AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que l'Union fédérale des consommateurs Que Choisir (ci-après UFC) a fait paraître dans son numéro d'avril 2000 de la revue qu'elle édite sous le nom "Que Choisir" les conclusions d'un test comparatif sur 16 produits étiquetés "pur jus d'orange" pouvant se conserver à température ambiante ; qu'elle a également publié en juin 2000 un commentaire de ce test intitulé "vrai-faux jus d'orange" signé par M. X..." représentant les jus d'orange Jaffa-Champion" de la société Culina Culigel ; que saisi en référé par l'Union nationale des producteurs et distributeurs de jus de fruits et de légumes, de nectars et de boissons aux fruits de la métropole et d'outre-mer (UNPJF) devenue Union interprofessionnelle des jus de fruits (ci-après Unijus), le président du tribunal de grande instance de Paris a ordonné une expertise et enjoint à M. X... de s'abstenir de délivrer des messages susceptibles de constituer un dénigrement des produits vendus par les adhérents de l'association ; qu'estimant que l'article litigieux constituait un acte de dénigrement constitutif de concurrence déloyale l'association Unijus a assigné la société Culina Culigel, M. X... et l'association UFC Que-Choisir ; que, par jugement du 20 octobre 2003, le tribunal a estimé que le texte litigieux ne relevait pas des dispositions applicables à la concurrence déloyale mais de celles de la loi du 29 juillet 1881 et constaté que l'acte introductif d'instance était entaché de nullité comme ne respectant pas les exigences fixées par l'article 53 de ce texte ;
Sur le premier moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt attaqué (Paris, 13 avril 2005) d'avoir rejeté l'exception de nullité de l'assignation pour violation des dispositions de l'article 53 de loi du 29 juillet 1881 et d'avoir fait droit aux demandes de l'association Unijus en disant que le texte litigieux était constitutif de concurrence déloyale par dénigrement alors que :
1 / si les données selon lesquelles les produits recevant l'appellation de jus d'orange 100% pur jus ne le méritaient pas, compte tenu notamment des rajouts d'eau et de traitement thermique assimilables à une tromperie et suggéraient une fraude à la vitamine avec comme conséquence que seuls les jus d'orange concentrés surgelés devraient avoir le droit à l'appellation litigieuse tout en évoquant une incidence sur la santé des consommateurs, reprises dans l'arrêt dans le cadre prétendu d'une concurrence déloyale par dénigrement, s'appliquent à des produits elles n'en concernent pas moins des personnes, les adhérents d'Unijus en sorte qu'Unijus ne pouvait agir que sur le fondement des dispositions de la loi du 29 juillet 1881 à l'exclusion de l'article 1382 du Code civil, de sorte que l'arrêt a violé par refus d'application les articles 29 et 53 de loi du 29 juillet 1881 et pour fausse application l'article 1382 du Code civil ;
2 / le dénigrement n'a pas été suffisamment caractérisé dans la mesure où l'article de M. X... était inspiré directement de données formulées par le professeur Y... lors d'une émission de Capital sans que celle-ci fasse l'objet de la moindre contestation et où les appréciations de l'expert judiciaire n'étaient pas aussi tranchées que le prétend l'arrêt qui est vicié pour défaut de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que les appréciations même excessives, concernant les produits, les services ou les prestations d'une entreprise industrielle et commerciale n'entrent pas dans les prévisions de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, dès lors qu'elles ne concernent pas une personne physique ou morale déterminée ; qu'en l'espèce où l'arrêt qui a retenu que les propos incriminés relevaient de la critique d'un produit et qui a estimé, au vu du rapport d'expertise et contrairement à ce qu'allègue le moyen, que les informations présentées comme des précisions apportées au test comparatif publié par la revue Que Choisir constituaient des allégations fausses et malveillantes sur les propriétés ou les conditions de fabrication de produits concurrents des jus d'orange commercialisés par l'auteur, ne mettaient en cause aucune personne physique ou morale déterminée, en a exactement déduit que l'action de la société fondée expressément sur les dispositions de l'article 1382 du Code civil était recevable ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir statué comme il l'a fait alors que l'UFC "Que Choisir" a eu à l'égard de M. X... un comportement fautif ayant activement participé à son dommage né du procès actuel auquel l'UFC a tenté de se dérober par une transaction conclue avec Unijus de sorte que l'arrêt a violé l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que la teneur des correspondances échangées entre les parties et l'association UFC était exclusive de manipulation dont celles-ci auraient été victimes de la part de celle-là ; qu'elle a donc à bon droit écarté la responsabilité de l'association ;
D'où il suit que le second moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... et la société Culina aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille six.