AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° B 03-43.230, n° C 03-43.231 et n° D 03-43.232 ;
Attendu que MM. X..., Y... et Z..., salariés de la société Transporteurs réunis par La Flèche cavaillonnaise, ont été licenciés le 13 décembre 1999 pour motif économique ;
Sur le premier moyen commun aux pourvois :
Attendu qu'il est fait grief aux arrêts attaqués (Nîmes, 7 mars 2003) d'avoir dit que le licenciement de MM. X..., Y... et Pourvin avait un caractère illicite et d'avoir condamné la société Transporteurs réunis par La Flèche cavaillonnaise à leur verser à ce titre une indemnité, alors, selon le moyen :
1 / que la procédure prévue par l'article L. 321-2 ne s'impose que lorsque le nombre des licenciements envisagés est supérieur à 10 sur une période de 30 jours et que tel n'est pas le cas de l'entreprise qui, arrêtant l'activité d'un secteur comprenant 12 véhicules et leurs chauffeurs, en mute trois dans un autre service sans aucune modification des contrats de travail et n'est donc amenée à envisager un licenciement pour les 9 autres ; de sorte que l'arrêt attaqué qui estime, au contraire, que l'effectif à prendre en considération était l'effectif initial dans son ensemble viole l'article L. 321-2 du Code du travail ;
2 / que la cour d'appel qui décide, en outre, que le licenciement économique n'aurait aucune cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur de justifier d'une impossibilité de reclasser le salarié, sans s'expliquer comme elle y était invitée, sur la lettre du 15 octobre 1999 par laquelle l'entreprise avait proposé à ces salariés non seulement une modification de leur contrat de travail en raison de la fermeture du service longue distance industrielle, mais également à titre de reclassement quatre autres postes de chauffeur à Vitrolles, à Modane ou à Créteil, prive sa décision de toute base légale au regard des articles L. 321-1 et suivants du Code du travail ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que, selon l'employeur lui-même, le projet de restructuration affectait le poste de 12 salariés, la cour d'appel a retenu que ces derniers étaient concernés par une proposition de modification du contrat de travail ; qu'ainsi, elle a fait une exacte application de l'article L. 321-2 2 du Code du travail dès lors que le projet conduisait à envisager au moins dix licenciements dans une même période de 30 jours ;
Et attendu qu'ayant énoncé à bon droit que dans ces conditions un plan de sauvegarde de l'emploi devait être établi, et ayant constaté qu'il ne l'avait pas été, elle a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen du pourvoi n° C 03-43.231 et sur le deuxième moyen du pourvoi n° D 03-43.232 :
Attendu qu'il est fait grief aux arrêts d'avoir dit que l'indemnité complémentaire de congés payés était due aux salariés et d'avoir condamné à ce titre la société Transporteurs réunis par La Flèche cavaillonnaise à payer à MM. X... et Y... une somme de ce chef, alors, selon le moyen :
1 / que le courrier du 28 octobre 1994 dont MM. X... et Y... n'étaient pas destinataires puisqu'ils avaient été affectés à un poste de chauffeur longue distance à une date postérieure, comportait uniquement des mesures compensatoires au profit des salariés en poste qui à l'époque subissaient une modification de leur contrat de travail ; de sorte qu'en étendant ces effets à l'ensemble du personnel, la cour d'appel a dénaturé ladite lettre en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2 / que le principe d'égalité de traitement dans l'entreprise n'interdit pas à l'entreprise, dans l'exercice de son pouvoir de direction, de fixer pour des personnes exerçant des fonctions similaires des rémunérations différentes si celles-ci reposent sur un critère objectif, de sorte que la cour d'appel, qui s'abstient de s'expliquer sur les conclusions de la société coopérative Les Transporteurs réunis par La Flèche cavaillonnaise qui faisaient valoir que cette indemnité complémentaire de vacances avait été instituée pour les salariés présents en 1994 afin "d'accompagner la baisse de rémunération des conducteurs longue distance" et ne concernait pas MM. X... et Y... qui n'occupaient pas cette fonction au 1er janvier 1995 et n'avaient donc pas subi de diminution de salaire de ce chef, viole l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que n'étant pas contesté que les salariés ont intégré le service des conducteurs longue distance après le 1er janvier 1995, la cour d'appel, répondant ainsi aux conclusions en les écartant, a retenu par une interprétation nécessaire de la lettre du 28 octobre 1994 que la prime litigieuse était attribuée sans autre condition que l'appartenance à la catégorie des conducteurs longue distance à compter du 1er janvier 1995 ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen du pourvoi n° C 03-43.231 :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir dit que l'entreprise n'avait pas satisfait à son obligation au titre de la priorité de réembauchage et d'avoir condamné la société Les Transporteurs réunis par La Flèche cavaillonnaise à payer à M. Y... une somme de ce chef, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article L. 321-14 du Code du travail, le salarié licencié pour motif économique bénéficie d'une priorité de réembauchage pour tout emploi devenu disponible et compatible avec sa qualification et que prive sa décision de base légale au regard de ce texte, l'arrêt qui se borne à affirmer que la société ne contestait pas que des embauches aient été effectuées pour des emplois saisonniers et qui s'abstient ainsi de s'expliquer sur les conditions relatives à la disponibilité d'un tel emploi et la compatibilité d'un tel emploi avec la qualification du chauffeur ;
Mais attendu que la cour d'appel n'avait pas à s'expliquer sur un point implicitement mais nécessairement reconnu par l'employeur ;
que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Les Transporteurs réunis par La Flèche cavaillonnaise aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, la condamne à payer la somme globale de 2 500 euros à MM. Z...
Y... et à L'Union départementale CFDT 84 ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois novembre deux mille cinq.