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05/07/2006 | FRANCE | N°05-12603

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 05 juillet 2006, 05-12603


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la demande de mise hors de cause :

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la Caisse nationale de prévoyance assurances ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par convention notariée du 26 octobre 1978, M. et Mme X... ont souscrit un emprunt destiné à l'acquisition d'une maison auprès de la société Crédit immobilier Alpes Méditerranée, devenue Crédit immobilier de France (la banque),assorti de l'adhésion à une assurance groupe garantissant les ris

ques décès invalidité, souscrite par la banque auprès de la Caisse nationale de prévoya...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur la demande de mise hors de cause :

Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la Caisse nationale de prévoyance assurances ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par convention notariée du 26 octobre 1978, M. et Mme X... ont souscrit un emprunt destiné à l'acquisition d'une maison auprès de la société Crédit immobilier Alpes Méditerranée, devenue Crédit immobilier de France (la banque),assorti de l'adhésion à une assurance groupe garantissant les risques décès invalidité, souscrite par la banque auprès de la Caisse nationale de prévoyance assurances (l'assureur) ; que M. X... ayant été déclaré en état d'invalidité à compter du 10 octobre 1998, l'assureur a pris en charge le remboursement des échéances du prêt du 8 janvier 1999 jusqu'au 31 mars 1999, date du soixante-cinquième anniversaire de M. X... ;

que, les 24 et 28 novembre 2000, M. et Mme X... ont assigné, devant le tribunal de grande instance, l'assureur et la banque pour voir juger que la garantie invalidité restait due au-delà du soixante-cinquième anniversaire jusqu'au remboursement intégral du prêt, et que la banque avait engagé sa responsabilité, pour manquement à son devoir d'information ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande tendant à voir dire et juger que la garantie invalidité du contrat d'assurance sur la vie souscrit auprès de l'assureur leur restait due jusqu'au remboursement intégral du prêt souscrit auprès de la banque, alors, selon le moyen :

1 / que dans le cas où il est constant qu'un contrat d'assurance a existé, il appartient à l'assureur, s'il soutient que sa garantie n'est pas acquise à partir d'un âge donné, de le démontrer en versant la police aux débats ; que, dans le cas d'espèce, l'assureur avait exécuté le contrat pendant plusieurs années et prétendait simplement que sa garantie prenait fin au moment du soixante-cinquième anniversaire de l'assuré ; que la cour d'appel ne pouvait repousser la demande de garantie des assurés, sous prétexte qu'ils ne produisaient pas la police d'assurance ; qu'en statuant de la sorte, elle a violé l'article 1315 du code civil et l'article L. 112-2 du code des assurances ;

2 / que les juges du fond ne pouvaient fonder leur décision sur une notice produite par l'assureur et concernant "manifestement", selon leurs propres constatations, un autre cas que celui des assurés ;

qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a fondé sa décision sur un élément contractuel relevant manifestement d'un autre contrat que celui sur lequel elle devait statuer ; qu'elle a violé l'article 1165 du code civil ;

3 / que la cour d'appel, à supposer qu'elle ait repris les motifs des premiers juges à son compte, ne pouvait statuer comme elle l'a fait en retenant qu'il était "permis de penser" que la notice concernant "manifestement" un autre type de contrat et d'autres assurés emprunteurs était "en pratique" étendue à l'ensemble des opérations de l'assureur ;

que la cour d'appel s'est fondée sur des motifs purement hypothétiques, violant l'article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que dès lors que la clause litigieuse, qui définissait le risque pris en charge, énonçant une condition de la garantie tenant à l'âge du souscripteur, échappait au régime des exclusions, la cour d'appel, qui a retenu que M. et Mme X... avaient reconnu devant notaire avoir reçu un extrait du contrat d'assurance, leur a justement opposé le défaut de production du contrat ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en ses deux dernières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles 1147 du code civil et L. 140-4 du code des assurances ;

Attendu que le souscripteur d'une assurance de groupe est tenu envers les adhérents d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'achève pas avec la remise de la notice prévue par le second de ces textes ;

Attendu que pour débouter M. et Mme X... de leur demande tendant à voir condamner la banque pour défaut d'information sur la police souscrite auprès de l'assureur, l'arrêt retient que les dispositions de l'article L. 140-4 du code des assurances, applicables à l'époque du contrat, limitaient l'obligation d'information à la remise d'une notice détaillant les conditions de la garantie, ce qui avait été fait ; que la banque n'a commis aucune faute en encaissant des cotisations dans la mesure où elle n'avait pas à apprécier la durée de l'engagement de l'assureur et n'avait reçu aucune instruction de l'assureur d'interrompre le prélèvement des cotisations ; que par suite d'une erreur qu'elle impute à l'informatique, la banque a prélevé les cotisations d'assurance incluant le risque "incapacité de travail", représentant un surcoût de 6,10 euros ;

qu'elle s'engage à restituer les montants des primes prélevées en trop ;

Qu'en statuant ainsi, tout en relevant que le contrat de prêt stipulait expressément que l'assurance devait être maintenue dans tous ses effets jusqu'à la fin du remboursement et que l'organisme de crédit avait effectivement prélevé et versé à l'assureur, jusqu'à la fin du remboursement, une prime couvrant le risque d'invalidité, ce dont il résultait que le banquier souscripteur de l'assurance de groupe avait créé une apparence trompeuse de garantie totale jusqu'à la fin du contrat de prêt, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. et Mme X... de leur demande tendant à voir condamner le Crédit immobilier de France pour défaut d'information sur la police souscrite auprès de la CNP, l'arrêt rendu le 7 décembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ;

Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes respectives de la Caisse nationale de prévoyance et du Crédit immobilier de France ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille six.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 05-12603
Date de la décision : 05/07/2006
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance de groupe - Souscripteur - Obligations - Obligation de conseil - Etendue - Remise de la notice - Portée.

ASSURANCE DE PERSONNES - Assurance de groupe - Souscripteur - Obligations - Information de l'assuré - Manquement - Date de cessation de la garantie - Date occultée par la continuation des prélèvements de cotisations - Portée

RESPONSABILITE CONTRACTUELLE - Obligation de conseil - Domaine d'application - Etendue - Détermination - Portée

BANQUE - Responsabilité - Faute - Manquement à l'obligation de conseil ou de mise en garde - Applications diverses - Adhésion de l'emprunteur à une assurance de groupe - Modalités

PRET - Prêt d'argent - Prêt assorti d'un contrat d'assurance de groupe - Souscripteur - Obligations - Obligation de conseil - Etendue - Portée

Le souscripteur d'une assurance de groupe est tenu envers les adhérents d'une obligation d'information et de conseil qui ne s'achève pas avec la remise de la notice prévue par l'article L. 140-4 du code des assurances. Dès lors, manque à cette obligation le banquier qui par son fait a créé une apparence trompeuse de garantie totale jusqu'à la fin du contrat de prêt en prélevant, fût-ce par erreur, une prime correspondant au risque incapacité de travail au-delà de la période d'effet d'une garantie limitée dans la durée, et en prélevant sur toute la durée du contrat de prêt une prime correspondant au risque invalidité alors que la garantie cessait au 65e anniversaire de l'adhérent.


Références :

Code civil 1147
Code des assurances L140-4

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, 07 décembre 2004

Sur l'étendue de l'obligation d'information et de conseil de l'établissement de crédit souscripteur d'un contrat d'assurance de groupe, à rapprocher : Chambre civile 2, 2005-12-15, Bulletin 2005, II, n° 325, p. 286 (cassation partielle), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 05 jui. 2006, pourvoi n°05-12603, Bull. civ. 2006 II N° 184 p. 176
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2006 II N° 184 p. 176

Composition du Tribunal
Président : Mme Favre.
Avocat général : M. Kessous.
Rapporteur ?: M. Lafargue.
Avocat(s) : Me de Nervo, SCP Ghestin, SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.12603
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