AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 77 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 95 du même Code ;
Attendu que lorsqu'il ne se prononce pas sur le fond du litige, mais que la détermination de la compétence dépend d'une question de fond, le juge doit, dans le dispositif du jugement, statuer sur cette question de fond et sur la compétence par des dispositions distinctes ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 23 novembre 2004), que la société d'aménagement foncier et d'établissement rural Provence Alpes Côte-d'Azur (SAFER) a mis à disposition de M. X... et de Mme Y..., par conventions des 22 novembre 1996, 17 novembre 1997 et 5 octobre 1998 des parcelles faisant partie d'une propriété qu'elle avait acquise le 10 juillet 1990 ; que la SAFER leur a demandé de libérer les parcelles, puis les a assignés en expulsion devant le tribunal de grande instance de Toulon qui, par jugement du 26 novembre 2001, s'est déclaré incompétent au profit du tribunal paritaire de baux ruraux de Hyères ;
Attendu que pour confirmer le jugement du tribunal paritaire de baux ruraux ayant dit que le jugement du tribunal de grande instance de Toulon du 26 novembre 2001 avait autorité de chose jugée en ce qui concerne la qualification du contrat liant les parties en bail rural et rejeter la demande de la SAFER, l'arrêt retient que ce tribunal a dit que selon les dispositions de l'article L. 142-4 du Code rural, la possibilité de consentir des baux non soumis au statut du fermage était expressément limitée à la durée de cinq ans suivant l'acquisition et qu'au-delà, les règles relatives aux baux ruraux étaient applicables de plein droit, qu'il a ensuite écarté sa compétence au profit du tribunal paritaire de baux ruraux et que, ce faisant, il a nécessairement tranché la question de fond concernant la qualification de la convention liant les parties, que ce jugement est devenu définitif et a force de chose jugée sur cette question de fond ;
Qu'en statuant ainsi, alors que par son jugement du 26 novembre 2001 le tribunal de grande instance s'était borné dans son dispositif à se déclarer incompétent, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 novembre 2004, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne, ensemble, M. X... et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et de Mme Y..., les condamne, ensemble, à payer à la société SAFER Provence Alpes Côte-d'Azur la somme de 2 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille six.