AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Pau, 7 novembre 2004), et les pièces de la procédure, que M. X..., ressortissant angolais en possession d'un passeport dont le visa Schengen était expiré, a été contrôlé au poste frontière franco-espagnol de Biriatou à bord d'un autocar assurant la liaison Bruxelles-Porto, et placé en garde à vue pour infraction à la législation sur les étrangers ; que le préfet des Pyrénées-Atlantiques a pris à son encontre un arrêté de reconduite à la frontière et une décision de maintien en rétention dans un local ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; qu'accueillant l'exception de nullité de la procédure soulevée par l'étranger, le juge des libertés et de la détention a rejeté la requête du préfet aux fins de prolongation du maintien en rétention ;
Attendu que M. X... fait grief à l'ordonnance attaquée, qui a statué sur l'appel interjeté par le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Bayonne, d'avoir infirmé cette décision et ordonné la prolongation de sa rétention administrative, alors, selon le moyen, qu'en violation de l'article 7 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et de l'article 63-1 du Code de procédure pénale, il n'a pas été immédiatement informé de la nature de l'infraction sur laquelle portait l'enquête nécessitant son placement en garde à vue ; que la notification des droits doit être immédiate et régulière, une éventuelle irrégularité ne pouvant être couverte par une notification postérieure ; que le juge du fond a validé la procédure sans relever quelles étaient les circonstances insurmontables qui avaient empêché l'officier de police judiciaire de contacter et trouver un interprète en langue portugaise, langue qui ne peut être considérée, du moins dans le ressort de la cour d'appel de Pau, comme une langue rare ; qu'admettre que la notification des droits de la personne gardée à vue effectuée par le biais d'un document rédigé dans une langue comprise par l'intéressé est régulière, alors qu'un tel mode de notification des droits ne permet pas à l'intéressé de les exercer, reviendrait à vider de toute substance les dispositions des articles 63-2 à 63-4 du Code de procédure pénale ; qu'une atteinte aux droits de M. X... a donc été commise lors de son placement en garde à vue qu'aucune circonstance insurmontable ne permet de justifier ;
Mais attendu que, selon l'article 63-1, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, toute personne placée en garde à vue est immédiatement informée par un officier de police judiciaire, ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, de la nature de l'infraction sur laquelle porte l'enquête, des droits mentionnés aux articles 63-2, 63-3 et 63-4 ainsi que des dispositions relatives à la durée de la garde à vue prévues par l'article 63 ; que, selon l'alinéa 3 de ce texte, ces informations doivent être communiquées dans une langue que la personne gardée à vue comprend, le cas échéant au moyen de formulaires écrits ;
Et attendu que pour déclarer la procédure régulière, l'ordonnance retient que l'intéressé a été placé en garde à vue le 4 novembre 2004 à 0 heure 45, que le procès-verbal mentionne que les services de police ont aussitôt pris attache avec un interprète en langue portugaise, sans résultat, et que dans l'attente, il lui a été remis un exemplaire de ses droits de gardé à vue en langue portugaise, et que, dès lors, il a reçu notification de ses droits dès qu'il a été placé en garde à vue, par cette note ;
Qu'il résulte, en outre, du dossier que l'officier de police judiciaire, qui avait placé M. X... en garde à vue pour des faits d'infraction à la législation sur les étrangers, a, par une mention de "carence", relaté les diligences infructueuses qu'il avait immédiatement effectuées auprès de deux interprètes en langue portugaise nommément désignés, qu'au moyen d'un formulaire écrit en cette langue comprise par l'étranger qui a signé ce document, il lui a communiqué les informations exigées relatives à ses droits en garde à vue et à la durée de celle-ci, et qu'à 9 heures 30, il a à nouveau, par le truchement d'un des interprètes en langue portugaise arrivé au service de police, notifié par un procès-verbal signé de l'intéressé, son placement en garde à vue pour les nécessités de l'enquête en raison d'une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'il avait commis une infraction à la législation sur les étrangers, en lui rappelant les droits y afférents ;
D'où il suit qu'en raison de ces informations données au moyen d'un formulaire écrit dans une langue comprise par l'étranger, ainsi que de l'impossibilité, du fait de ces circonstances insurmontables, de faire appel immédiatement à un interprète en langue portugaise lors du placement en garde à vue de l'intéressé, le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille six.