AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye a ordonné, à la requête de la société Crédit foncier de France (la société CFF), la saisie des rémunérations de M. X... entre les mains de son employeur, la société Paris Saint-Germain football (la société PSG) à laquelle cette saisie a été régulièrement notifiée ; que M. X... ayant quitté la société PSG, pour l'association sportive Saint-Etienne puis l'association Montpellier-Hérault sporting club, la société CFF a requis chaque fois la poursuite de la saisie ; que par lettre reçue le 22 octobre 2001, le greffe du tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye a été informé par l'association Montpellier Hérault sporting club de ce que M. X... avait quitté ce club pour rejoindre à nouveau la société PSG à compter du 1er août 2001 ;
que le tribunal d'instance a maintenu la procédure de saisie, accueillant, sous forme d'interventions, dont il a donné avis à la société PSG, les requêtes de nouveaux créanciers de M. X..., dont les sociétés BNP Paribas, Société générale et Sofinco (les banques); que la société PSG n'ayant procédé à aucun versement, le même Tribunal, par ordonnance du 16 septembre 2002, l'a déclarée personnellement débitrice d'une certaine somme ; que la société PSG ayant formé opposition à cette ordonnance, le Tribunal l'a déclarée personnellement débitrice des dettes de M. X..., figurant dans le dossier de saisie à la date du 16 septembre 2002 ; qu'elle a interjeté appel ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche, du pourvoi principal et sur le moyen unique de chacun des pourvois incidents, qui sont semblables :
Attendu que la société CFF et les banques font grief à l'arrêt d'avoir déclaré nulle l'ordonnance du 16 septembre 2002, alors, selon le moyen, qu'en cas de changement d'employeur, la saisie des rémunérations ne prend fin qu'au cas où les créanciers saisissants s'abstiennent, pendant un an après l'avis donné par l'ancien employeur, de demander la poursuite de la saisie ; que pendant cette période, il est loisible aux créanciers munis d'un titre exécutoire de se joindre à la procédure par voie d'intervention et de solliciter la poursuite de la saisie entre les mains du nouvel employeur, lequel, à défaut de tout versement entre les mains des créanciers, peut alors faire l'objet d'une ordonnance de contrainte ; qu'en l'espèce, en considérant qu'à compter du 22 octobre 2001, date à laquelle le Tribunal avait été informé de l'ultime changement d'employeur, la saisie avait été interrompue de telle sorte que le Tribunal ne pouvait plus accueillir les nouvelles requêtes de créanciers sous forme de simple intervention et constater la poursuite de la saisie à l'initiative de ces derniers (pour ensuite prononcer une ordonnance de contrainte à l'encontre de la société PSG, tiers saisi, à raison de l'absence de tout versement), la cour d'appel a violé les articles R. 145-26 et R. 145-39 du Code du travail ;
Mais attendu que la société CFF, n'étant pas un créancier intervenant, n'est pas recevable, faute de qualité, à soutenir le moyen ;
Et attendu qu'un créancier ne peut intervenir à une procédure de saisie des rémunérations que si celle-ci est en cours ;
qu'ayant relevé que la saisie des rémunérations engagée par la société CFF à l'encontre de M. X... était interrompue à compter du 22 octobre 2001, en raison du changement d'employeur, et non reprise aux dates d'envoi des requêtes des banques, la cour d'appel a décidé à bon droit que ces requêtes ne pouvaient être accueillies sous forme d'interventions, qu'elles n'étaient pas opposables à la société PSG et que l'ordonnance du 16 septembre 2002 était nulle en tant qu'elle portait sur des sommes revendiquées par les banques ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deuxième et troisième branches :
Vu les articles L. 145-9, R. 145-24 et R. 145-39 du Code du travail ;
Attendu que pour déclarer nulle l'ordonnance du 16 septembre 2002, en tant qu'elle portait sur des sommes dues au titre de la période antérieure au 25 octobre 1999, date de départ de M. X... pour l'association sportive Saint-Etienne, l'arrêt retient qu'à compter du 22 octobre 2002, la saisie est devenue caduque, faute d'une demande de poursuite, que de ce fait, le tribunal d'instance de Saint-Germain-en-Laye n'était plus saisi de la procédure et n'avait plus pouvoir de rendre une ordonnance de contrainte à l'encontre de la société PSG, même pour sanctionner la carence de cette société dans le cadre de la procédure de saisie antérieure au 25 octobre 1999 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle constatait que l'ordonnance en cause avait été rendue antérieurement au 22 octobre 2002 et à une date où la saisie était simplement interrompue, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré nulle l'ordonnance du 16 septembre 2002 pour les sommes revendiquées par la société Crédit foncier de France au titre de la période antérieure au 25 octobre 1999, l'arrêt rendu le 12 février 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette toutes des demandes présentées de ce chef ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six avril deux mille six.