des dépens afférents à son propre pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze juillet deux mille six.