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22/03/2006 | FRANCE | N°05-82897

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 mars 2006, 05-82897


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mars deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gérard,

- Y... Christian,

- Z... Paul,

- LA SOCIETE LES VIGNOBLES DU COMTAT,

contre l'arrêt de l

a cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 29 mars 2005, qui, pour infractions à la lé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux mars deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller ROGNON, les observations de la société civile professionnelle PEIGNOT et GARREAU et de Me FOUSSARD, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gérard,

- Y... Christian,

- Z... Paul,

- LA SOCIETE LES VIGNOBLES DU COMTAT,

contre l'arrêt de la cour d'appel de NIMES, chambre correctionnelle, en date du 29 mars 2005, qui, pour infractions à la législation sur les contributions indirectes et à la réglementation organisant le marché du vin, les a solidairement condamnés à des amendes et pénalités fiscales ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, le 19 janvier 2001, des agents des douanes ont procédé à l'inventaire des chais de la société Les Vignobles du Comtat, dirigée par Christian Y..., producteur-récoltant dans la zone géographique de l'appellation d'origine contrôlée (AOC) "Côtes du Rhône"(CDR) ; qu'ils ont constaté des excédents de vin par rapport aux déclarations de récolte et l'absence de tout document justifiant l'achat et la circulation de vin ou de vendange fraîche que la société avait été autorisée à ajouter à sa récolte pour en améliorer la qualité dans la limite de la tolérance administrative de 5 %; qu'ils ont ainsi relevé, au titre de la campagne 1997-1998, qu'elle avait vinifié la vendange cédée par Paul Z... qui l'avait faussement déclarée logée en cave particulière, sans en déclarer la vinification par un tiers; que, pour l'exercice suivant, la société avait ajouté à sa récolte la vendange vendue dans les mêmes conditions par Paul Z..., celle représentant la part apportée par Gérard X... en se prévalant d'un bail fictif, et du vin d'AOC rosé; qu'enfin, pour la campagne 1999-2000, la société avait acquis le raisin vendangé par Gérard X... qui avait pourtant déclaré vinifier lui-même cette récolte ;

Attendu que la société les Vignobles du Comtat, son gérant Christian Y..., Paul Z... et Georges X... ont été poursuivis, les deux premiers pour fausses déclarations de récolte, circulation de vin et de vendange sans titre de mouvement, défaut de paiement du droit de circulation et infraction à la réglementation sur la qualité du vin en dépassant le rendement à l'hectare autorisé pour l'appellation, les délits portant sur 242, 255 et 152 hectolitres de vin d'AOC, Paul Z... pour circulation sans titre de mouvement de 242 et 255 hectolitres de ce vin et Gérard X... pour circulation sans titre de mouvement pour 152 hectolitres de Côtes du Rhône ;

En cet état :

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 302 M, 407, 438, 466, 169 bis annexe III, 267 octies annexe Il, 1791, 1794-3, 1799-3, 1804 du Code général des impôts, L. 80 A et L. 80 B, L. 272 du Livre des procédures fiscales, décret n° 74-872 du 19 octobre 1974 , décret n° 93-1067 du 10 septembre 1993, 111-4, 121-1, 121-2, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de la procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal correctionnel de Carpentras du 15 avril 2004 ayant déclaré la société Les Vignobles du Comtat et Christian Y... coupables de fausse déclaration de récolte 1997/1998, infraction à la réglementation sur l'amélioration de la qualité du vin et fausse déclaration de récolte 1998/1999, coupables d'infractions de circulation sans titre de mouvement et défaut de paiement des droits de circulation pour les campagnes 1997-1998 (242 hectolitres d'AOC CDR), 1998-1999 (255 hectolitres d'AOC CDR) et 1999-2000 (152 hectolitres d'AOC CDR) ;

"aux motifs que :

"I) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1997/1998 : que les poursuites visaient Paul Z..., la société du Comtat et Christian Y... pour fausse déclaration de récolte, infraction à la réglementation sur l'amélioration de la qualité des vins, circulation sans titre de mouvement de 242 hectolitres d'AOC Côtes du Rhône et défaut de paiement du droit de circulation ; que, force est d'abord de constater que les premiers juges ont statué sur la responsabilité pénale de Christian Y..., pris en qualité de gérant statutaire de la société du Comtat, en rappelant à bon droit qu'un gérant statutaire doit s'assurer du respect de la réglementation en matière de contributions indirectes ;

qu'en matière de délégation de pouvoirs, censée avoir été consentie à Pierre A..., le constat négatif effectué par les premiers juges demeure valable car, hormis l'absence de délégation expresse, le prévenu Christian Y..., gérant statutaire, ne saurait tirer argument d'une prétendue délégation permanente issue du contrat de régisseur du domaine, chargé d'assurer la bonne marche de l'exploitation agricole, ou encore, d'entretenir (dans le cadre de la gestion du personnel) toutes relations nécessaires avec les administrations sociales agricoles auxquelles les douanes et contributions indirectes ne sauraient être assimilées ; que ces observations vaudront pour les autres campagnes (1998/1999 et 1999/2000) de même que pour la responsabilité pénale de la société gérée par Christian Y..., responsabilité désormais étendue aux contributions indirectes, comme pour toute autre personne morale ;

qu'en l'occurrence, cette société a acheté à Paul Z... la totalité de la récolte AOC de celui-ci (248 hI), certes au bénéfice d'une autorisation administrative du 21 avril 1998 accordée pour l'amélioration de sa récolte 1997 en AOC Côtes du Rhône rouge et sur une base quantitative de 5% ; que, toutefois, cette quantité n'apparaissait pas pour autant sur la déclaration de récolte 1997 de la société tandis que le vendeur déclarait que sa propre récolte était logée en cave particulière ; qu'en matière d'emploi en vinification de vendanges ou de vins d'achat, la lettre autographiée n° 2958 du 20 janvier 1941 disposait notamment que les viticulteurs étaient autorisés, sans être assujettis au régime des marchands en gros, à utiliser en vinification des vendanges moûts ou vins d'achat destinés à améliorer la qualité de leur récolte dans la limite de 5% de la récolte, les produits d'achat étant soumis au droit de circulation et devant parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés ; que ce document conférait expressément un caractère permanent à cette "tolérance" ; que l'achat effectué par la société au bénéfice de cette tolérance ayant porté sur la totalité de la récolte de Z... en vendanges fraîches, il incombait à ce vendeur de le déclarer comme tel et non pas comme une récolte logée en cave particulière ; que, toutefois, la décision de relaxe visant Z... de ce chef mérite confirmation en l'état de la double constatation faite par le tribunal de l'exactitude de la quantité et de l'absence de preuve rapportée de manoeuvres destinées à frauder, comme l'exigeait l'article 1791 du Code général des impôts ; que, sur les déclarations de culpabilité contestées par la société Vignobles du Comtat et Christian Y..., le défaut de mention relative aux 242 hectolitres dans la colonne correspondant au type de vin à améliorer ne pouvait qu'être constaté ;

qu'en outre, le grief tiré d'une référence illégale à la notion de rendement, voire aux dispositions réglementaires résultant du décret du 10 septembre 1993 ne résiste guère à l'examen ; que, s'agissant de l'amélioration de la qualité du vin, il demeure que ce texte de portée générale pose en toute hypothèse pour les vins d'AOC un plafond limite de production par rapport à la superficie plantée et ce avec pour objectif constant d'assurer en permanence la qualité de la production susceptible de bénéficier de cette appellation ; qu'une telle exigence est parfaitement compatible, en droit comme en fait, avec la tolérance à caractère permanent dont se prévalent les appelants ; que, bien au contraire et s'agissant précisément d'une "tolérance", l'interprétation stricte dont ils se réclament vise au premier chef la portée de la lettre autographiée de 1941 laquelle, de surcroît se référait justement au "relèvement de la richesse alcoolique" des récoltes ; que la vinification des 5% achetés en vendanges fraîches n'a donc pas fait l'objet d'une déclaration régulière et n'a pas davantage été prise en compte pour le calcul du plafond limitant la production en vin AOC fixé par décret du 10 septembre 1993 ; que le jugement entrepris doit par conséquent recevoir confirmation sur ce plan comme, par ailleurs, en ce qu'il a relaxé Paul Z... en l'absence de preuve dûment rapportée d'élément intentionnel, conforme aux exigences de l'article 1791 précité, l'Administration présumant ici d'une connivence ; qu'enfin et sur les droits de circulation pour la campagne 1997/1998 sur 242 hectolitres dAOC CDR, la lettre autographiée de 1941 stipule expressément que les 5 % achetés dans le cadre de la tolérance fiscale y sont soumis et doivent parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés, sans possibilité de précompte ;

que les vendanges fraîches étant soumises au régime des vins entraînant le règlement d'un droit de circulation (articles466 et 438 du Code général des impôts), un titre de mouvement devait être sollicité par le récoltant Z... et les acheteurs et le droit acquitté ;

que ce délit formel étant par conséquent caractérisé, l'application des dispositions de l'article 1804 du Code général des impôts s'imposait ; que le jugement déféré évoque la production d'un congé 8135 établi a posteriori (le 14 février 2001) pour justifier la dispense "de peine" accordée aux trois prévenus de ce chef alors que l'article 469-1 du Code de procédure pénale est inapplicable aux "pénalités fiscales" ; qu'en conséquence, la réformation sollicitée par l'administration demanderesse s'impose à cet égard, les trois prévenus faisant l'objet de condamnations en amendes et pénalités proportionnelles, telles que fixées au dispositif du présent arrêt, et solidairement, en application de l'article 1799 A du Code général des impôts ;

"II) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1998/1999 : que les poursuites visaient Gérard X..., la société Vignobles du Comtat et Christian Y... pour circulation sans titre de mouvement de 123,03 hectolitres d'AOC Côtes du Rhône et fausse déclaration de récolte sur cette quantité ; que, d'autre part, Paul Z..., la SARL et Christian Y... étaient cités pour circulation sans titre de 255 hectolitres d'AOC CDR et fausse déclaration de récolte sur cette quantité ; qu'en premier lieu, les premiers juges ont dit à bon droit que les poursuites visant Gérard X..., la SARL et son gérant Christian Y... procédaient du postulat du caractère fictif attribué par l'Administration au contrat oral de bail à métayage ; que, sur ce point, la partie poursuivante et appelante se réfère de manière réductrice et formaliste à la notion de bail authentique ou d'usage notoire ; que la convention litigieuse précisait conformément à la volonté des parties, que le bail prendrait effet le 11 novembre 1997 pour neuf ans, tandis que, par courrier adressé après la vendange de 1998, la SARL ayant qualité de preneur confirmait au bailleur Gérard X... son accord sur la résiliation amiable ; que ni l'absence de date sur ce courrier de confirmation ni la résiliation anticipée convenue et acceptée en définitive par les deux parties contractantes ne permettent de qualifier de fictive ladite convention, que ce soit au regard du principe du consensualisme ou du droit rural ; qu'au demeurant, aucune preuve du caractère mensonger du motif tiré de l'inadéquation de la formule pour les deux contractants ou de l'assurance donnée au bailleur par le preneur de ce qu'il n'y aurait pas de saisine contentieuse au tribunal paritaire, n'a davantage été rapportée devant la Cour ; que la décision de relaxe conjointe est en voie de confirmation, étant observé à l'instar du tribunal, que les droits de circulation afférents aux 123,03 hectolitres récoltés dans ces conditions ont en tout état de cause été acquittés ; que, toutefois, il n'est pas inopportun de relever, à l'examen de ces deux chefs, que Christian Y... est d'autant moins recevable à se prévaloir d'une délégation de pouvoir permanente qu'il ne conteste pas avoir lui-même traité le bail au nom de la société, puis l'avoir résilié pour celle-ci, le régisseur Pierre A... ayant seulement été destinataire d'une copie du document ; qu'en second lieu et sur les 255 hectolitres d'AOC CDR rouge achetés à Paul Z... par la société gérée par Christian Y... lors de la campagne 1998/1999 :

que la réformation du jugement s'impose pour la dispense de peine impossible au sujet de la circulation sans titre de mouvement et les droits de circulation n'ayant été acquittés qu'à posteriori comme dans le cas précédent; qu'il s'ensuit que les trois prévenus feront l'objet d'une condamnation solidaire dans les termes fixés au dispositif du présent arrêt, l'article 469-1 du Code de procédure pénale étant inapplicable en la matière ;

que, pour des motifs identiques à ceux de la relaxe déjà confirmée pour Paul Z..., celui-ci ne pouvait davantage être retenu dans les liens de la prévention de fausse déclaration de récolte 1998 faute d'élément intentionnel prouvé ; que le jugement déféré mérite aussi confirmation à l'égard de la société Vignoble du Comtat et de Christian Y..., leur déclaration de récolte, comme celle de l'année précédente, ne mentionnant guère dans la colonne correspondant au type de vin à améliorer les 255 hectolitres achetés en AOC CDR rouge, l'infraction identique étant constituée dans les mêmes conditions ;

"III) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1999/2000 : que les poursuites visaient Gérard X..., la société du Comtat et Christian Y... pour fausse déclaration de récolte portant sur la vente de 152 hectolitres d'AOC CDR en vendanges fraîches et pour circulation sans titre et non paiement des droits ; qu'en premier lieu, il est constant qu'en dépit de cette vente consentie au bénéfice de la tolérance évoquée plus haut, Gérard X... a, comme le prévenu Paul Z..., déclaré une récolte logée en cave particulière ; que, nonobstant et au motif de la double constatation de l'exactitude de la quantité mentionnée et de l'absence persistante de preuve d'une volonté de fraude, sa relaxe sera maintenue ; qu'en cet état et après avoir exactement relaté que sur ce plan la responsabilité de la société et celle de son gérant étaient recherchées sur le fondement particulier de l'article 1799-3 du Code général des impôts, les premiers juges ont à bon droit relaxé ces prévenus insusceptibles d'être qualifiés de négociants complices, vue la relaxe d'un auteur principal présumé ; qu'en second lieu, les premiers juges ont dispensé de peine tous les prévenus dans la mesure où il était justifié du paiement des droits au moyen d'un congé de 4 473 francs ; que, comme dans les cas précédents, les vendanges cédées auraient dû faire l'objet d'un règlement des droits de circulation, ou à défaut, circuler en suspension des droits sous couvert d'un titre de mouvement ; que, pour sa part, la société les a réceptionnés sans titre, ce qui la rendait solidairement responsable de l'infraction ; que les dispositions de l'article 469-1 du Code de procédure pénale étant inapplicables en la matière, la société les Vignobles du Comtat et Christian Y... seront solidairement condamnés aux pénalités fiscales édictées au dispositif ;

"IV) enfin et sur la répression : que les amendes et pénalités proportionnelles déjà mises à la charge solidairement de la société et de Christian Y... (pour fausses déclarations de récoltes 1997/1998 et 1998/1999 et infraction sur l'amélioration de la qualité du vin) seront confirmées comme étant pleinement appropriées aux délits commis" ;

"alors, d'une part, que, pour être engagée, la responsabilité pénale de la personne morale doit avoir été spécialement prévue par le texte qui définit et réprime l'infraction de sorte qu'en statuant ainsi alors qu'en matière de fausses déclarations de récoltes, d'infractions à la réglementation sur l'amélioration de la qualité du vin et d'infractions de circulation sans titre de mouvement et défaut de paiement des droits de circulation, les articles 302 M, 407, 438, 466, 169 bis annexe III, 267 octies annexe Il, 1791, 1794-3, et 1804 du Code général des impôts, ne prévoient pas que les personnes morales puissent être déclarées responsables pénalement de ces délits, la cour d'appel a violé l'article 121-2 du Code pénal ;

"alors, d'autre part, qu'en matière d'emploi en vinification de vendanges ou de vins d'achat, la lettre autographiée n° 2.958 du 20 janvier 1941 prévoit que les viticulteurs sont autorisés sans être assujettis au régime des marchands en gros de boissons à utiliser en vinification des vendanges, moûts ou vins d'achat, destinés à améliorer la qualité de leur récolte, sans que les quantités de produits d'achat ne puissent dépasser 5 % de la récolte, cette tolérance présentant un caractère permanent et étant exclusive de toute référence à la notion de rendement d'AOC, de sorte qu'en estimant qu'en intégrant ces achats de récolte la société les Vignobles du Comtat aurait dépassé le plafond limite de classement par rapport à la superficie pour vin AOC Côtes du Rhône Rouge, la cour d'appel a violé les articles 111-4 du Code pénal, 407, 169 bis, 267 octies du Code général des impôts et le décret 93-1067 du 10 septembre 1993 ;

"alors, de plus, que la garantie des contribuables contre les changements de doctrine de l'Administration en application des articles L. 80 A et L. 80 B du Livre des procédures fiscales qui est due à un contribuable lorsque dans le cadre d'un différend portant sur l'interprétation d'un texte fiscal, l'Administration a formellement pris position sur l'appréciation de la situation de fait du contribuable au regard de la loi fiscale n'est pas propre au seul contentieux administratif de l'impôt, de sorte qu'en statuant, ainsi, sans rechercher si en raison des autorisations formelles qu'elle avait données à la société les Vignobles du Comtat pour les années 1997 à 1999, l'administration des Douanes, qui était liée par sa propre doctrine, était bien fondée à reprocher à cette dernière un dépassement de la limite du rendement de l'AOC, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, en outre, que le chef d'entreprise, qui n'a pas personnellement pris part à la réalisation de l'infraction, peut s'exonérer de sa responsabilité pénale s'il rapporte la preuve qu'il a délégué ses pouvoirs à une personne pourvue de la compétence, de l'autorité et des moyens nécessaires, de sorte qu'en énonçant que Christian Y... ne saurait tirer argument d'une prétendue délégation permanente issue du contrat de régisseur du domaine chargé d'assurer la bonne marche de l'exploitation agricole ou encore d'entretenir toutes les relations nécessaires avec les administrations sociales agricoles auxquelles les Douanes et Contributions indirectes ne sauraient être assimilées, alors qu'aucune disposition légale ou réglementaire n'exclut la matière des contributions indirectes de la délégation de pouvoirs, la cour d'appel a violé l'article 121-1 du Code pénal ;

"alors, encore, que l'insuffisance de motifs équivaut à un défaut de motifs, de sorte qu'en écartant l'existence de cette délégation de pouvoirs accordée à Pierre A... en sa qualité de régisseur sans répondre aux conclusions de Christian Y... desquelles il résultait que outre son statut de cadre Pierre A... disposait bien de la compétence et des moyens nécessaires pour régler les questions relatives aux contributions indirectes dès lors que tous les échanges de courrier entre l'administration des Douanes et la société Vignobles du Comtat avaient été faits à sa requête, que les réponses de l'Administration lui étaient directement adressées, qu'il signait les déclarations de récolte, qu'il avait accompli toutes les démarches en vue d'améliorer la qualité du vin avec l'achat de 5% de la récolte, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, enfin, qu'en matière de contributions indirectes, le juge doit, outre la matérialité des infractions, relever l'existence de l'intention frauduleuse, si bien qu'en statuant ainsi, sans caractériser dans quelle mesure la société les Vignobles du Comtat et Christian Y... auraient en connaissance de cause enfreint les dispositions relatives à la déclaration de récolte et à l'amélioration de la qualité du vin alors qu'ils se fondaient sur la lettre autographiée n° 2958 du 20 janvier 1941 qui ne prévoit aucune limite du plafond de classement et que, suite aux autorisations accordées par l'administration des Douanes, ils avaient bien respecté les deux conditions posées à savoir l'amélioration de la qualité et la limitation des volumes achetés par catégorie de vin et par couleur, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision" ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 302 M, 438, 466, 1791, 1794-3, 1804 du Code général des impôts, L. 80 A et L. 80 B, L. 272 du Livre des procédures fiscales, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal correctionnel de Carpentras du 15 avril 2004 ayant déclaré Paul Z... coupable des infractions de circulation sans titre de mouvement pour 242 hectolitres d'AOC CDR concernant la récolte 1997/1998 et pour 255 hl d'AOC CDR concernant la campagne 1998/1999 ;

"aux motifs que :

"I) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1997/1998 : que les poursuites visaient Paul Z..., la société du Comtat et Christian Y... pour fausse déclaration de récolte, infraction à la réglementation sur l'amélioration de la qualité des vins, circulation sans titre de mouvement de 242 hectolitres dAOC Côtes du Rhône et défaut de paiement du droit de circulation ; que, force est d'abord de constater que les premiers juges ont statué sur la responsabilité pénale de Christian Y..., pris en qualité de gérant statutaire de la société du Comtat, en rappelant à bon droit qu'un gérant statutaire doit s'assurer du respect de la réglementation en matière de contributions indirectes ;

qu'en matière de délégation de pouvoirs censée avoir été consentie à Pierre A..., le constat négatif effectué par les premiers juges demeure valable car, hormis l'absence de délégation expresse, le prévenu Christian Y..., gérant statutaire, ne saurait tirer argument d'une prétendue délégation permanente issue du contrat de régisseur du domaine chargé d'assurer la bonne marche de l'exploitation agricole ou encore d'entretenir (dans le cadre de la gestion du personnel) toutes relations nécessaires avec les administrations sociales agricoles auxquelles les Douanes et Contributions indirectes ne sauraient être assimilées ; que ces observations vaudront pour les autres campagnes (1998/1999 et 1999/2000), de même que, pour la responsabilité pénale de la société gérée par Christian Y..., responsabilité désormais étendue aux contributions indirectes, comme pour toute autre personne morale ;

qu'en l'occurrence, cette société a acheté à Paul Z... la totalité de la récolte AOC de celui-ci (248 hectolitres), certes au bénéfice d'une autorisation administrative du 21 avril 1998 accordée pour l'amélioration de sa récolte 1997 en AOC Côtes du Rhône rouge et sur une base quantitative de 5% ; que, toutefois, cette quantité n'apparaissait pas pour autant sur la déclaration de récolte 1997 de la société tandis que le vendeur déclarait que sa propre récolte était logée en cave particulière ; qu'en matière d'emploi en vinification de vendanges ou de vins d'achat, la lettre autographiée n° 2958 du 20 janvier 1941 disposait notamment que les viticulteurs étaient autorisés, sans être assujettis au régime des marchands en gros, à utiliser en vinification des vendanges, moûts ou vins d'achat destinés à améliorer la qualité de leur récolte dans la limite de 5% de la récolte, les produits d'achat étant soumis au droit de circulation et devant parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés ; que ce document conférait expressément un caractère permanent à cette "tolérance" ; que l'achat effectué par la société, au bénéfice de cette tolérance, ayant porté sur la totalité de la récolte de Paul Z... en vendanges fraîches, il incombait à ce vendeur de le déclarer comme tel et non pas comme une récolte logée en cave particulière ; que, toutefois, la décision de relaxe visant Paul Z... de ce chef mérite confirmation en l'état de la double constatation faite par le tribunal de l'exactitude de la quantité et de l'absence de preuve rapportée de manoeuvres destinées à frauder, comme l'exigeait l'article 1791 du Code général des impôts ; que, sur les déclarations de culpabilité contestées par la société Vignobles du Comtat et Christian Y..., le défaut de mention relative aux 242 hectolitres dans la colonne correspondant au type de vin à améliorer ne pouvait qu'être constaté ;

qu'en outre, le grief tiré d'une référence illégale à la notion de rendement, voire aux dispositions réglementaires résultant du décret du 10 septembre 1993 ne résiste guère à l'examen ; que, s'agissant de l'amélioration de la qualité du vin, il demeure que ce texte de portée générale pose en toute hypothèse pour les vins d'AOC un plafond limite de production par rapport à la superficie plantée et ce, avec pour objectif constant d'assurer en permanence la qualité de la production susceptible de bénéficier de cette appellation ; qu'une telle exigence est parfaitement compatible, en droit comme en fait, avec la tolérance à caractère permanent dont se prévalent les appelants ; que, bien au contraire et s'agissant précisément d'une "tolérance", l'interprétation stricte dont ils se réclament vise en premier chef la portée de la lettre autographiée de 1941 laquelle, de surcroît, se référait justement au "relèvement de la richesse alcoolique" des récoltes ; que la vinification des 5% achetés en vendanges fraîches n'a donc pas fait l'objet d'une déclaration régulière et n'a pas davantage été prise en compte pour le calcul du plafond limitant la production en vin AOC fixé par décret du 10 septembre 1993 ; que le jugement entrepris doit par conséquent recevoir confirmation sur ce plan comme, par ailleurs, en ce qu'il a relaxé Paul Z... en l'absence de preuve dûment rapportée d'élément intentionnel, conforme aux exigences de l'article 1791 précité, l'Administration présumant ici d'une connivence ; qu'enfin et sur les droits de circulation pour la campagne 1997/1998 sur 242 hectolitres dAOC CDR, que la lettre autographiée de 1941 stipule expressément que les 5 % achetés dans le cadre de la tolérance fiscale y sont soumis et doivent parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés, sans possibilité de précompte ;

que les vendanges fraîches étant soumises au régime des vins entraînant le règlement d'un droit de circulation (articles 466 et 438 du Code général des impôts), un titre de mouvement devait être sollicité par le récoltant Paul Z... et les acheteurs et le droit acquitté ; que ce délit formel étant par conséquent caractérisé, l'application des dispositions de l'article 1804 du Code général des impôts s'imposait ; que le jugement déféré évoque la production d'un congé 8135 établi a posteriori (le 14 février 2001) pour justifier la dispense "de peine" accordée aux trois prévenus de ce chef alors que l'article 469-1 du Code de procédure pénale est inapplicable aux pénalités fiscales'' ; qu'en conséquence, la réformation sollicitée par l'administration demanderesse s'impose à cet égard, les trois prévenus faisant l'objet des condamnations en amendes et pénalités proportionnelles telles que fixées au dispositif du présent arrêt, et solidairement, en application de l'article 1799 A du Code général des impôts ;

"II) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1998/1999 : que les poursuites visaient Gérard X..., la société Vignobles du Comtat et Christian Y... pour circulation sans titre de mouvement de 123,03 hectolitres d'AOC Côtes du Rhône et fausse déclaration de récolte sur cette quantité ; que, d'autre part, Paul Z..., la SARL et Christian Y... étaient cités pour circulation sans titre de 255 hectolitres d'AOC CDR et fausse déclaration de récolte sur cette quantité ; qu'en premier lieu, les premiers juges ont dit à bon droit que les poursuites visant Gérard X..., la SARL et son gérant Christian Y... procédaient du postulat du caractère fictif attribué par l'Administration au contrat oral de bail à métayage ; que, sur ce point, la partie poursuivante et appelante se réfère de manière réductrice et formaliste à la notion de bail authentique ou d'usage notoire ; que la convention litigieuse précisait, conformément à la volonté des parties, que le bail prendrait effet le 11 novembre 1997 pour neuf ans, tandis que par courrier adressé après la vendange de 1998, la SARL ayant qualité de preneur confirmait au bailleur Gérard X... son accord sur la résiliation amiable ; que ni l'absence de date sur ce courrier de confirmation ni la résiliation anticipée convenue et acceptée en définitive par les deux parties contractantes ne permettent de qualifier de fictive ladite convention, que ce soit au regard du principe du consensualisme ou du droit rural ; qu'au demeurant, aucune preuve du caractère mensonger du motif tiré de l'inadéquation de la formule pour les deux contractants ou de l'assurance donnée au bailleur par le preneur de ce qu'il n'y aurait pas de saisine contentieuse au tribunal paritaire, n'a davantage été rapportée devant la Cour ; que la décision de relaxe conjointe est en voie de confirmation, étant observé, à l'instar du tribunal, que les droits de circulation afférents aux 123,03 hectolitres récoltés dans ces conditions ont en tout état de cause été acquittés ; que, toutefois, il n'est pas inopportun de relever, à l'examen de ces deux chefs, que Christian Y... est d'autant moins recevable à se prévaloir d'une délégation de pouvoir permanente qu'il ne conteste pas avoir lui-même traité le bail au nom de la société, puis l'avoir résilié pour celle-ci, le régisseur Pierre A... ayant seulement été destinataire d'une copie du document ; qu'en second lieu et sur les 255 hectolitres d'AOC CDR rouge achetés à Paul Z... par la société gérée par Christian Y... lors de la campagne 1998/1999, la réformation du jugement s'impose pour la dispense de peine impossible au sujet de la circulation sans titre de mouvement et les droits de circulation n'ayant été acquittés qu'a posteriori, comme dans le cas précédent ; qu'il s'ensuit que les trois prévenus feront l'objet d'une condamnation solidaire dans les termes fixés au dispositif du présent arrêt, l'article 469-1 du Code de procédure pénale étant inapplicable en la matière ;

que, pour des motifs identiques à ceux de la relaxe déjà confirmée pour Paul Z..., celui-ci ne pouvait davantage être retenu dans les liens de la prévention de fausse déclaration de récolte 1998, faute d'élément intentionnel prouvé ; que le jugement déféré mérite aussi confirmation à l'égard de la société Vignoble du Comtat et de Christian Y..., leur déclaration de récolte, comme celle de l'année précédente, ne mentionnant guère dans la colonne correspondant au type de vin à améliorer les 255 hectolitres achetés en AOC CDR rouge, l'infraction identique étant constituée dans les mêmes conditions ;

"alors, d'une part, que, selon l'article 466 du Code général des impôts, les vendanges fraîches expédiées par les récoltants à des pressoirs de vinification circulent sous le lien de laissez-passer à l'intérieur d'un périmètre constitué par l'arrondissement de récolte et les cantons limitrophes, de sorte qu'en statuant ainsi, alors que, pour la récolte 1997, Paul Z... avait déclaré que sa récolte était en cave particulière, précisant qu'il s'agissait de la cave des Vignobles du Comtat et qu'il avait souscrit un laissez - passer le 8 octobre 1997, ce dont il résulte qu'il disposait à tout le moins d'un titre de mouvement relativement aux vendanges fraîches apportées au lieu de vinification, la cour d'appel a violé l'article précité ;

"alors, d'autre part, qu'en matière de contributions indirectes, l'intention frauduleuse doit être relevée, outre la matérialité des infractions, les dispositions générales de l'article 121-3 du Code pénal demeurant applicables, de sorte qu'en statuant ainsi aux motifs que ce délit forme serait caractérisé et sans caractériser dans quelle mesure Paul Z... aurait violé en connaissance de cause les prescriptions légales ou réglementaires relatives aux droits de circulation, dès lors qu'il s'était borné à déplacer les vendanges fraîches vers leur lieu de vinification et qu'il disposait d'un laissez - passer" ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 302 M, 438, 466, 1791, 1794-3, 1804 du Code général des impôts, L. 80 A et L. 80 B, L. 272 du Livre des procédures fiscales, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de la procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé le jugement du tribunal correctionnel de Carpentras du 15 avril 2004 ayant déclaré Gérard X... coupable du délit de circulation sans titre de mouvement sur 152 hectolitres d'AOC pour la campagne 1999-2000 ;

"aux motifs que :

"III) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1999/2000 : que les poursuites visaient Gérard X..., la société du Comtat et Christian Y... pour fausse déclaration de récolte portant sur la vente de 152 hectolitres d'AOC CDR en vendanges fraîches et pour circulation sans titre et non paiement des droits ; qu'en premier lieu, il est constant qu'en dépit de cette vente consentie au bénéfice de la tolérance évoquée plus haut, Georges X... a, comme le prévenu Paul Z..., déclaré une récolte logée en cave particulière ; que, nonobstant, et au motif de la double constatation de l'exactitude de la quantité mentionnée et de l'absence persistante de preuve d'une volonté de fraude, sa relaxe sera maintenue ; qu'en cet état et après avoir exactement relaté que, sur ce plan, la responsabilité de la société et de son gérant étaient recherchées sur le fondement particulier de l'article 1799-3 du Code général des impôts, les premiers juges ont à bon droit relaxé ces prévenus insusceptibles d'être qualifiés de négociants complices, vue la relaxe d'un auteur principal présumé ; qu'en second lieu, les premiers juges ont dispensé de peine tous les prévenus dans la mesure où il était justifié du paiement des droits au moyen d'un congé de 4 473 francs ; que, comme dans les cas précédents, les vendanges cédées auraient dû faire l'objet d'un règlement des droits de circulation, ou à défaut, circuler en suspension des droits sous couvert d'un titre de mouvement ; que, pour sa part, la société les a réceptionnées sans titre, ce qui la rendait solidairement responsable de l'infraction ; que les dispositions de l'article 469-1 du Code de procédure pénale étant inapplicables en la matière, la société Vignobles du Comtat et Christian Y... seront solidairement condamnés aux pénalités fiscales édictées au dispositif ;

"IV) enfin et sur la répression, que les amendes et pénalités proportionnelles déjà mises à la charge solidairement de la société et de Christian Y... (pour fausses déclarations de récoltes 1997/1998 et 1998/1999 et infraction sur l'amélioration de la qualité du vin) seront confirmées comme étant pleinement appropriées aux délits commis" ;

"alors que, les juges sont tenus d'assortir leur décision de motifs propres à la justifier et que l'insuffisance de motifs équivaut à un défaut de motifs, de sorte qu'en statuant ainsi à l'égard de Georges X... sans énoncer aucun motif propre à justifier sa déclaration de culpabilité du chef de circulation sans titre de mouvement pour les 152 hectolitres d'AOC concernant la campagne 1999/2000, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code de procédure pénale" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables des infractions susvisées, l'arrêt, après avoir relevé que les dispositions des articles 1791, 1794, 1804 et 1805 du Code général des impôts étaient applicables tant aux personnes morales qu'aux personnes physiques et retenu que le gérant de la société les Vignobles du Comtat ne justifiait pas avoir délégué ses pouvoirs dans le domaine concerné par les poursuites, énonce, notamment, que le décret du 10 septembre 1993 fixe un plafond limite de production par rapport à la surface plantée, pour assurer en permanence la qualité de la production susceptible de bénéficier d'une AOC ; que les juges en déduisent que l'apport de 5%, en vin ou vendange, toléré par l'Administration en application de la lettre autographiée n° 2958 du 20 janvier 1941, ayant également pour objet l'amélioration de la qualité du vin, particulièrement de sa teneur en alcool, doit être inclus dans le calcul du rendement à l'hectare; qu'ils ajoutent que, selon cette lettre, les quantités apportées doivent parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés et ne peuvent circuler sans titre de mouvement applicable ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son pouvoir souverain d'appréciation, et dès lors qu'en matière de contributions indirectes, la violation en connaissance de cause des prescriptions légales et réglementaires caractérise l'intention coupable exigée par l'article 121-3 du Code pénal, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être admis ;

Sur le quatrième moyen de cassation pris de la violation des articles 302 M, 407, 438, 466, 169 bis annexe III, 267 octies annexe Il, 1791, 1794-3, 1799-3, 1804 du Code général des impôts, L. 80 A et L. 80 B, L. 272 du Livre des procédures fiscales, décret n° 74-872 du 19 octobre 1974 , décret n° 93-1067 du 10 septembre 1993, 111-4, 121-1, 121-2, 121-3 du Code pénal, 591 et 593 du Code de la procédure pénale, défaut et insuffisance de motifs, manque de base légale, violation de la loi ;

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné la société les Vignobles du Comtat et Christian Y... au paiement pour fausse déclaration de récolte pour les campagnes 1997/1998 et 1998/1999 de pénalités proportionnelles de 16.312 euros et 10 390 euros, a condamné solidairement la société les Vignobles du Comtat, Christian Y... et Paul Z... au paiement pour infractions de circulation sans titre de mouvement et défaut de paiement des droits de circulation de pénalités proportionnelles de 822 euros pour la campagne 1997/1998, 867 euros pour la campagne 1998/1999, condamné solidairement la société les Vignobles du Comtat, Christian Y... et Gérard X... aux pénalités proportionnelles de 516 euros pour la campagne 1999/2000 ;

"aux motifs que :

"I) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1997/1998 : que les poursuites visaient Paul Z..., la société du Comtat et Christian Y... pour fausse déclaration de récolte, infraction à la réglementation sur l'amélioration de la qualité des vins, circulation sans titre de mouvement de 242 hectolitres dAOC Côtes du Rhône et défaut de paiement du droit de circulation ; ( ) qu'en l'occurrence, cette société a acheté à Paul Z... la totalité de la récolte AOC de celui-ci (248 hectolitres), certes au bénéfice d'une autorisation administrative du 21 avril 1998 accordée pour l'amélioration de sa récolte 1997 en AOC Côtes du Rhône rouge et sur une base quantitative de 5 % ; que, toutefois, cette quantité n'apparaissait pas pour autant sur la déclaration de récolte 1997 de la société tandis que le vendeur déclarait que sa propre récolte était logée en cave particulière ; qu'en matière d'emploi en vinification de vendanges ou de vins d'achat, la lettre autographiée n° 2958 du 20 janvier 1941 disposait notamment que les viticulteurs étaient autorisés, sans être assujettis au régime des marchands en gros, à utiliser en vinification des vendanges, moûts ou vins d'achat destinés à améliorer la qualité de leur récolte dans la limite de 5 % de la récolte, les produits d'achat étant soumis au droit de circulation et devant parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés ; que ce document conférait expressément un caractère

permanent à cette "tolérance" ; que l'achat effectué par la société au bénéfice de cette tolérance ayant porté sur la totalité de la récolte de Paul Z... en vendanges fraîches, il incombait à ce vendeur de le déclarer comme tel et non pas comme une récolte logée en cave particulière ; que, toutefois, la décision de relaxe visant Paul Z... de ce chef mérite confirmation, en l'état, de la double constatation faite par le tribunal de l'exactitude de la quantité et de l'absence de preuve rapportée de manoeuvres destinées à frauder, comme l'exigeait l'article 1791 du Code général des impôts ; que, sur les déclarations de culpabilité contestées par la société Vignobles du Comtat et Christian Y..., le défaut de mention relative aux 242 hectolitres dans la colonne correspondant au type de vin à améliorer ne pouvait qu'être constaté ;

qu'en outre, le grief tiré d'une référence illégale à la notion de rendement, voire aux dispositions réglementaires résultant du décret du 10 septembre 1993, ne résiste guère à l'examen ; que, s'agissant de l'amélioration de la qualité du vin, il demeure que ce texte de portée générale pose en toute hypothèse pour les vins d'AOC un plafond limite de production par rapport à la superficie plantée et ce, avec pour objectif constant d'assurer en permanence la qualité de la production susceptible de bénéficier de cette appellation ; qu'une telle exigence est parfaitement compatible, en droit comme en fait, avec la tolérance à caractère permanent dont se prévalent les appelants ; que, bien au contraire et s'agissant précisément d'une "tolérance", l'interprétation stricte dont ils se réclament vise au premier chef la portée de la lettre autographiée de 1941 laquelle, de surcroît, se référait justement au "relèvement de la richesse alcoolique" des récoltes ; que la vinification des 5 % achetés en vendanges fraîches n'a donc pas fait l'objet d'une déclaration régulière et n'a pas davantage été prise en compte pour le calcul du plafond limitant la production en vin AOC fixé par décret du 10 septembre 1993 ; que le jugement entrepris doit par conséquent recevoir confirmation sur ce plan comme, par ailleurs, en ce qu'il a relaxé Paul Z... en l'absence de preuve dûment rapportée d'élément intentionnel conforme aux exigences de l'article 1791 précité, l'Administration présumant ici d'une connivence ;

qu'enfin et sur les droits de circulation pour la campagne 1997/1998 sur 242 hectolitres dAOC CDR, la lettre autographiée de 1941 stipule expressément que les 5 % achetés dans le cadre de la tolérance fiscale y sont soumis et doivent parvenir aux utilisateurs sous le lien de congés, sans possibilité de précompte ;

que les vendanges fraîches étant soumises au régime des vins entraînant le règlement d'un droit de circulation (articles 466 et 438 du Code général des impôts), un titre de mouvement devait être sollicité par le récoltant Paul Z... et les acheteurs et le droit acquitté ; que ce délit formel étant par conséquent caractérisé, l'application des dispositions de l'article 1804 du Code général des impôts s'imposait ; que le jugement déféré évoque la production d'un congé 8135 établi a posteriori (le 14 février 2001) pour justifier la dispense "de peine" accordée aux trois prévenus de ce chef, alors que l'article 469-1 du Code de procédure pénale est inapplicable aux pénalités fiscales'' ; qu'en conséquence, la réformation sollicitée par l'administration appelante s'impose à cet égard, les trois prévenus faisant l'objet des condamnations en amendes et pénalités proportionnelles telles que fixées au dispositif du présent arrêt, et solidairement, en application de l'article 1799 A du Code général des impôts ;

"II) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1998/1999 : que les poursuites visaient Gérard X..., la société Vignobles du Comtat et Christian Y... pour circulation sans titre de mouvement de 123,03 hectolitres d'AOC Côtes du Rhône et fausse déclaration de récolte sur cette quantité ; que, d'autre part, Paul Z..., la SARL et Christian Y... étaient cités pour circulation sans titre de 255 hectolitres d'AOC CDR et fausse déclaration de récolte sur cette quantité ; ( ) que la décision de relaxe conjointe est en voie de confirmation, étant observé, à l'instar du tribunal, que les droits de circulation afférents aux 123,03 hectolitres récoltés dans ces conditions ont en tout état de cause été acquittés ; ( ) qu'en second lieu et sur les 255 hectolitres d'AOC CDR rouge achetés à Paul Z... par la société gérée par Christian Y... lors de la campagne 1998/1999, la réformation du jugement s'impose pour la dispense de peine impossible au sujet de la circulation sans titre de mouvement et les droits de circulation n'ayant été acquittés qu'a posteriori, comme dans le cas précédent ;

qu'il s'ensuit que les trois prévenus feront l'objet d'une condamnation solidaire dans les termes fixés au dispositif du présent arrêt, l'article 469-1 du Code de procédure pénale étant inapplicable en la matière; ( ) ; que le jugement déféré mérite aussi confirmation à l'égard de la société Vignobles du Comtat et de Christian Y..., leur déclaration de récolte, comme celle de l'année précédente, ne mentionnant guère dans la colonne correspondant au type de vin à améliorer les 255 hectolitres achetés en AOC CDR rouge, l'infraction identique étant constituée dans les mêmes conditions ;

"III) Sur les appels visant les infractions pour la campagne 1999/2000 : que les poursuites visaient Gérard X..., la société du Comtat et Christian Y... pour fausse déclaration de récolte portant sur la vente de 152 hectolitres d'AOC CDR en vendanges fraîches et pour circulation sans titre et non paiement des droits ; ( ) ; qu'en cet état et après avoir exactement relaté que sur ce plan la responsabilité de la SARL et de son gérant étaient recherchée sur le fondement particulier de l'article 1799-3 du Code général des impôts, les premiers juges ont à bon droit relaxé ces prévenus insusceptibles d'être qualifiés de négociants complices, vue la relaxe d'un auteur principal présumé ; qu'en second lieu, les premiers juges ont dispensé de peine tous les prévenus dans la mesure où il était justifié du paiement des droits au moyen d'un congé de 4 473 francs ; que, comme dans les cas précédents, les vendanges cédées auraient dû faire l'objet d'un règlement des droits de circulation, ou à défaut, circuler en suspension des droits sous couvert d'un titre de mouvement ; que, pour sa part, la SARL les a réceptionnées sans titre, ce qui la rendait solidairement responsable de l'infraction ; que les dispositions de l'article 469-1 du Code de procédure pénale étant inapplicables en la matière, la société Vignobles du Comtat et Christian Y... seront solidairement condamnés aux pénalités fiscales édictées au dispositif ;

"IV) enfin et sur la répression, que les amendes et pénalités proportionnelles déjà mises à la charge solidairement de la SARL et de Christian Y... (pour fausses déclarations de récoltes 1997/1998 et 1998/1999 et infraction sur l'amélioration de la qualité du vin) seront confirmées comme étant pleinement appropriées aux délits commis" ;

"alors, d'une part, que, conformément aux articles 593 du Code de procédure pénale et 1791 du Code général des impôts, le juge répressif ne peut prononcer la pénalité proportionnelle dont le montant est compris entre une et trois fois celui des droits fraudés ou compromis, qu'après avoir recherché et déterminé ces droits avec exactitude et doit prendre en considération le montant des droits que l'intéressé a pu avoir acquittés par ailleurs, de sorte qu'en prononçant lesdites amendes et pénalités proportionnelles du chef d'infractions de circulation sans titre de mouvement et défaut de paiement des droits de circulation sans prendre en considération les droits de circulation payés par les demandeurs pour les différentes campagnes selon congé n° 8135, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision ;

"alors, d'autre part, que, selon les articles 1794-3 et 1791 du Code général des impôts, en matière de fausse déclaration de récolte et de stock de vins, si l'infraction résulte exclusivement d'un excès ou d'une insuffisance des quantités déclarées, la valeur des boissons représentant cet excès ou cette insuffisance sert de base au calcul de la pénalité proportionnelle, de sorte qu'en condamnant la société les Vignobles du Comtat et Christian Y..., coupables de fausse déclaration de récolte pour les campagnes 1997/1998 et 1998/1999, au paiement des sommes de 16 312 euros et 10 390 euros, sans s'expliquer sur la base de son évaluation, alors que la pénalité proportionnelle doit être calculée à partir de la valeur des vins non compris dans les déclarations de vin et de récolte, constituant l'objet de la fraude, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision" ;

Attendu qu'en fixant le montant des pénalités proportionnelles sur le fondement d'évaluations, non contestées, de l'administration des Douanes, calculées, selon l'infraction, à partir des quantités de récolte non déclarées, de la valeur des vins sur lesquels a porté la fraude et du montant des droits compromis, la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une demande en paiement des droits fraudés, a fait l'exacte application des articles 1794, 3 , 1804 et 1791 du Code général des impôts ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, M. Rognon conseiller rapporteur, M. Challe conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Krawiec ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 05-82897
Date de la décision : 22/03/2006
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts indirects et droits d'enregistrement - Dispositions spécifiques à certaines marchandises ou prestations - Vins - Infractions à la réglementation sur la qualité des vins - Appellation d'origine contrôlée - Rendement de base - Calcul - Apports de moûts, vins ou vendanges d'achat.

Les quantités de raisins, ou leur équivalent en volume de vin, récoltées par hectare de vigne pour lequel est revendiquée une appellation d'origine, comprennent, pour le calcul du rendement de base, les apports de moûts, vins ou vendanges d'achat, tolérés par l'administration en application de la lettre autographiée n° 2958 du 20 janvier 1941, dans la limite de 5 %, pour l'amélioration de la qualité du vin.


Références :

Code général des impôts 1791, 1794, 1804, 1805
Code pénal 121-3
Décret 93-1067 du 10 septembre 1993

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 29 mars 2005


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 mar. 2006, pourvoi n°05-82897, Bull. crim. criminel 2006 N° 85 p. 314
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2006 N° 85 p. 314

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Launay.
Rapporteur ?: M. Rognon.
Avocat(s) : SCP Peignot et Garreau, Me Foussard.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2006:05.82897
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