AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que M. X..., engagé en 1967 par la société Jedelec et passé au mois de mai 1991 au service de la société Martin Jedele, a interrompu son travail pour cause de maladie et a été classé en invalidité, 2 catégorie, le 1er avril 1995 ; qu'une procédure de redressement judiciaire ayant été ouverte le 17 avril 1996 à l'égard de la société Martin Jedele et d'autres sociétés du même groupe, un jugement du 16 juillet 1996 a arrêté un plan de cession au profit de la société Clémessy, à laquelle s'est substituée une société France Réseaux ; que M. X..., qui n'avait pas été licencié par l'administrateur judiciaire, a saisi la juridiction prud'homale de demandes indemnitaires ; qu'après avoir été licencié le 27 septembre 1999 par le commissaire à l'exécution du plan en raison de son inaptitude au poste de travail et de l'impossibilité de le reclasser, il a présenté au conseil de prud'hommes des demandes additionnelles au titre de ce licenciement et pour obtenir réparation d'un préjudice lié à la résiliation d'un contrat d'assurance complémentaire maladie souscrit par l'employeur ;
Sur le moyen unique du pourvoi principal de l'AGS ;
Vu l'article L. 143-11-1, alinéa 2, 2 du Code du travail ;
Attendu que, selon ce texte, l'assurance contre le risque de non-paiement des sommes dues aux salariés, en cas de procédure de redressement judiciaire de l'employeur, ne couvre que les créances résultant de la rupture des contrats de travail intervenant pendant la période d'observation ou dans le mois qui suit le jugement arrêtant le plan de redressement ;
Attendu qu'après avoir fixé le montant des créances indemnitaires de M. X..., résultant de son licenciement par le commissaire à l'exécution du plan, la cour d'appel a retenu que ces créances relevaient de la garantie de l'AGS ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le contrat de travail avait été rompu par ce mandataire de justice plus de trois années après le jugement arrêtant le plan de redressement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et attendu qu'en vertu de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi sur ce chef de demande, de mettre fin au litige sur ce point, par application de la règle de droit appropriée ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident du salarié ;
Vu les articles R. 516-1 et R. 516-2 du Code du travail, ensemble l'article L. 621-125 du Code de commerce ;
Attendu que, pour déclarer M. X... forclos en sa demande tendant à faire fixer une créance indemnitaire, en réparation d'un préjudice lié à la résiliation du contrat d'assurance de groupe souscrit par son employeur, la cour d'appel retient que si celui-ci a saisi la juridiction prud'homale dans le délai de deux mois suivant la publication d'un avis de dépôt des relevés de créances résultant du contrat de travail, cette saisine se limitait toutefois au seul paiement de participation et de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, et que les autres chefs de demandes ayant été formés pour la première fois le 23 novembre 1999, sans qu'ils soient virtuellement compris dans la demande initiale, ces nouvelles prétentions, exprimées au-delà des délais imposés par les articles L. 621-125 et L. 621-46 du Code de commerce, étaient atteintes de forclusion ;
Qu'en statuant ainsi, alors d'une part, que l'article L. 621-125 du Code de commerce n'impose au salarié, à peine de forclusion, que de saisir la juridiction prud'homale dans le délai qu'il prévoit, et alors d'autre part, que des demandes nouvelles peuvent être présentées en tout état de la procédure ainsi engagée, peu important que le délai de forclusion soit alors expiré, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en vertu de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant partiellement sans renvoi de mettre fin au litige sur ce point, par application de la règle de droit ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a retenu la garantie de l'AGS au titre des indemnités dues au salarié à la suite de son licenciement en ce qu'il a déclaré M. X... irrecevable en sa demande portant sur une créance indemnitaire liée à la résiliation d'un contrat d'assurance de groupe, l'arrêt rendu le 23 octobre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi sur ces points ;
DIT et juge que la garantie de l'AGS ne s'applique pas aux créances résultant du licenciement prononcé le 27 septembre 1999 ;
Déclare M. X... recevable en sa demande tendant à la réparation d'un préjudice lié à la résiliation d'un contrat d'assurance complémentaire maladie ;
Renvoie la cause et les parties devant la cour d'appel de Besançon pour qu'il soit statué sur le fond de cette demande indemnitaire ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille cinq.