AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avis donné aux parties :
Vu l'article L 230-2, I, du Code du travail interprété à la lumière de la directive CE n° 89/391 du 12 juin 1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail ; ensemble les articles L. 122-32-2 et R. 241-51 du Code du travail ;
Attendu que l'employeur, tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, doit en assurer l'effectivité ; qu'il ne peut dès lors laisser un salarié reprendre son travail après une période d'absence d'au moins huit jours pour cause d'accident du travail sans le faire bénéficier lors de la reprise du travail, ou au plus tard dans les huit jours de celle-ci, d'un examen par le médecin du travail destiné à apprécier son aptitude à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou d'une réadaptation ou éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures ; qu'à défaut l'employeur ne peut résilier le contrat de travail à durée indéterminée du salarié, dont le droit à la sécurité dans le travail a ainsi été méconnu, que s'il justifie soit d'une faute grave de ce dernier, soit de l'impossibilité où il se trouve, pour un motif non lié à l'accident, de maintenir ledit contrat ;
Attendu que, selon l'arrêt attaqué, M. X..., engagé le 26 septembre1994 par la société Cubit France technologies en qualité d'agent technique, a été victime, le 8 septembre 1999, d'un accident du travail provoquant un arrêt de travail jusqu'au 6 décembre 1999, puis, suite à une rechute, du 25 janvier 2000 au 10 mai 2000 ; que le salarié a repris à cette date son activité sans avoir été soumis à l'examen médical de reprise ; qu'ayant été, avant et après ces arrêts pour accident du travail, en arrêt de travail pour maladie, son employeur l'a licencié le 27 novembre 2000 pour absences répétées désorganisant l'entreprise et nécessitant son remplacement définitif ;
Attendu que pour rejeter la demande du salarié en paiement de dommages-intérêts en réparation des préjudices résultant du caractère illicite de son licenciement et de l'absence de visite médicale de reprise, l'arrêt retient que si en l'absence de visite de reprise par le médecin du travail, la période de suspension du contrat de travail de l'article L. 122-32-1 du Code du travail consécutive à un accident du travail continue, quand le salarié reprend effectivement son travail, il y a antinomie entre exécution et suspension du contrat de travail, de sorte qu'en reprenant le travail sans visite médicale de reprise, le salarié a mis fin à la suspension du contrat de travail ; que, d'ailleurs, il ne conteste pas que ses arrêts de travail postérieurs sont des arrêts pour maladie, et que n'étant plus en période de suspension du contrat de travail au moment du licenciement, il n'est pas fondé à invoquer l'application des dispositions de l'article L. 122-32-2 du Code du travail ni à réclamer des dommages-intérêts pour absence de visite médicale de reprise alors qu'il pouvait en prendre l'initiative ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 31 mars 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de d'Amiens ;
Condamne la société Cubit France technologies aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Cubit France technologies ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille six.