AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept décembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller PONROY, les observations de la société civile professionnelle MASSE-DESSEN et THOUVENIN, de la société civile professionnelle LE GRIEL, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général DI GUARDIA ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- X... Jean-Luc,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 18 janvier 2005, qui, pour agression sexuelle aggravée, l'a condamné à 6 mois d'emprisonnement avec sursis, 3 ans d'interdiction d'exercice d'une activité impliquant un contact habituel avec des mineurs, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation " des articles 222-30, 222-39, 222-44, 222-45, 222-37, 222-48 et 222-48-1 du Code pénal, de l'article 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Jean-Luc X... coupable d'avoir commis une atteinte sexuelle avec violence, contrainte, menace ou surprise sur la personne de Lucie Y..., mineure de quinze ans, avec cette circonstance que les faits avaient été commis par une personne abusant de l'autorité conférée par ses fonctions, en l'espèce instituteur ;
"aux motifs propres que le prévenu conteste avoir pratiqué des caresses de nature sexuelle sur la jeune Lucie, son élève, au cours de la projection d'un film éducatif dans une salle de classe ; qu'il reconnaît cependant avoir installé cette élève sur les genoux, dans un geste affectueux selon lui ; qu'Evelyne Z..., institutrice, et Jacqueline A..., aide-maternelle, ont toutes deux déclaré avoir été surprises par l'attitude du prévenu qui, assis sur une table dans la salle de classe dont les rideaux avaient été tirés, tenait Lucie blottie contre lui en se penchant sur elle ; que l'expertise psychiatrique de la victime ne révèle aucune tendance à l'affabulation ; que le prévenu la décrit comme une élève modèle, avec laquelle il n'a jamais eu de problème ; que la relation spontanée de ces faits par Lucie à ses parents, l'attitude ambiguë du prévenu et les déclarations de ses deux collègues permettent d'établir la véracité des faits dénoncés ; qu'il convient par suite de confirmer le jugement tant sur la culpabilité que sur les peines prononcées ;
"et aux motifs, adoptés des premiers juges, que malgré la dénégation du prévenu, il résulte de la procédure et des débats que :
- selon les conclusions de l'expert psychiatre et du Docteur B..., aucun élément dans le comportement et la personnalité de Lucie Y... ne justifie de mettre en doute la fiabilité et la crédibilité de son discours ; - de manière spontanée et réitérée, cette dernière a clairement décrit les attouchements à caractère sexuel auxquels s'est livré son instituteur en lui caressant le sexe de sa main introduite dans la culotte ; - la description de ces faits et les circonstances dans lesquelles ils ont été commis n'ont jamais varié dans le discours de l'enfant et ne sont nullement contradictoires avec les déclarations des témoins, Mmes A... et Z..., qui ont souligné l'attitude pour le moins équivoque du prévenu qui tenait l'enfant sur ses genoux dans une position qu'il n'aurait jamais dû adopter à l'égard de l'enfant ; - en outre, aucune raison ne justifie pour Jean-Luc X... de prendre la jeune Lucie sur ses genoux un jour de canicule, alors même que l'enfant se plaignait de la chaleur ;
- de surcroît, il n'existe en l'espèce aucune raison chez la victime susceptible de laisser penser qu'elle accuse volontairement à tort son instituteur alors même qu'elle a manifesté auprès de sa mère sa crainte de voir " aller en prison " son instituteur avec lequel elle n'avait jusqu'alors jamais eu de problème ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que les faits sont caractérisés en l'espèce et l'infraction reprochée au prévenu dans tous ses éléments, tant matériel s'agissant d'une atteinte sexuelle par les caresses sur le sexe de la victime, établie tant par les accusations de la victime que par les témoignages concordants sur l'attitude et la position de l'auteur, commise avec surprise sur une mineure âgée de cinq ans par son instituteur qui a abusé de l'autorité conférée par sa fonction, qu'intentionnel s'agissant d'un acte volontaire de l'auteur qui a introduit sa main dans la culotte de l'enfant pour prodiguer ses caresses ; que dès lors, il y a lieu de déclarer Jean-Luc X... coupable des faits qui lui sont reprochés ;
" alors que dans ses conclusions, Jean-Luc X... faisait valoir que les témoins privilégiés de la scène ainsi rapportée, à savoir les autres enfants présents avec la victime et le maître dans la bibliothèque, n'avaient pas été entendus ; que les adultes présents dans la bibliothèque, à savoir Mme C..., directrice de l'école, et M. D..., n'avaient rien noté d'anormal ; que Jean-Luc X..., pendant la projection, avait nécessairement la main droite constamment occupée par la télécommande vidéo, pratiquant des arrêts sur image afin d'expliquer les scènes aux enfants et répondre à leurs questions, sa main gauche étant soit sur la table, soit servant à actionner la télécommande de la télévision car il y avait un problème de son ; que la fillette concernée avait déjà établi une mise en scène, obligeant antérieurement une de ses camarades à se mordre et se mordant également, toutes les deux allant ensuite se plaindre au maître et s'accuser mutuellement, mensonge qui avait été reconnu ; qu'il était également important de prendre en considération les dessins qu'elle avait réalisés, car la psychologue scolaire avait eu la surprise de constater qu'elle faisait des dessins qui montraient une préoccupation assez importante et était, d'une manière générale, très préoccupée par la "patchoune", quatre de ces dessins étant antérieurs aux faits litigieux et deux d'entre eux antérieurs à la prise de fonction dans l'école de Jean-Luc X... ;
qu'il appartenait aux juges du fond de prendre en considération les moyens de défense présentés par Jean-Luc X... pour confirmer son innocence ; que faute de l'avoir fait, les juges du fond n'ont pas légalement justifié leur décision" ;
Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel a, sans insuffisance ni contradiction, répondu aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie et caractérisé en tous ses éléments, tant matériels qu'intentionnel, le délit dont elle a déclaré le prévenu coupable, et a ainsi justifié l'allocation, au profit des parties civiles, des indemnités propres à réparer le préjudice en découlant ;
D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Ponroy conseiller rapporteur, M. Le Gall conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Souchon ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;