AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le onze mai deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller PONROY, les observations de la société civile professionnelle Le GRIEL, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général FINIELZ ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... François,
contre l'arrêt de la cour d'appel de CHAMBERY, chambre correctionnelle, en date du 21 juillet 2005, qui, pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique en récidive, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve, et a annulé son permis de conduire ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 234-1 à L. 234-5, R. 234-2 du code de la route, 1er, 30 et 31 du décret n° 2001-387 du 3 mai 2001, 13 de l'arrêté du ministre délégué à l'Industrie du 8 juillet 2003 relatif au contrôle des éthylomètres et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré François X... coupable de conduite de véhicule sous l'empire d'un état alcoolique (concentration d'alcool d'au moins 0,40 mg par litre d'air expiré) en état de récidive légale ;
"aux motifs que "l'article R. 234-2 du code de la route dispose que les opérations de dépistage de l'imprégnation alcoolique par l'air expiré, prévues par les articles L. 234-3 à L. 234-5 et L. 234-9, sont effectuées au moyen d'un appareil conforme à un type homologué selon des modalités définies par arrêté du ministre chargé de la Santé Publique" ; qu' "en l'espèce, la procédure de dépistage de l'alcoolémie ne saurait être annulée aux motifs que la date de validité courante de l'éthylomètre ne figure pas au procès- verbal et que le numéro d'homologation dudit appareil n'est pas précisé, dès lors que cette carence ne résulte que d'une erreur matérielle de dactylographie qui ne crée aucun doute sur la validité de l'appareil eu égard aux autres mentions du procès-verbal" et qu' "en effet, l'indication portée au procès-verbal que la prochaine date de vérification devra intervenir en novembre 2004 et que la vérification a été effectuée par le laboratoire d'essais national à Paris est suffisante pour s'assurer de la conformité de l'appareil litigieux" ;
"1 ) alors que l'état alcoolique caractérisé par la présence dans l'air expiré d'un taux d'alcool égal ou supérieur à 0,40 mg par litre ne peut être constaté que, par un dépistage effectué au moyen d'un éthylomètre conforme à un type homologué par le ministre chargé de la Santé Publique, conformément à l'article R. 234-2 du code de la route ; que, s'il n'est pas établi que l'éthylomètre est conforme à un type homologué, le prévenu ne peut légalement être déclaré coupable du délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique prévu et réprimé à l'article L. 234-1, 1 , du même code ;
qu'en l'espèce, il ne résulte pas du procès-verbal de constatation de l'état alcoolique ni d'aucune autre pièce de la procédure que l'éthylomètre utilisé ait été conforme à un type homologué et que l'indication portée au procès-verbal que la prochaine vérification devra intervenir en novembre 2004 et qu'une vérification a été effectuée par le laboratoire d'essais national à Paris n'est pas de nature à établir que l'éthylomètre est conforme à un modèle homologué ;
"2 ) alors que l'état alcoolique caractérisé par la présence dans l'air expiré d'un taux d'alcool égal ou supérieur à 0,40 mg par litre ne peut être constaté que par un dépistage effectué au moyen d'un éthylomètre en cours de validité, c'est-à-dire ayant été soumis, dans l'année (ou, dans certains cas, les deux années) ayant précédé l'interpellation du prévenu, à une vérification par un laboratoire spécialisé désigné par le ministre chargé de l'Industrie, conformément aux article 1er, 30 et 31 du décret du 3 mai 2001 et 13 de l'arrêté du 8 juillet 2003 suscités ; que, s'il n'est pas établi que l'éthylomètre est en cours de validité, le prévenu ne peut légalement être déclaré coupable du délit de conduite sous l'empire d'un état alcoolique prévu et réprimé à l'article L. 234-1, 1 , du code de la route ; qu'en l'espèce, il ne résulte pas du procès-verbal de constatation de l'état alcoolique ni d'aucune autre pièce de la procédure que l'éthylomètre utilisé ait été en cours de validité et que l'indication portée au procès-verbal que la prochaine vérification devra intervenir en novembre 2004 et qu'une vérification ait été effectuée par le laboratoire d'essais national à Paris n'est pas de nature à établir que l'éthylomètre a été soumis à la vérification périodique prévue par les textes précités" ;
Vu les articles L. 234-4 , L. 234-5 et R. 234-2 du code de la route, 593 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes qu'en matière de conduite sous l'empire d'un état alcoolique, la recherche de la concentration d'alcool par l'analyse de l'air expiré est réalisée au moyen d'un appareil conforme à un type homologué et soumis à des vérifications périodiques ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que François X... a été poursuivi pour conduite sous l'empire d'un état alcoolique caractérisé par la présence dans l'air expiré d'un taux d'alcool de 0,82 milligramme par litre ; que, pour relaxer le prévenu, le tribunal a considéré que l'absence, dans le procès-verbal, de toute mention sur l'homologation de l'éthylomètre ainsi que sur sa dernière date de vérification ne lui permettait pas de s'assurer du bon fonctionnement de l'appareil ;
Attendu que, pour infirmer le jugement et retenir la culpabilité de l'intéressé, l'arrêt énonce que les omissions relevées par la première juridiction ne résultent que d'une erreur matérielle de dactylographie ; que les juges du second degré ajoutent que les mentions au procès-verbal de la prochaine date de vérification ainsi que du nom du laboratoire ayant effectué la précédente vérification attestent de la conformité de l'appareil litigieux ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner le second moyen de cassation proposé ;
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Chambéry, en date du 21 juillet 2005, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Grenoble, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Chambéry et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Ponroy conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Krawiec ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;