AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X... et Mme Y..., mariés sous le régime de la séparation de biens en 1980 ont acquis, en indivision, chacun pour moitié, une propriété sise à Sauchy-Lestrée moyennant le prix de 500 000 francs payé comptant dont 450 000 francs au moyen d'un prêt bancaire ; qu'ils ont divorcé suivant jugement du 19 octobre 1993 ;
que Mme Y... a demandé et obtenu que l'immeuble lui soit attribué à titre préférentiel ;
Sur le troisième moyen, pris en ses quatre branches tel qu'exposé au mémoire en demande et annexé au présent arrêt :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'il était redevable à l'égard de Mme Y... d'une somme de 215 276,88 francs (32 818,74 euros), comprenant une somme de 59 893 francs (13 695,94 euros) correspondant à la moitié du coût de l'installation de chauffage central ;
Attendu, d'abord, que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que, sans dénaturer les conclusions de M. X..., la cour d'appel a relevé que ce dernier n'établissait pas l'existence d'un équipement de chauffage antérieur à l'installation financée par l'épouse ;
ensuite, que c'est sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel a retenu qu'il appartenait à M. X... de prouver, d'une part, le caractère contestable de la facture litigieuse émanant de la société Equip Froid, d'autre part, que celle-ci n'avait pas été acquittée par Mme Y... ; enfin, que c'est par une décision motivée prenant en compte le constat d'huissier du 1er mars 1994 et l'expertise réalisée le 8 avril 1994 par M. Z..., notaire, que la cour d'appel a souverainement estimé que les travaux litigieux étaient nécessaires à la conservation du bien ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le cinquième moyen, tel qu'exposé au mémoire en demande et annexé au présent arrêt :
Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant à voir juger qu'il avait droit à indemnité pour avoir réglé au Crédit agricole une somme de 14 500 francs après divorce ;
Attendu que sous couvert d'un grief de défaut de réponse à conclusions, le moyen critique une omission de statuer sur un chef de demande ;
Que l'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du nouveau Code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles 254, dans sa rédaction alors applicable, et 1542 du Code civil ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande d'attribution préférentielle de l'immeuble de Sauchy-Lestrée, l'arrêt retient que celui-ci ne remplit pas les conditions résultant de la combinaison des articles 1542 et 832 du Code civil, au contraire de Mme Y... qui habitait dans l'immeuble au moment de l'introduction de la procédure de divorce et qui y habite toujours ;
Qu'en statuant ainsi alors que la non-résidence de M. X... dans l'immeuble au jour de l'assignation, était la conséquence de l'ordonnance de non-conciliation, mesure provisoire qui avait autorisé les époux à résider séparément et qui ne pouvait avoir pour effet de préjuger de l'attribution préférentielle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le deuxième moyen :
Vu les articles 815 et 815-13 du Code civil ;
Attendu que pour dire M. X... redevable à l'égard de Mme Y... d'une somme de 215 276,85 francs (32 818,74 euros) comprenant une somme de 114 600 francs (17 379,19 euros) réglée par Mme Y... lors de l'achat de la maison indivise de Sauchy-Lestrée, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que M. X... ne conteste pas que Mme Y... a effectué deux versements d'un montant respectif de 64 600 francs et 50 000 francs et que les paiements sont justifiés par la production de deux chèques en copie et des reçus de la SCP Blancpain-Gorfinkel ;
Qu'en statuant ainsi alors que l'immeuble ayant été acquis en indivision, par moitié entre les deux époux et la somme de 114 600 francs ayant été versée par Mme Y... pour le compte des deux époux, M. X... n'était redevable envers celle-ci que de la moitié de cette somme soit 57 300 francs (8 735,33 euros), la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :
Vu les articles 4, 5 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour débouter M. X... de sa demande tendant à voir juger qu'il avait droit à une indemnité pour avoir réglé pendant la vie commune les mensualités du Crédit agricole, soit une somme de 265 895 francs, l'arrêt retient que M. X..., qui énonce in fine avoir droit à récompense pour la somme de 265 895 francs réglée de ses propres deniers au titre des remboursements de prêt contractés, ne fournit aucune argumentation à l'appui de cette affirmation et ne justifie pas de cette prétention ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'il résulte de la procédure que les relevés du compte en banque de M. X... pour la période courant d'octobre 1989 à juin 1993 avaient été produits sur ordonnance du président du tribunal de grande instance de Douai, la cour d'appel, en affirmant que le mari n'avait fourni aucune argumentation et ne justifiait pas de cette prétention, a méconnu l'objet du litige et privé sa décision de motifs, violant ainsi les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que l'immeuble indivis entre M. X... et Mme Y... ferait l'objet d'une attribution préférentielle au profit de cette dernière, que M. X... était redevable à l'égard de Mme Y... d'une somme de 215 276,85 francs (32 818,74 euros) comprenant une somme de 114 000 francs (17 379,19 euros) réglée par Mme Y... lors de l'achat de la maison indivise de Sauchy-Lestrée et en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande tendant à voir juger qu'il avait droit à indemnité pour avoir réglé pendant la vie commune les mensualités du prêt du Crédit agricole, soit une somme de 265 895 francs, l'arrêt rendu le 7 avril 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix mai deux mille six.