AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept juin deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller GUIRIMAND, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Stéphane,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 25 mai 2005, qui, pour injure raciale non publique, l'a condamné à 100 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu le mémoire et les observations complémentaires produits ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 65 de la loi du 29 juillet 1881 et 624-4 du code pénal ;
"en ce que l'arrêt attaqué a écarté l'exception de prescription et condamné le prévenu du chef d'injure non publique en raison de l'origine, l'ethnie, la nation, la race ou la religion ;
"aux motifs qu'au regard de l'article 624-4 du code pénal, immédiatement applicable, le délai de prescription de l'action publique est d'une année ; que celle-ci n'est en l'espèce pas prescrite ;
"alors que la contravention d'injure raciale non publique, régie par les dispositions particulières de procédure édictées par la loi sur la liberté de la presse, est soumise au délai de prescription de trois mois prévu par l'article 65 de ladite loi" ;
Vu les articles 65 et 65-3 de la loi du 29 juillet 1881 ;
Attendu que, selon les dispositions de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881, l'action publique et l'action civile résultant des délits et contraventions prévus par la loi sur la liberté de la presse, sauf dans les cas énumérés par l'article 65-3 de ladite loi, se prescrivent après trois mois révolus à compter du jour où ils ont été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Stéphane X... est poursuivi sur citation directe du 22 juin 2004, pour la contravention d'injure raciale non publique commise le 29 mars 2003 ;
Attendu que, pour confirmer le jugement ayant dit la prévention établie et écarter la prescription, l'arrêt retient qu'en application de l'article R. 624-4 du code pénal, le délai de prescription n'est pas de trois mois, mais d'un an ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que la contravention d'injure raciale non publique est soumise aux dispositions particulières édictées par l'article 65 de la loi sur la liberté de la presse, et qu'en la circonstance, un délai de plus de trois mois a couru entre la date de commission des faits et l'acte de poursuite, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ; qu'elle aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 131-5 du code de l'organisation judiciaire ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nancy, en date du 25 mai 2005 ;
DIT que les actions publique et civile sont atteintes par la prescription ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nancy et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Guirimand conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;