AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que par requête datée du 8 décembre 1997, déposée au greffe du tribunal de grande instance de Montpellier le 10 décembre suivant, Antoine X..., né le 21 mars 1917, a sollicité l'adoption simple de sa nièce, Mme Christilla X..., épouse Y..., née le 19 septembre 1949 ; qu'Antoine X... est décédé le 10 janvier 1998 ; que son avocat en a avisé la juridiction et a indiqué que Mme Y... souhaitait que la procédure "poursuive son cours" ; que par jugement du 23 avril 1998, le tribunal de grande Instance a prononcé l'adoption simple de Mme Christilla X... par Antoine X... et dit que l'adoptée conserverait son nom ; que MM. Hervé et Guilhem X..., neveux et petit-neveux de l'adoptant, à qui la décision avait été notifiée en ont interjeté appel ; qu'un premier arrêt avant dire droit a débouté les appelants de leur demande d'annulation du jugement ; qu'un second arrêt a confirmé l'adoption simple ;
Sur le premier moyen :
Attendu que MM. Hervé et Guilhem X... font grief aux arrêts attaqués (Montpellier, 12 septembre 2000 et 2 décembre 2003) d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, qu'en dehors des hypothèses limitativement prévues par la loi, l'instance s'éteint accessoirement à l'action non transmissible par le décès de son titulaire ; qu'en refusant d'annuler le jugement qui avait prononcé l'adoption de Christilla X..., épouse Y..., par Albert X... et en confirmant cette dernière bien que le décès de l'adoptant après le dépôt de la requête et avant le jugement ait entraîné l'extinction de l'instance, les conditions de reprise de la requête prévues à l'article 353, alinéa 3, du code civil n'étant pas remplies, la cour d'appel a violé l'article 353 précité et 384 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu que c'est seulement lorsque l'adoptant est décédé sans avoir déposé sa requête qu'il est nécessaire, conformément aux dispositions de l'article 353, alinéa 3, du code civil que les héritiers, qui sont censés représenter la personne du défunt, saisissent le tribunal ;
que la cour d'appel, qui a relevé que les premiers juges avaient été régulièrement saisis par l'adoptant, en a justement déduit que son décès survenu postérieurement à la présentation de la requête ne dessaisissait pas le tribunal qui devait statuer sur l'adoption, laquelle produisait ses effets au jour du dépôt de la requête ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que MM. Hervé et Guilhem X... font encore le même grief aux arrêts attaqués, alors, selon le moyen, que l'adoption a pour objet de consacrer, entre l'adoptant et l'adopté, un lien filial et ne saurait avoir un but essentiellement successoral étranger à la finalité de l'institution ; qu'en se fondant, pour confirmer l'adoption par M. Albert X... de sa nièce Christilla X..., épouse Y..., sur le motif inopérant tiré des liens d'affection les unissant, sans rechercher si cette adoption avait, pour les parties, compte tenu de l'âge de l'adoptant, de leur rapport de parenté et de la situation familiale de l'adopté, un intérêt autre que successoral, conforme à la finalité de l'institution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 361 et 366 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a souverainement estimé que l'adoption était conforme à l'intérêt de l'adoptée, a relevé que Mme Christilla X..., épouse Y..., versait aux débats des pièces suffisantes pour établir la réalité des rapports d'affection qui existaient entre elle-même et Antoine X... et des soins qu'elle lui avait prodigués et que la conscience chez l'adoptant des effets successoraux que l'adoption ne manquerait pas d'entraîner ne pouvait être considérée comme constitutive d'un détournement de l'institution dès lors que le dossier révélait qu'il existait d'autres motifs justifiant l'adoption ; que par ces constatations et énonciations, d'où il résulte que l'adoption était conforme à la finalité de l'institution, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne MM. Guilhem et Hervé X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille six.