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07/12/2005 | FRANCE | N°04-18069

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 07 décembre 2005, 04-18069


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juin 2004), que M. Ting Yin X... et Mme Médérique Y..., divorcée X..., ont signé le 11 juillet 1991, par l'intermédiaire de M. Z..., agent immobilier, une promesse d'achat relative au droit au bail d'un commerce sous conditions suspensives ; que le 1er février 1992, ils ont signé avec les vendeurs un "protocole d'accord" constatant la non réalisation de l'acquisition et autorisant la restitution aux acquéreurs de l'aco

mpte versé, après remise à l'agent immobilier du montant de ses honorai...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 15 juin 2004), que M. Ting Yin X... et Mme Médérique Y..., divorcée X..., ont signé le 11 juillet 1991, par l'intermédiaire de M. Z..., agent immobilier, une promesse d'achat relative au droit au bail d'un commerce sous conditions suspensives ; que le 1er février 1992, ils ont signé avec les vendeurs un "protocole d'accord" constatant la non réalisation de l'acquisition et autorisant la restitution aux acquéreurs de l'acompte versé, après remise à l'agent immobilier du montant de ses honoraires ; qu'invoquant l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et l'absence de toute faute de nature à ouvrir à l'agent immobilier un droit à indemnisation, les consorts X... ont demandé la restitution intégrale de la somme consignée lors de la signature de la promesse ;

Sur les premier et deuxième moyens, réunis :

Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt de décider qu'aucune somme ne lui est due ni à titre de rémunération, ni à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :

1 ) que le tiers bénéficiaire d'une stipulation pour autrui acquiert contre le promettant un droit propre et direct lui permettant d'agir en exécution de l'engagement souscrit à son profit par le promettant envers le stipulant ; qu'il ressort du protocole d'accord du 1er février 1992 conclu entre la Société nouvelle de chaussures et les époux X... que ces derniers s'engageaient à régler à M. Gilbert Z... les honoraires qui lui étaient dus, "son action ayant été parfaite en tous points", soit la somme de 284 640 francs, en contrepartie de la restitution de l'acompte de 300 000 francs ; qu'en retenant que le principe de la relativité des conventions interdit à M. Gilbert Z... d'agir en exécution de ce contrat auquel il n'est pas partie, quand l'engagement souscrit à son profit, par les époux X..., envers la Société nouvelle de chaussures constituait une stipulation pour autrui, la cour d'appel a violé l'article 1165 du Code civil, par fausse application, et l'article 1121 du Code civil, par refus d'application ;

2 / qu'à défaut de rapporter la preuve qu'il a sollicité un prêt conforme aux caractéristiques définies dans la promesse de cession de droit au bail, le cessionnaire empêche la réalisation de la condition suspensive qui est réputée accomplie; qu'il s'ensuit que le cédant peut disposer à sa guise de l'acompte versé par le cessionnaire, et lui imposer d'en reverser le montant à l'agent immobilier, dans la limite du montant de sa commission ; qu'il résulte des constatations auxquelles les juges du fond ont procédé que les consorts X... n'ont pas sollicité l'octroi d'un prêt conforme aux caractéristiques de la promesse de cession du droit au bail ;

qu'en décidant que la Société nouvelle de chaussures avait renoncé à la cession du droit au bail, comme à toute indemnité, en dépit des désagréments subis, et qu'ils avaient restitué aux consorts X... le montant de l'acompte, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, s'ils n'étaient pas privés de la restitution de l'acompte qu'ils devaient reverser à M. Gilbert Z..., dans la limite du montant de sa commission, pour avoir empêché l'accomplissement de la condition suspensive, à défaut d'avoir demandé l'octroi d'un prêt conforme aux caractéristiques de la promesse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1121, 1134 et 1178 du Code civil ;

3 ) que s'il est interdit de renoncer par avance aux règles de protection établies par la loi sous le sceau de l'ordre public, il est en revanche permis de renoncer aux effets acquis de telles règles ; qu'en décidant que l'accord du 1er février 1992 serait nul, pour avoir été conclu en violation de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970, et de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 qui interdisent à l'agent immobilier de percevoir une commission d'un autre que son mandant, tant que l'opération n'a pas été effectivement réalisée, quand il était au pouvoir des parties de renoncer aux effets acquis de telles règles en s'engageant à rémunérer l'agent immobilier, une fois constaté l'échec de l'opération, la cour d'appel a violé les dispositions précitées, ensemble l'article 1134 du Code civil ;

4 ) qu'à supposer même que les conditions de son droit à commission ne soient pas remplies, l'agent immobilier peut obtenir des dommages-intérêts de celui qui l'aurait privé par sa faute de la réalisation définitive de l'opération ; que la cour d'appel a constaté que les consorts X... n'ont respecté aucun de leurs engagements, et qu'ils n'ont pas sollicité l'octroi d'un prêt conforme aux caractéristiques de la promesse ;

qu'en se bornant à constater que les parties avaient, d'un commun accord, renoncé à la réalisation de la promesse, sans rechercher si les consorts X... n'avaient pas privé M. Z... de toute chance de voir aboutir l'opération, à défaut d'avoir respecté leurs engagements, et de solliciter le prêt dont dépendait la réalisation de la promesse, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu d'une part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt, ni des conclusions d'appel que M. Z... se soit prévalu d'une renonciation des époux X... aux effets acquis des dispositions de l'article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et de l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 ; que le moyen est nouveau de ce chef, mélangé de fait et de droit ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant énoncé à bon droit que les dispositions d'ordre public des articles 6 de la loi du 2 janvier 1970 et l'article 73 du décret du 20 juillet 1972 prohibent tout versement à l'intermédiaire avant la réalisation définitive de l'opération, et relevé que l'acte sous seing privé du 1er février 1992 constatait la non réalisation de l'acquisition, faute d'accord dans les délais prévus, la cour d'appel, qui a retenu que les parties avaient décidé, d'un commun accord, de cesser toutes relations, a pu en déduire, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes et abstraction faite d'un motif erroné mais surabondant relatif au fait que M. Z... n'était pas partie à la convention du 1er février 1992, que ce dernier ne pouvait prétendre ni à des honoraires, ni à des dommages-intérêts en l'absence de faute des consorts X... susceptible de leur faire attribuer la responsabilité de la non réalisation de l'opération ;

D'où il suit que pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le troisième moyen :

Vu l'article 1153, alinéa 3, du Code civil ;

Attendu que l'arrêt condamne M. Z... à restituer la somme versée par le notaire en exécution du jugement assorti de l'exécution provisoire, avec intérêts au taux légal ayant couru pendant la période où il a bénéficié de cette somme ;

Qu'en statuant ainsi, alors que M. Z... qui détenait, en vertu d'un titre exécutoire, le montant de la condamnation prononcée à son profit, ne pouvait être tenu qu'au paiement des intérêts à compter de la notification, valant mise en demeure, de la décision ouvrant droit à restitution, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et attendu qu'il y a lieu, conformément à l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. Z... à payer les intérêts au taux légal sur la somme restituée ayant couru pour la période où il a conservé les fonds, l'arrêt rendu le 21 juillet 2004 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Dit n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que les intérêts seront dus à compter de la notification à M. Z... de l'arrêt le condamnant à restituer la somme susvisée ;

Dit n'y avoir lieu de modifier la condamnation aux dépens prononcée par les juges du fond ;

Condamne M. Z... aux dépens du présent arrêt ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Z... à payer aux époux X... la somme de 2 000 euros et rejette la demande de M. Z... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept décembre deux mille cinq.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 04-18069
Date de la décision : 07/12/2005
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence (2e chambre), 15 juin 2004


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 07 déc. 2005, pourvoi n°04-18069


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WEBER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:04.18069
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