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22/11/2005 | FRANCE | N°05-82807

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 22 novembre 2005, 05-82807


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de Me BLANC, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gilbert, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NIMES, en date du 3 mars 2005, qui, sur sa plainte, contre personne non dénommée, p

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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-deux novembre deux mille cinq, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller CHANET, les observations de Me BLANC, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Gilbert, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NIMES, en date du 3 mars 2005, qui, sur sa plainte, contre personne non dénommée, pour diffamation publique et injures publiques, a constaté l'extinction de l'action publique par la prescription ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 65 de la loi du 29 juillet 1881, 8, 82-1, 89-1, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré prescrite l'action publique des chefs de diffamation et injures ;

"aux motifs que contrairement à ce qui avait initialement été attesté par le service de la régie, la partie civile avait, le 10 février 2004, soit dans le délai imparti, versé la consignation mise à sa charge ; que si la plainte du 8 décembre 2003 suivie du versement dans le délai imparti de la consignation avait mis en mouvement l'action publique et interrompu la prescription, aucun acte interruptif de prescription n'était intervenu entre le 16 janvier 2004, date de l'ordonnance de consignation et le 21 juillet 2004, date de l'ordonnance de soit-communiqué ; que, par ailleurs, la partie civile ne pouvait invoquer, au regard de la carence du juge d'instruction, la suspension de la prescription dès lors qu'elle avait la faculté de saisir le juge d'instruction d'une demande d'acte interruptive de prescription ;

"alors, d'une part, que la prescription de l'action publique, interrompue par le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile lorsque la consignation prévue est versée dans le délai imparti, est suspendue de la date du dépôt de la plainte à celle du versement ; qu'en ayant énoncé qu'aucun acte interruptif de prescription n'était intervenu du 16 janvier 2004 au 21 juillet 2004, après avoir constaté que la consignation ordonnée était intervenue le 10 février 2004, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que la prescription de l'action publique est suspendue quand un obstacle de droit met la partie poursuivante dans l'impossibilité d'agir ; que la possibilité pour la partie civile de demander au juge d'instruction l'accomplissement d'actes interruptifs n'étant ouverte que pendant l'information, la partie civile à qui l'absence de consignation était à tort opposée, ne peut se voir reprocher de ne pas avoir saisi le juge d'instruction d'une telle demande" ;

Vu l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 ensemble les articles 82-1, 88 et 89 du Code de procédure pénale ;

Attendu que, d'une part, le dépôt d'une plainte avec constitution de partie civile, à la suite duquel est versée, dans le délai imparti, la consignation prévue à l'article 88 du Code de procédure pénale interrompt la prescription de l'action publique ; que cette prescription est suspendue de la date du dépôt de la plainte à celle du versement de la consignation dans le délai imparti ;

Attendu que, d'autre part, la prescription de l'action publique est nécessairement suspendue lorsqu'un obstacle de droit met la partie poursuivante dans l'impossibilité d'agir ; qu'il en est ainsi lorsque la personne qui, lésée par un crime ou un délit, a mis en mouvement l'action publique par sa plainte avec constitution de partie civile, ne dispose d'aucun moyen de droit pour obliger le juge d'instruction à accomplir un acte interruptif de prescription ;

Attendu que, pour déclarer éteinte par la prescription l'action engagée par Gilbert X... sur sa plainte avec constitution de partie civile du chef de diffamation et injures publiques, l'arrêt attaqué énonce qu'aucun acte interruptif n'est intervenu entre le 16 janvier 2004, date de l'ordonnance de consignation et le 21 juillet 2004, date à laquelle le juge d'instruction a communiqué la plainte au procureur de la République pour que ce magistrat prenne ses réquisitions ; que les juges ajoutent que la partie civile ne saurait invoquer la carence du juge d'instruction dès lors qu'elle avait la faculté de saisir ce dernier d'une demande d'acte sur le fondement des dispositions de l'article 82-1 du Code de procédure pénale ;

Mais attendu qu'en se déterminant ainsi alors que, d'une part, le délai de prescription a été suspendu entre le dépôt de plainte et le versement de la consignation effectué dans le délai imparti et que, d'autre part, il résulte de la combinaison des articles 82-1 et 89 du Code de procédure pénale, que la partie civile n'étant recevable à présenter une demande d'acte qu'après l'ouverture de l'information, était dans l'impossibilité de combattre l'inaction du juge d'instruction, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des textes et des principes susvisés ;

D'ou il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs,

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, en date du 3 mars 2005, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi,

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L.131-6, alinéa 4, du Code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Chanet conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 05-82807
Date de la décision : 22/11/2005
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESCRIPTION - Action publique - Suspension - Impossibilité d'agir - Obstacle de droit - Cas.

ACTION PUBLIQUE - Extinction - Prescription - Suspension - Impossibilité d'agir - Obstacle de droit - Cas

PRESSE - Procédure - Action publique - Extinction - Prescription - Suspension - Impossibilité d'agir - Obstacle de droit - Cas

Il résulte de la combinaison des articles 82-1 et 89 du Code de procédure pénale que la faculté de présenter une demande d'acte au juge d'instruction n'est offerte à la partie civile qu'après l'ouverture de l'information. Celle-ci ne dispose d'aucun moyen de droit pour obliger le juge d'instruction à accomplir un acte interruptif de prescription tant que le procureur de la République n'a pas pris ses réquisitions après communication de la plainte en application de l'article 86 du Code de procédure pénale. Entre temps la prescription est nécessairement suspendue. Dès lors, encourt la cassation pour violation de la loi, l'arrêt de la chambre de l'instruction qui, pour déclarer éteinte par la prescription, l'action engagée par la partie civile du chef de diffamation et injure publique, après avoir constaté que plus de trois mois se sont écoulés entre la date à laquelle le juge d'instruction a rendu l'ordonnance fixant le montant de la consignation et celle à laquelle, après versement de celle-ci, il a communiqué la plainte au procureur de la République pour que ce magistrat prenne ses réquisitions, retient que la partie civile ne saurait invoquer la carence du juge d'instruction dès lors qu'il lui appartenait de saisir ce dernier d'une demande d'acte sur le fondement de l'article 82-1 du Code de procédure pénale.


Références :

Code de procédure pénale 82-1, 86, 88, 89
Loi du 29 juillet 1881 art. 65

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes (chambre de l'instruction), 03 mars 2005

A rapprocher : Chambre criminelle, 1987-10-27, Bulletin criminel 1987, n° 374, p. 992 (cassation partielle), et les arrêts cités ; Chambre criminelle, 1999-09-07, Bulletin criminel 1999, n° 181, p. 578 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 22 nov. 2005, pourvoi n°05-82807, Bull. crim. criminel 2005 N° 304 p. 1033
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2005 N° 304 p. 1033

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Mouton.
Rapporteur ?: Mme Chanet.
Avocat(s) : Me Blanc.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2005:05.82807
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