AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, siégeant en ASSEMBLEE PLENIERE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 31 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Attendu que l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques de celui qui la poursuit, à charge par lui, si le titre est ultérieurement modifié, d'en réparer les conséquences dommageables ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les époux X..., cessionnaires d'un fonds de commerce, ont obtenu une ordonnance de référé enjoignant à M. Y... de cesser toute activité de livraison de fioul et d'enlever sous astreinte tout élément permettant de procéder à cette vente ; que cette décision ayant été infirmée, M. Y... a fait assigner les époux X... en réparation de son préjudice né de l'exécution de l'ordonnance ; qu'un jugement a condamné les époux X... à payer des dommages-intérêts à M. Y... ; que par arrêt du 10 juillet 2003 (2e Civ., Bull. 2003, II, n° 244), la Cour de cassation a cassé la décision d'une cour d'appel ayant infirmé ce jugement et a renvoyé l'affaire devant une autre cour ;
Attendu que pour rejeter la demande de M. Y..., l'arrêt retient que les époux X... n'ont effectué aucun acte d'exécution forcée de l'ordonnance du 18 mai 1992, qui a été spontanément exécutée par M. Y..., lequel, dès lors, ne peut obtenir réparation du préjudice qu'il a subi du fait de cette exécution ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance de référé ayant été signifiée à la requête des époux X... à M. Y... le 29 mai 1992, ce dernier était tenu de l'exécuter, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2005, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ; Condamne les époux X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux X... à payer à M. Y... la somme de 2 000 euros ;
Dit qu'à la diligence du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé, par la Cour de cassation, siégeant en Assemblée plénière, et prononcé par le premier président, en l'audience publique du vingt-quatre février deux mille six.
LE CONSEILLER RAPPORTEUR LE PREMIER PRESIDENT LE GREFFIER EN CHEF
Moyen produit par Me Cossa, avocat aux Conseils, pour M. Y....
Moyen annexé à l'arrêt n° 533 P (Assemblée plénière)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. Alain Y... de l'ensemble de ses demandes contre les époux X...,
AUX MOTIFS QUE M. Y... reproche aux époux X... de l'avoir empêché d'exploiter son activité commerciale de livraison de fuel domestique à la faveur d'une ordonnance de référé du 18 mai 1992 exécutoire par provision et réformée par un arrêt du 13 juin 1996 ; que les époux X... n'ont effectué aucun acte d'exécution forcée de l'ordonnance, qui a été spontanément exécutée par M. Alain Y... ; dès lors, il ne peut obtenir réparation du préjudice qu'il a subi du fait de cette exécution provisoire ;
ALORS QUE l'exécution d'une décision de justice exécutoire à titre provisoire n'a lieu qu'aux risques et périls de celui qui l'a obtenue ; qu'il résulte des propres constatations de la cour d'appel que les époux X... ont obtenu une ordonnance de référé interdisant à M. Alain Y... de poursuivre son activité et lui ordonnant l'enlèvement de son matériel sous astreinte ; que M. Y... était légalement tenu d'exécuter cette décision assortie en outre d'une astreinte financière élevée ; qu'en excluant toute responsabilité des époux X... en raison de cette exécution, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil.