AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le seize mai deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de M. le conseiller LE CORROLLER, les observations de la société civile professionnelle BARADUC et DUHAMEL, et de la société civile professionnelle GASCHIGNARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CHARPENEL ;
Statant sur le pourvoi formé par :
- X... Pierre, agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de ses enfants mineurs Benjamin et Camille X...
- Y... Gina, agissant en son nom personnel et en sa qualité de représentante légale de son enfant mineur
Camille X..., parties civiles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de TOULOUSE, chambre correctionnelle , en date du 20 juin 2005, qui, dans la procédure suivie contre Jean-Claude Z... des chefs de blessures involontaires et contravention au code de la route, a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article 489 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a affirmé que les dispositions civiles du jugement du tribunal correctionnel de Montauban du 2 novembre 2004 étaient définitives et devaient recevoir exécution, et a annulé en conséquence les dispositions civiles du jugement entrepris rendu par le tribunal correctionnel de Montauban le 11 février 2005 ;
"aux motifs que, contrairement à ce que soutiennent les parties civiles, Jean-Claude Z... était parfaitement en droit de limiter son opposition aux dispositions pénales du jugement rendu par défaut ; que les dispositions civiles de cette décision, qui n'ont fait l'objet d'aucun recours, sont devenues définitives et l'action civile des consorts X...-Y... s'est éteinte par l'autorité de la chose jugée ;
que le tribunal correctionnel de Montauban ne pouvait donc déclarer ces dispositions non avenues et statuer à nouveau sur l'action civile ;
qu'en conséquence, il y a lieu d'annuler les dispositions civiles du jugement du 11 février 2005 ;
"alors que l'opposition à un jugement rendu par défaut ne peut pas être limitée à ses seules dispositions pénales ; qu'en l'espèce, l'opposition formée par Jean-Claude Z... avait donc un effet total, anéantissant également les dispositions civiles du jugement du 2 novembre 2004" ;
Vu l'article 489 du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, le jugement par défaut est non avenu en toutes ses dispositions si le prévenu forme opposition à son exécution, sans limiter l'effet extinctif de cette voie de recours aux dispositions civiles de la décision ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que le tribunal correctionnel, par jugement du 2 novembre 2004 rendu par défaut à l'égard de Jean-Claude Z..., a déclaré celui-ci coupable des blessures involontaires causées sur la personne de Benjamin X... dans un accident de la circulation et l'a condamné, avec son assureur, la société Assurances du Crédit Mutuel IARD, à des réparations civiles, après avoir limité à 70% l'indemnisation du dommage subi par la victime ; que Jean-Claude Z... a formé opposition aux "seules dispositions pénales du jugement" ; que le tribunal, par décision contradictoire du 11 février 2005, a déclaré non avenu en toutes ses dispositions le jugement frappé d'opposition et a jugé à nouveau l'affaire au regard tant de l'action publique que de l'action civile, notamment en déclarant le prévenu entièrement responsable du dommage subi par la victime ;
Attendu que, statuant sur l'appel de l'assureur du prévenu, l'arrêt, après avoir constaté que les dispositions civiles du jugement du 2 novembre 2004 rendu par défaut étaient définitives en l'absence de recours, énonce que le tribunal ne pouvait les déclarer non avenues et annule celles prononcées par la décision déférée ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée du texte susvisé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt précité de la cour d'appel de Toulouse, en date du 20 juin 2005, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Bordeaux, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Toulouse et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Canivet premier président, président, M. Cotte président de chambre, M. Le Corroller conseiller rapporteur, MM. Farge, Blondet, Palisse, Castagnède conseillers de la chambre, Mme Guihal, MM. Chaumont, Delbano conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Charpenel ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;