AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Caen, 20 septembre 2004), et les pièces de la procédure, que M. X..., ressortissant géorgien en situation irrégulière sur le territoire français, a été interpellé puis placé en garde à vue le 14 septembre 2004, à 19 heures 55, à la suite de faits de violences, outrage et rébellion commis sur des fonctionnaires de la police municipale ; qu'ayant déclaré, au moment de la notification de ses droits en garde à vue le 15 septembre 2004, à 0 heure 55, vouloir s'entretenir avec un avocat commis d'office dès le début de cette mesure, l'officier de police judiciaire a laissé un message sur le répondeur téléphonique de la permanence des avocats le même jour, à 2 heures ; que le préfet du Calvados a pris à l'encontre de l'intéressé des arrêtés de reconduite à la frontière et de placement en rétention dans un local ne relevant pas de l'administration pénitentiaire ; qu'après avoir rejeté les exceptions de nullité soulevées, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation du maintien en rétention ;
Attendu que le procureur général près la cour d'appel de Caen fait grief à l'ordonnance d'avoir infirmé cette décision et ordonné la remise en liberté de M. X..., alors, selon le moyen, que diverses diligences étant attendues des enquêteurs aux premiers temps de la garde à vue, ce qui peut donner matière à établir une hiérarchisation des priorités, et le législateur n'étant malheureusement pas allé jusqu'à encadrer dans un laps de temps défini les diligences relatives à l'avis à avocat prévu par l'article 63-4 du Code de procédure pénale, comme pour l'avis à un membre de la famille ou l'avis au médecin qui peuvent désormais être différés de trois heures au maximum en vertu de l'article 63-1 du Code de procédure pénale, dans sa nouvelle rédaction issue de la loi du 4 mars 2002, il est du plus haut intérêt pour la sécurité des procédures de préciser de façon concrète le délai à partir duquel le retard dans l'avis à avocat doit être tenu pour excessif ; que, dès lors, si c'est sans délai que le bâtonnier doit être avisé d'une demande d'avocat d'office qui peut intervenir dès le début de la garde à vue, l'on voit mal en quoi, dans la même logique, un retard d'une heure dans la mise en uvre du droit à l'entretien avec un conseil serait plus excessif ou ferait davantage grief que le délai de trois heures désormais accordé pour l'exercice de la faculté de se faire examiner par un médecin, dont le différé peut être encore plus lourd de conséquences ;
Mais attendu que l'ordonnance retient à juste titre que le délai d'une heure qui s'est écoulé entre la demande faite par l'intéressé et l'information donnée au service de permanence des avocats, étant précisé que l'officier de police judiciaire n'a pas fait mention dans son procès-verbal d'une circonstance particulière qui l'aurait empêché de donner cette information sans délai, contrevient aux prescriptions de l'article 63-4 du Code de procédure pénale et constitue une violation des droits de la défense, l'intéressé ayant été privé de la possibilité d'avoir un entretien avec un avocat dès le début de la garde à vue ;
Que le premier président en a exactement déduit que cette irrégularité avait vicié la procédure de garde à vue et celle de la rétention administrative ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du six décembre deux mille cinq.