AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les deux moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 27 février 2003), que Mme X... a été victime d'un accident de la circulation dont M. Y... a été déclaré responsable ; que par arrêt du 13 juin 2001, la cour d'appel de Paris a procédé à l'évaluation de son préjudice corporel et a condamné M. Y... et son assureur, la Mutuelle des motards, au paiement d'une certaine somme ; que Mme X... leur ayant fait délivrer un commandement aux fins de saisie-vente, M. Y... et la Mutuelle des motards ont saisi le juge de l'exécution pour obtenir l'annulation de ce commandement en ce qu'il incluait dans la créance une somme représentant les intérêts prévus par l'article L. 211-13 du Code des assurances ; que le juge ayant fait droit à cette demande, M. Y... et la Mutuelle des motards ont interjeté appel ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que les intérêts prévus par les articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des assurances n'étaient pas dus, à défaut de décision de justice, et d'avoir, à due concurrence des intérêts fondés sur l'article L. 211-13 du Code des assurances, annulé le commandement de payer aux fins de saisie-vente en date du 2 avril 2003, alors, selon le moyen :
1 / que les intérêts prévus à l'article L. 211-13 du Code des assurances en l'absence d'offre de l'assureur dans les délais requis, sont assis sur l'indemnité allouée par le juge et sont dus de plein droit ; qu'ils constituent un effet de la décision statuant sur l'indemnité et que cet effet se produit sans qu'il soit besoin que le bénéficiaire en forme la demande ;
qu'en décidant le contraire, les juges du second degré ont violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des assurances, ensemble les règles gouvernant les effets des décisions de justice ;
2 / que, si un différend survient entre les parties quant au mode de calcul des intérêts ou si l'assureur estime pouvoir soutenir que l'absence d'offre est imputable à des circonstances qui lui sont étrangères et obtenir par suite une réduction des intérêts, ces contestations, qui touchent aux effets de la décision de justice, ressortissent à la compétence du juge de l'exécution ; qu'en déclinant sa compétence pour se prononcer sur ces contestations, les juges du second degré, qui intervenaient comme juge de l'exécution, ont violé les articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des assurances, ensemble l'article L. 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire ;
3 / que, dès lors que les contestations élevées par M. Y... et la Mutuelle des motards avaient été formulées à l'occasion d'actes d'exécution - la demande visait à l'anéantissement d'un commandement aux fins de saisie-vente - les juges du second degré, en tant que juge de l'exécution, étaient tenus de se prononcer sur les intérêts dus sur le fondement des articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des assurances, peu important que les contestations en cause puissent toucher au fond du droit ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles L. 211-9 et L. 211-13 du Code des assurances, ainsi que de l'article L. 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire ;
Mais attendu que le juge de l'exécution ne peut être saisi de difficultés relatives à un titre exécutoire qu'à l'occasion des contestations portant sur les mesures d'exécution forcée engagées sur le fondement de ce titre ;
Et attendu que l'arrêt retient que les intérêts prévus par l'article L. 211-13 du Code des assurances ont un caractère de pénalité, confirmé par la possibilité d'en solliciter la réduction en raison de circonstances non imputables à l'assureur ; que même si la Mutuelle des motards ne prétend pas avoir effectué une offre conforme et dans le délai requis, la formule selon laquelle l'indemnité produit intérêts de plein droit au double du taux de l'intérêt légal, à compter du délai de 8 mois de l'accident et jusqu'au jour du jugement devenu définitif, ne dispense pas, pour poursuivre le recouvrement forcé de ces intérêts doublés, alors qu'une question d'assiette est au surplus posée, d'une condamnation spécifique, laquelle ne peut être prononcée par le juge de l'exécution dont le rôle n'est pas de délivrer un titre exécutoire complémentaire ;
Qu'en l'état de ces constatations et énonciations, dont il résulte que la contestation opposant les parties sur l'application de l'article L. 211-13 du Code des assurances n'était pas apparue à l'occasion d'une mesure d'exécution forcée, la cour d'appel a fait l'exacte application de l'article L. 311-12-1 du Code de l'organisation judiciaire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de Mme X... d'une part, de la Mutuelle des motards et de M. Y..., d'autre part ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf mars deux mille six.