AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le deuxième moyen :
Vu l'article L. 89-2 du Code du domaine de l'Etat ;
Attendu que dans chacun des départements de la Guadeloupe et de la Martinique, il est institué, dans un délai qui ne peut être supérieur à un an à compter de l'entrée en vigueur de la loi n 96-1241 du 30 décembre 1996, une commission départementale de vérification des titres ; que cette commission apprécie la validité de tous les titres antérieurs à l'entrée en vigueur du décret n 55-885 du 30 juin 1955 qui n'ont pas été examinés par la commission, prévue par son article 10, établissant les droits de propriété, réels ou de jouissance sur les terrains précédemment situés sur le domaine de la zone des cinquante pas géométriques dont la détention par la personne privée requérante n'était contrariée par aucun fait de possession d'un tiers à la date du 1er janvier 1995 ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 18 juin 2004), que les consorts X... ont formé devant la commission départementale de vérification des titres une demande de validation de leur droit de propriété sur une parcelle cadastrée T n° 70, située au Robert (Martinique), Pointe Rouge ;
Attendu que pour accueillir cette demande, l'arrêt retient que si, aux termes des dispositions du décret de 1955, l'acte initial devait nécessairement provenir d'une cession par l'Etat ou une collectivité publique, il résulte désormais des dispositions de l'article L. 89-2 du Code du domaine de l'Etat, issu de la loi du 30 décembre 1996, que la commission peut valablement examiner tous les titres antérieurs à 1955, dès lors qu'ils n'ont pas déjà été soumis à l'examen de la commission de 1955, et que c'est donc en rajoutant à la loi que le préfet entend évoquer les décrets de 1882 et 1887, car si, par définition, les occupants actuels de la zone des cinquante pas géométriques sont toujours pour l'essentiel, en situation irrégulière par rapport à l'Etat, cette loi a justement pour objet la régularisation progressive de ces situations, y compris quand le titre originel ne provient pas d'une cession par l'Etat ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le titre allégué doit avoir été délivré par l'Etat, lequel pouvait seul procéder à la cession d'un terrain faisant originairement partie du domaine public, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 juin 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Fort-de-France ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée ;
Condamne les consorts Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des consorts Y... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille six.