AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu qu'André X... est décédé le 9 juin 1997, en laissant pour lui succéder Mme Y..., son épouse commune en biens, M. X..., son fils légitime, et M. Z..., son fils naturel ;
Sur le premier moyen :
Vu l'article 12, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'à la suite d'un licenciement, André X... a perçu une indemnité destinée, selon les termes de l'accord conclu avec son employeur, à réparer le préjudice moral causé par la rupture de son contrat de travail ;
Que M. Z... soutenait que cette indemnité, réparant un préjudice moral, présentait un caractère propre, de sorte que la communauté, qui l'avait encaissée, en devait récompense, tandis que Mme Y... et M. X... soutenaient que, réparant en réalité un préjudice économique, elle présentait un caractère commun, de sorte que la succession ne pouvait y prétendre ;
Attendu que, pour déclarer la communauté redevable d'une récompense envers la succession, l'arrêt attaqué énonce que la cour ne peut requalifier l'indemnité et décider qu'elle répare en réalité un préjudice économique ;
Qu'en se déterminant ainsi, alors que le juge doit restituer leur exacte qualification aux actes litigieux, sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en ses deux branches :
Vu les articles 455 et 954, alinéa 4, du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que, pour décider que M. X... doit rapporter à la succession la moitié de la libéralité qui lui a été consentie par ses parents pour acquérir un appartement situé à Vanves, l'arrêt attaqué énonce que celui-ci ne démontre pas que la donation dont il a bénéficié était préciputaire ou dispensée de rapport ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. X... qui, d'une part, soutenait que le caractère occulte de la donation commandait qu'elle fût considérée comme destinée à l'avantager, d'autre part, demandait la confirmation du jugement en ce qu'il avait estimé que ses parents avaient eu la volonté de le dispenser de rapport, dès lors que son père, en ayant reconnu un fils naturel en 1991, avait fait accéder celui-ci à la moitié d'une part successorale, contre les intérêts de son fils légitime, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences des textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit, d'une part, que la communauté est redevable à l'égard de la succession d'André X... d'une récompense de 221 051 euros avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 1997, d'autre part, que M. X... doit rapporter à la succession d'André X... la moitié de la libéralité qui lui a été consentie pour acquérir l'appartement de Vanves, l'arrêt rendu le 6 novembre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois janvier deux mille six.