AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° T 04-45641 à n° F 04-45653 ;
Sur le moyen unique, commun aux treize pourvois, pris en sa première branche :
Attendu que M. X... et douze autres salariés de la société GTM en qualité de "dockers professionnels hommes de bord", ont saisi la juridiction prud'homale de demandes en paiement de compléments de salaires et de dommages-intérêts, fondées sur l'application de la Convention collective nationale de la manutention portuaire étendue et de divers décrets portant sur le montant du SMIC ;
Attendu que les salariés font grief aux arrêts attaqués (cour d'appel de Fort-de-France, chambre détachée de Cayenne, 19 avril 2004) de les avoir déboutés de leurs demandes, alors, selon le moyen :
1 / que selon l'article 16 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, la France forme avec les peuples d'outre-mer une union fondée sur l'égalité des droits et des devoirs, sans distinction de race ni de réligion ; que les dispositions des conventions et accords collectifs de travail ne peuvent faire échec au principe d'ordre public "à travail égal, salaire égal" énoncé aux articles L. 133-5-4 et L. 136-2-8 du Code du travail ; qu'une convention collective nationale étendue ne peut exclure de son champ d'application territorial les travailleurs d'un département d'outre-mer ; que l'article 1 de la Convention collective nationale de la manutention portuaire étendue du 31 décembre 1993 disposait, dans sa rédaction antérieure à l'arrêté ministériel d'extension du 19 octobre 1999, qu'elle s'applique aux entreprises de manutention portuaire situées en France métropolitaine, ce dont il résultait que les salariés des entreprises situées dans le département d'outre-mer de la Guyane étaient exclus de ce champ d'application et, par voie de conséquence, du bénéfice des avantages salariaux prévus pour les dockers professionnels par cette convention collective ; que les dispositions de l'article 1 précité sont nulles en ce qu'elles aboutissent à une rémunération moindre pour les salariés des entreprises de manutention en Guyane, lesquels étaient en droit de
percevoir un salaire égal à ceux effectuant le même travail sur le territoire métropolitain ; qu'en retenant l'absence de toute discrimination salariale, la cour d'appel a violé ensemble l'alinéa 16 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, l'article L. 122-45 du Code du travail et le principe "à travail égal, salaire égal" énoncé aux articles L. 133-5-4 et L. 136-2-8 du Code du travail ;
Mais attendu qu'aux termes de l'article L. 132-5 alinéa 1 du Code du travail, les conventions et accords collectifs de travail déterminent leur champ d'application territorial et professionnel ;
Et attendu que la cour d'appel a relevé que la convention collective nationale de la manutention portuaire n'avait été rendue applicable en Guyane qu'en vertu de l'arrêté du 19 octobre 1999 ; qu'elle en a exactement déduit que la Convention ne pouvait recevoir application avant l'extension de son champ d'application territorial ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les 2ème et 3ème branches du moyen qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission des pourvois :
REJETTE les pourvois ;
Condamne les demandeurs aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize novembre deux mille cinq.