AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 19 janvier 2004), que le 5 février 1998, Mme X... a vendu un immeuble aux époux Y... pour le prix de 835 000 francs ; que, par arrêt irrévocable du 30 juillet 2002, la cour d'appel de Bordeaux a retenu l'existence de vices cachés et ordonné une expertise en vue de déterminer la diminution du prix de la vente ; que l'expert a estimé la valeur de l'immeuble non atteint de vice à 1 245 000 francs et à 937 000 francs si les vices cachés étaient retenus et indiqué que malgré les vices, l'immeuble ne pouvait être payé moins cher que ce qu'il l'a été ;
Attendu que Mme X... fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux époux Y... la somme de 307 200 francs soit 46 153,14 euros à titre de réduction du prix, alors, selon le moyen :
1 / que l'action estimatoire offerte à l'acquéreur d'un bien affecté d'un vice caché ne peut avoir pour effet que de ramener le prix du bien à la valeur à laquelle il l'aurait effectivement acquis s'il n'avait pas été vicié ; qu'elle ne peut autoriser l'acquéreur à réaliser un bénéfice illégitime au détriment du vendeur ; qu'il résultait des constatations de l'expert que la propriété acquise par les époux Y... valait, au moment de l'achat, une somme supérieure au prix qu'ils avaient versé, malgré les vices l'affectant ; qu'en effet, la propriété valait à l'époque au moins 937 800 francs et avait été acquise 835 000 francs seulement ; qu'en considérant néanmoins que les acquéreurs étaient fondés à réclamer une réduction de prix de 46 832,34 euros, soit 307 200 francs, la cour d'appel a violé l'article 1644 du Code civil ;
2 / qu'en tout état de cause, lorsque la chose vendue est affectée d'un vice caché, l'acquéreur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix ; que la réduction du prix prévue par l'article 1644 du Code civil doit être arbitrée par expert ; que l'expert judiciaire avait conclu que "malgré les vices dont il était affecté, l'immeuble ne pouvait être payé moins cher que ce qu'il l'a été" ; que l'expert considérait ainsi qu'aucune réduction de prix ne devait être accordée à M. et Mme Y... ; qu'en condamnant néanmoins Mme X... à payer la somme de 46 153,14 euros au titre de la restitution du prix d'une partie de l'immeuble vendu, la cour d'appel a violé l'article 1644 du Code civil ;
3 / que l'expert avait retenu, pour évaluer le coût de la propriété de Mme X..., compte tenu des vices qui l'affectaient, une valeur du terrain de 300 000 francs correspondant à son prix nu, soit 500 000 francs, auquel il a appliqué une décote de 30 % ; qu'en considérant pour juger que "l'expert Z... ne saurait être suivi dans son raisonnement aux termes duquel malgré les vices dont il était affecté l'immeuble ne pouvait être payé moins cher que ce qu'il l'a été" au motif que "ce raisonnement part en effet du postulat selon lequel le seul terrain ne pouvait avoir une valeur inférieure à 500 000 francs, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise et violé l'article 1134 du Code civil ;
4 / qu'en tout état de cause, lorsque la chose vendue est affectée d'un vice caché, l'acquéreur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix ; que la réduction du prix prévue par l'article 1644 du Code civil doit être arbitrée par experts ; qu'en fixant la réduction de prix accordée à M. et Mme Y..., correspondant au coût des travaux de reprise des vices affectant l'immeuble, sans avoir au préalable obtenu l'avis de l'expert sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 1644 du Code civil ;
Mais attendu que l'action estimatoire de l'article 1644 du Code civil permet de replacer l'acheteur dans la situation où il se serait trouvé si la chose vendue n'avait pas été atteinte de vices cachés ;
qu'ayant exactement retenu que les époux Y... étaient fondés à demander la restitution du prix correspondant au coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices leur permettant d'être en possession d'un immeuble conforme à celui qu'ils avaient souhaité acquérir et que l'expert ne pouvait être suivi dans son raisonnement aux termes duquel malgré les vices dont il était affecté, l'immeuble ne pouvait être payé moins cher que ce qu'il l'avait été, la cour d'appel, qui a constaté que si Mme X... contestait les devis produits par les époux Y..., l'expert qui les avait vérifiés n'avait formulé aucune critique ni réserve à leur encontre, à pu en déduire, sans dénaturation et abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant relatif à la valeur du terrain, que Mme X... était redevable envers les époux Y... de la somme qu'elle a fixée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du nouveau Code de procédure civile et 37, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Boré et Salve de Bruneton ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier février deux mille six.