AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 13 janvier 2004), que Aimé X... a donné à bail à ferme, à compter du 23 septembre 1974, une propriété à M. Y... pour une durée de neuf ans ; que le 10 décembre 2001, les époux Léopold X..., venant aux droits de Aimé X... décédé, ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une demande en résiliation du bail rural pour défaut de paiement de fermage, et de remboursement d'un cheptel vif disparu ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer en monnaie aux époux X... divers fermages pour les périodes antérieures à novembre 2001, alors, selon le moyen, que la loi ne disposant que pour l'avenir, le régime des fermages issu de la loi n° 95-2 du 2 janvier 1995 ne s'applique qu'aux baux conclus ou renouvelé depuis le 4 janvier 1995 ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que le bail litigieux a été renouvelé le 23 septembre 1974 et donc par la suite les 23 septembre 1983, 23 septembre 1992 puis 23 septembre 2001 ; d'où il suit que la loi du 2 janvier 1995 prévoyant en principe le paiement des fermages en monnaie ne pouvait s'appliquer qu'au bail renouvelé le 23 septembre 2001 ; qu'en écartant dès lors les paiements en denrées, conformes aux stipulations du bail, invoqués par M. Y... pour les périodes antérieures au 23 septembre 2001, et en prononçant la résiliation du bail pour défaut de paiement persistant des fermages antérieurement au 23 septembre 2001, au motif que, depuis la loi du 2 janvier 1995, le loyer doit être prévu en monnaie et payé de même, la cour d'appel a violé l'article 2 du Code civil, ensemble les articles L. 411-11 du Code rural dans sa rédaction issue de la loi n° 95-2 du 2 janvier 1995 et L. 411-53 du même Code ;
Mais attendu que la loi du 2 janvier 1995 étant applicable aux baux en cours pour régir les relations entre les parties postérieurement à son entrée en vigueur, la cour d'appel a, sans violer l'article 2 du Code civil, exactement retenu que M. Y... était débiteur d'une somme au titre des fermages pour l'année 2001, le paiement en denrées n'étant plus libératoire ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article L. 411-53 du Code rural ;
Attendu que pour prononcer la résiliation du bail rural, l'arrêt retient que les mises en demeure sont du 17 février 2000, du 30 mars 2001, du 29 mai 2001, du 3 septembre 2001, du 18 novembre 2001, que deux d'entre elles rappellent les dispositions de l'article L. 411-53 du Code rural, que, par voie de conséquence, deux défauts de paiement de fermage étant constaté en l'espèce et ayant persisté, la demande des consorts X... tendant à voir le bail résilié est à la fois recevable et bien fondée ;
qu'en statuant ainsi, sans préciser les mises en demeure qui étaient régulières, et les loyers impayés visés par celles-ci, la cour d'appel n' a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail rural, l'arrêt rendu le 13 janvier 2004, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu les articles 700 du nouveau Code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande des époux X..., de M. Y... et de la SCP Ghestin ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille six.