AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause les sociétés Axa France et Axa Courtage ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 7 juin 2004) que la société Bertheau immobilier Saint-Louis (la société Bertheau) a acquis de la société Ranchère, lotisseur, des terrains viabilisés sur lesquels elle a édifié des pavillons pour les revendre ; que M. X... a été investi d'une mission de maître d'oeuvre limitée ; que M. Y..., assuré auprès de la SMABTP, est intervenu pour réaliser des ouvrages d'étanchéité ; que des problèmes d'infiltrations étant survenus et ayant occasionné plusieurs sinistres, la société Bertheau a assigné la société Ranchère en restitution d'une partie du prix de vente sur le fondement de la garantie des vices cachés et également, en tant que lotisseur, avec les autres constructeurs, en paiement de dommages-intérêts au titre de leur responsabilité civile professionnelle ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal de la société Bertheau et sur le premier moyen du pourvoi provoqué de la Société générale, réunis, ci-après annexés :
Attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le vice caché résidait dans l'insuffisance, au regard des constructions envisagées, du système d'évacuation des eaux pluviales mis en place par le lotisseur , la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui a souverainement retenu que la vente de terrains viabilisés, conclue entre un lotisseur et un promoteur pour son activité professionnelle consistant à acquérir des terrains en vue d'y construire des pavillons pour les revendre, était intervenue entre deux professionnels de l'immobilier, en a exactement déduit que la clause de non-garantie des vices cachés était valable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi principal et le deuxième moyen du pourvoi provoqué, réunis, ci-après annexés :
Attendu qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que les systèmes d'évacuation des eaux réalisés par la société Ranchere ne se sont révélés insuffisants qu'en raison de l'importance des surfaces imperméabilisées qui ont été prévues et effectivement construites par le promoteur sur chaque lot , et que le certificat de conformité du lotissement n'avait pas été refusé, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer une recherche sur la conformité du terrain à sa destination, que ses constatations rendaient inopérante, et qui a retenu que la société Bertheau avait accepté les risques du caractère inondable des terrains dont elle avait connaissance en décidant de mettre en oeuvre des travaux inadaptés à la nature même de ces terrains, a légalement justifié sa décision de ce chef ;
Sur les deux moyens du pourvoi incident de M. Y... et de la SMABTP, réunis, ci-après annexés :
Attendu, d'une part, qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que M. Y..., entrepreneur spécialisé en étanchéité, était intervenu en toute connaissance de cause, après l'apparition des premiers désordres, pour mettre en oeuvre un procédé supposé garantir une étanchéité totale des sous-sols, la cour d'appel, qui a retenu que M. Y... avait manqué à ses obligations contractuelles en n'ayant pas imperméabilisé le niveau enterré des immeubles contrairement aux engagements contenus dans son devis, et que cette faute , qui avait entraîné un nouveau sinistre en décembre 1993 et des difficultés de commercialisation, avait participé à la réalisation du dommage, a pu retenir une part de responsabilité à la charge de M. Y..., compte tenu de la mission qui lui avait été confiée, du résultat escompté et de la participation du maître d'ouvrage à son propre dommage ;
Attendu, d'autre part, que la cour d'appel ne s'étant pas fondée sur l'article 1792 du Code civil et n'ayant constaté ni la compétence notoire de la société Bertheau en matière d'étanchéité ni son immixtion dans les travaux réalisés par M. Y..., le moyen manque en fait de ce chef ;
Mais sur les troisièmes moyens du pourvoi principal et du pourvoi provoqué, réunis :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu que pour exclure tout manquement de M. X... à son devoir de conseil l'arrêt retient que le choix de pavillons semi enterrés n'a pas été imposé par l'architecte mais résulte d'un échange avec le maître de l'ouvrage et d'un parti-pris esthétique en relation avec les pavillons de standing souhaités par ce dernier et qu'il ne saurait lui être fait grief de ne pas avoir pris en compte les arrêtés municipaux des 10 décembre 1991 et 14 février 1992 ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'architecte s'était renseigné sur la nature du terrain et avait informé le maître d'ouvrage de toutes les contraintes de construction qui en résultaient compte tenu du projet choisi, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, l'arrêt mais seulement en ce qu'il déboute la société Bertheau de ses demandes contre M. X... et fixe la part de responsabilité de la société Bertheau, de la SCP Silvestri-Baujet ès-qualités de liquidateur de l'entreprise Art'Co, et de M. Y..., l'arrêt rendu le 7 juin 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens des pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. X... à payer 2.000 euros à la Société Générale ; Rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six avril deux mille six.