AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, Mme X..., assistante de direction de la société Eurisk depuis le 5 juin 1992, a été convoquée à un entretien préalable à son licenciement par lettre du 28 juillet 2000 ;
que cet entretien s'est tenu le 2 août 2000 ; que l'employeur a informé le lendemain la salariée que la décision serait prise début septembre ; que le licenciement a été notifié par une lettre alléguant des insuffisances professionnelles et des fautes disciplinaires envoyée le 12 septembre 2000 ; que la salariée a été désignée déléguée syndicale et représentante syndicale au comité d'entreprise par lettre reçue par l'employeur le 12 septembre ; que la salariée a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le pourvoi principal de la salariée :
Sur le second moyen ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande en nullité du licenciement pour discrimination syndicale, pour des motifs tirés de la violation des articles L. 122-45 du Code du travail et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel a estimé que le licenciement de la salariée n'était pas fondé sur son appartenance syndicale, que le moyen n'est pas fondé ;
Sur les troisième et quatrième moyens, réunis :
Attendu que la salariée fait encore grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes en rappel de salaires pour heures supplémentaires et repos compensateurs ainsi qu'en dommages-intérêts pour travail dissimulé pour des motifs pris de la violation des articles L. 212-1-1, L. 324-9 du Code du travail et 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a estimé que les éléments produits par la salariée n'étaient pas susceptibles d'étayer sa demande en rappel pour heures supplémentaires, a légalement justifié sa décision ; que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le pourvoi incident de l'employeur :
Sur le second moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée au paiement d'une somme à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, pour des motifs pris d'un défaut de base légale, au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui par une appréciation souveraine des faits a constaté que l'un des dirigeants de la société avait tenu des propos intolérables, a estimé que leur répétition portait atteinte à la dignité de la salariée et constituait un harcèlement moral ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen :
Vu les articles L. 122-14-3 et L. 122-14-4 du Code du travail ;
Attendu que pour condamner l'employeur à payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la salariée, l'arrêt retient que le licenciement est fondé, d'une part, sur un motif disciplinaire tiré du non respect de l'obligation de la confidentialité, et d'autre part, sur des insuffisances professionnelles, mais que si certaines insuffisances alléguées justifient un licenciement pour cause réelle et sérieuse, sans constituer une sanction disciplinaire, l'employeur en reprochant à la salariée un refus d'obéir aux consignes s'est manifestement placé sur le terrain disciplinaire ; qu'en conséquence, par application des dispositions de l'article L. 122-41, le licenciement prononcé le 12 septembre 2000 plus d'un mois après l'entretien préalable est privé de cause réelle et sérieuse ;
Attendu cependant que l'employeur, à condition de respecter les règles de procédures applicables à chaque cause de licenciement, peut invoquer dans la lettre de licenciement des motifs différents de rupture inhérents à la personne du salarié dès lors qu'ils procèdent de faits distincts ;
D'où il suit que la cour d'appel qui a relevé que l'employeur alléguait, outre de fautes disciplinaires, de faits différents constitutifs d'insuffisances professionnelles, sans rechercher si à eux seuls ces derniers faits ne constituaient pas une cause réelle et sérieuse de licenciement, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des textes susvisés ;
Et attendu qu il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen du pourvoi de la salariée dès lors que les dispositions de l'article 122-41 ne s'appliquent qu'aux sanctions disciplinaires, si bien que la cassation à intervenir sur la cause du licenciement, le rend sans objet ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de statuer sur le premier moyen du pourvoi de la salariée ;
Rejette le pourvoi de Mme X... ;
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société au paiement d'une somme à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 29 janvier 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille six.