AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 28 janvier 2005 ), que M. et Mme X... ont assigné M. Y..., avoué à la cour, devant un juge des référés pour obtenir la remise des expéditions revêtues de la formule exécutoire de deux arrêts de cour d'appel rendus dans des affaires où ils étaient représentés par cet avoué ; que M. Y... s'est opposé à la demande en invoquant le droit de rétention que lui accorde l'article 6 du décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 pour garantir le paiement de ses déboursés et émoluments tarifés ;
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de les avoir déboutés de leur demande, alors, selon le moyen :
1 / que si, pour garantir le paiement de ses déboursés et de ses émoluments tarifés, à l'exclusion des honoraires, l'avoué dispose d'un droit de rétention tant sur les actes qu'il a faits et les pièces à lui remises pour soutenir le procès, que sur les titres qu'il s'est procurés au cours de la procédure, ce droit de rétention ne saurait être étendu à l'arrêt revêtu de la formule exécutoire, qui ne saurait constituer un titre que l'avoué se serait procuré au cours de la procédure ; qu'en l'espèce, il est constant que M. Robert X... et Mme Colette Z... ont demandé à leur avoué de leur délivrer l'expédition revêtue de la formule exécutoire de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles le 14 janvier 2004 dans le cadre de la procédure enregistrée sous le numéro 03/02791 ; que l'avoué a refusé de faire droit à cette demande en exigeant le paiement préalable d'une somme de 1 558,63 euros, alors que, pourtant, il n'existait aucune créance certaine, liquide et exigible et qu'une partie de la somme réclamée correspondait à une procédure qui ne concernait ni M. Robert X..., ni Mme Colette Z... ; que, pour rejeter la demande de M. Robert X... et de Mme Colette Z... tendant à la remise par l'avoué de ces expéditions, la cour d'appel a considéré que l'avoué dispose d'un droit de rétention jusqu'au paiement des sommes qui lui sont dues (et) qu'un arrêt revêtu de la formule exécutoire est un "titre" que l'avoué s'est procuré au sens de cette disposition réglementaire ;
qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 6 du décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 ;
2 / que, celui qui se prévaut d'un droit de rétention doit justifier d'une créance certaine, liquide et exigible ; qu'en l'espèce, pour justifier le refus de délivrer à M. Robert X... et Mme Colette Z... l'expédition revêtue de la formule exécutoire de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Versailles le 14 janvier 2004 dans le cadre de la procédure enregistrée sous le numéro 03/02791, l'avoué a prétendu qu'en l'absence de règlement préalable d'une somme de 1 558,63 euros, il entendait exercer son droit de rétention ; que M. Robert X... et Mme Colette Z... ont alors fait valoir qu'il n'existait aucune créance certaine, liquide et exigible et qu'une partie de la somme réclamée correspondait à une procédure qui ne les concernait ni l'un, ni l'autre ;
qu'ils ont en conséquence saisi le conseiller taxateur ; qu'il s'ensuivait que la "créance" de l'avoué n'était ni certaine, ni exigible, ni liquide ; que, pour rejeter la demande de M. Robert X... et de Mme Colette Z... tendant à la remise par l'avoué des expéditions des arrêts rendus le 14 janvier 2004, la cour d'appel a considéré que le fait, pour les époux X..., d'exiger que la créance de leur avoué soit certaine et exigible après examen de leurs recours portés devant le premier président de la cour d'appel contre les ordonnances de taxe conduirait à méconnaître le droit de rétention dont dispose l'avoué ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les principes relatifs au droit de rétention, ensemble l'article 6 du décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 ;
3 / que si, pour garantir le paiement de ses déboursés et de ses émoluments tarifés, à l'exclusion des honoraires, l'avoué dispose d'un droit de rétention tant sur les actes qu'il a faits et les pièces à lui remises pour soutenir le procès, que sur les titres qu'il s'est procurés au cours de la procédure, il doit préalablement informer sa chambre de discipline de l'exercice de son droit ; que, dans leurs écritures d'appel M. Robert X... et Mme Colette Z... faisaient valoir que l'avoué n'a pas justifié avoir informé la chambre de discipline de son prétendu droit de rétention ; qu'en rejetant la demande de M. Robert X... et de Mme Colette Z... tendant à la remise par l'avoué des expéditions des arrêts rendus le 14 janvier 2004, sans rechercher si l'avoué avait bien informé sa chambre de discipline de l'exercice de son droit de rétention, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 6 du décret n° 80-608 du 30 juillet 1980 ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. Y... réclamait le paiement de débours et émoluments vérifiés par le greffier, l'arrêt retient exactement que le caractère certain, liquide et exigible de la créance n'est pas affecté par le recours formé devant le premier président et qu'un arrêt revêtu de la formule exécutoire constitue un titre sur lequel le droit de rétention prévu par l'article 6 du décret du 30 juillet 1980 peut être exercé ; que par ces seuls motifs, la décision est légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de M. et Mme X... ; les condamne, in solidum, à payer à M. Y... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille six.